ROLEPLAY


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#1 [fr] 

Une rumeur grandissante circulait depuis quelque temps dans tout l’Empire. Elle concernait l’akenakos Azazor, portée disparu depuis de nombreux mois. Son absence avait été signalée au retour d’une expédition dans les profondeurs, à la recherche de membres de la tribu des Saigneurs de Racines. Le groupe était tombé sur une grosse patrouille de kirostas et, devant le nombre, celui-ci avait fini par être ramené par les Puissances. Mais l’ancien légionnaire n’avait pas été rappelé. Et depuis, les avis allaient bon train sur ce qui avait pu lui arriver. Certains, qui avaient participé à l’expédition, l’avaient vu s’écrouler au sol lors de l’attaque de kirostas, quand d’autres l’avaient vu détaler à toutes jambes. Cette dernière affirmation était surtout colportée par des médisants, trop ravis de voir en Azazor un lâche fuyant devant les kitins. D’autres enfin n’imaginaient tout simplement pas sa mort et continuaient de croire en son retour.

Mais depuis une semaine, la rumeur circulait qu’il avait été aperçu à Pyr. Des étudiants à l’Académie Impériale l’avaient croisé dans l’école. On disait qu’il avait un air étrange et distant, que son regard était effrayant, que son visage, déjà largement brûlé depuis son retour des Anciennes Terres, s’était creusé, dévoilant un teint cireux et cadavérique. Certains prétendaient qu’ils l’avaient vu trainer la carcasse d’un kitin des profondeurs dans un couloir, quand d’autres arguaient qu’il s’agissait du corps d’un étudiant. Il portait tantôt la tenue blanche des enseignants de la chambre de la Vérité, tantôt une armure lourde et sanguinolente. Toujours est-il que la rumeur ne cessait d’évoluer et de s’enrichir au fil des commérages. Pourtant, quand on interrogeait les membres de l’Académie, aucune réponse n’était donnée. Suivant les membres, on avait le droit à un soufflement de mépris, un léger sourire ou à une indifférence la plus totale. Aussi, la rumeur continuait d’enfler, et le grand jeu des étudiants était à celui qui trouverait Azazor, chacun le cherchant dans des endroits de plus en plus improbables et n’hésitant pas à rajouter de nouvelles rumeurs aux anciennes. On jouait à se faire peur, en se menaçant les uns les autres d’être emporté par Azazor au détour d’un couloir ou en affirmant que celui-ci avait été embauché à l’Académie pour punir les élèves peu studieux. Et il était devenu rare de croiser des étudiants déambulant seuls dans les couloirs.

Pour Phaïstos, jeune étudiant de seize ans à l’Académie Impériale, tout cela relevait du folklore. Le genre de bêtises que les plus grands racontent aux plus jeunes pour les effrayer. Il avait entendu parler des légendes circulant sur Azazor. On disait qu’il avait survécu au feu du Dragon, à une chute dans une faille sans fond du Nexus, à un empoisonnement et même, disait-on, à la rencontre avec fyrak en personne. Pourtant, cette fois-ci, Azazor était vraiment mort, il en avait la conviction. On ne pouvait pas taquiner la mort et constamment lui échapper. Tôt ou tard, comme disait sa mère, celle-ci vous rattrappe. Aussi, Phaïstos se souciait peu des rumeurs et il restait concentré sur ses études. Aujourd’hui, il aurait un nouveau professeur de kitinologie et il avait hâte de voir à quoi il ressemblerait. Un jeune, cela le changerait de tous ces vieux profs décrépis qu’il avait parfois du mal à entendre du haut de l’amphi.
Il se rangea avec les autres étudiants devant la porte de la salle de cours. Ils étaient une vingtaine, tous habillés d’une drogeus, à attendre l’arrivée de leur nouveau professeur. Des fils et filles de bonne famille pour la plupart, ayant déjà passé leurs huit dernières années à étudier à l’Académie. Dans l’attente, des bavardages s’installèrent parmi les rangs. L’ambiance était assez détendue en attendant la venue du nouveau prof.

Mais quelques minutes plus tard, des pas résonnèrent dans les couloirs. Des pas lourds, à la démarche martiale. Un officier de l’armée impériale ? Il en passait régulièrement, l’Académie étant aussi une école militaire. Les étudiants se mirent au garde à vous en voyant arriver un grand fyros, massif dans sa kostomyx noire. Il marchait tel un militaire, droit dans ses bottes. Une grande hache noire était accroché dans son dos. Le visage du fyros était ravagé par les cicatrices et les brûlures. Son front dégarni laissait entrevoir un creux important, comme si une grosse épine s’était plantée dans son crâne avant d’être retirée. Les homins des Nouvelles Terres avaient rarement l’occasion de voir des cicatrices, encore moins d’une telle ampleur. La magie puissante de ces terres réparait généralement le corps sans laisser de traces. Et pourtant ce que tous voyaient sous leurs yeux terrifiés n’était pas une hallucination.
Le fyros continua d’avancer vers eux. Vision cauchemardesque que tous avaient redouté croiser cette dernière semaine, et qui s’avançait là, sous leur regard épouvanté, finissant par arriver à leur hauteur et se plantant devant eux. Ils purent alors constater que ses yeux étaient d’un éclat rouge sang. On disait beaucoup de choses sur les yeux rouges. Qu’ils étaient porteurs de malédiction, ou signe d’une grande puissance. Mais ce regard avait quelque chose d’encore plus terrifiant. Quelque chose de malsain. Il entendit gémir l’un de ses camarades à ses côtés.
Le fyros les regarda longuement d’un air sévère, dévisageant chacun d’entre eux. Quand Phaïstos croisa son regard, il eut l’impression d’être sondé de l’intérieur. Un frisson lui traversa l’échine et des images torturées lui imprégnèrent l’esprit. Comme ses camarades avant lui, il baissa instinctivement la tête. Alors, ayant constaté que tous avaient baissé la tête, le fyros parla d’une voix rauque :

« Je m’appelle Azazor Eridlo Mirihus et je suis votre nouveau professeur de kitinologie. »

On entendit un bruit sourd. C’était l’un des étudiants qui venait de s’évanouir.

Edité 2 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 mois).

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#2 [fr] 

Le cours de kitinologie avait lieu en dehors de Pyr, en haut d’une dune à l’ombre bienvenue des olansis. Le vent portait avec lui une odeur de résine et de sciure, tandis que les élèves attendaient dans l’angoisse. Parmi eux, Phaïstos, jeune homin d’un naturel curieux mais peu habitué à l’austérité, observait avec une appréhension palpable la silhouette imposante d'Azazor, leur nouveau professeur de kitinologie.

Azazor était tout ce que l’on pouvait imaginer d’un guerrier brutal : une carrure imposante, renforcée par une armure lourde noire gravée de marques de batailles passées. Son visage buriné par les épreuves, zébré de cicatrices et de brûlures, était une carte vivante de combats inégales contre les kitins. Il tenait fermement sa hache à deux mains, une arme massive ornée de ce qu’il avait appelé une « dent de dragon ». La hache semblait presque vivante sous la lumière crue du matin et il la maniait avec autant d’aisance qu’un autre prof aurait manié une canne. Quand il parla, sa voix rauque fusa comme un coup de fouet :

— Cessez de bailler aux kitins, bande de toubs ! Aujourd’hui, on va voir ce que vous avez dans le ventre, ou si vous finirez comme ces abrutis qui se jettent à gorge déployée dans une colonie de kirostas. Prenez vos bâtons et bouclier !

Le ton était sec, brutal, et les élèves obéirent en silence, le regard fuyant. Phaïstos, bien que terrifié et n'ayant aucune idée de ce qu'il avait prévu, ressentit une étrange admiration pour cet homin qui semblait avoir vu l’enfer et en être revenu. Sous sa peur, il y avait une véritable soif d’apprendre.

Azazor entama son cours en marchant devant eux, chacun de ses pas martelant la sciure comme un tambour de guerre.

— Les kitins, grogna-t-il, sont pas des bestioles que vous pouvez sous-estimer. Chacun d’eux, même le plus petit, peut vous arracher une jambe. Ils ont une stratégie, une hiérarchie, et surtout une intelligence de groupe qu’aucun d’entre vous ne peut espérer surpasser. Votre seule chance ? Apprendre à les comprendre. Et à être plus rapides qu’eux.

Puis, sans prévenir, il pointa Phaïstos de la lame de sa hache.

— Toi, le jeunot. Tu crois pouvoir échapper à un kincher ? Explique-nous leur stratégie d’encerclement.

Pris au dépourvu, Phaïstos sentit son cœur tambouriner dans sa poitrine. Pourtant, il rassembla son courage et balbutia une réponse, se rappelant les manuels qu’il avait dévorés.

— Euh… Les kinchers… Ils… attaquent en formant un cercle autour de leur proie pour… couper toute fuite. Ensuite, les plus rapides… euh… se jettent en avant pour… affaiblir…

Azazor l’interrompit d’un rugissement.

— Plus fort, Phaïstos ! Tes murmures vont pas les arrêter !

L’adolescent se redressa, le regard de ses camarades lui brûlant le dos. Cette fois, sa voix fut plus assurée.

— Les kinchers encerclent leur proie pour l’épuiser et couper toute retraite ! Les plus rapides frappent les premiers, tandis que les autres… gardent leurs distances pour bloquer toute fuite.

Un silence s'en suivit, puis Azazor hocha lentement la tête.

— Pas trop mal. Mais n’oublie jamais : ce n’est pas en récitant que tu vivras. C’est en agissant ! Maintenant, on va passer à la pratique.

Le groupe sortit de l’ombre rassurante des olansis pour se retrouver sous la chaleur écrasante du désert. La lumière brûlante de l’astre du jour tapait sans relâche en cette heure méridienne, et la sciure soulevée par le vent semblait s’accrocher à leur peau en une couche poisseuse. Azazor était implacable.

— Vous allez jouer un combat contre des kinchers, annonça-t-il, un rictus cruel sur le visage. Certains d’entre vous feront les kitins, d’autres les proies. Et pour vous motiver, sachez que je n’hésiterai pas à frapper. Un kitin ne retient jamais ses coups, alors moi non plus.

Les élèves s’organisèrent, certains prenant des bâtons et adoptant des postures menaçantes, imitant les kinchers avec plus ou moins de succès. D’autres, dont Phaïstos, se préparèrent à jouer le rôle des proies, les muscles tendus par la nervosité.

— Commencez ! hurla Azazor.

Le chaos s’installa immédiatement. Les élèves-« kinchers » bondirent sur leurs camarades, simulant des morsures et des coups de pattes. Mais Azazor, lui, ne simulait pas. Sa hache frappait du plat de la lame les retardataires et ceux qui osaient ralentir.

— Plus vite ! Vous appelez ça une esquive ? rugit-il en abattant sa hache sur le bouclier tremblant d’un élève, qui vacilla sous l’impact avant de tomber à genoux.

Phaïstos, le souffle court, esquiva de justesse un élève jouant le kincher. Il se retourna juste à temps pour voir Azazor frapper un autre camarade à l’épaule, le faisant rouler dans la sciure.

— Relève-toi ! cracha le professeur de kitinologie. Un kitin ne te laisse pas le temps de pleurnicher ! T’as le droit de tomber, mais si tu restes à terre, tu crèves !

La chaleur, la sciure brûlante et la douleur pesaient sur le groupe. Plusieurs élèves étaient à terre, blessés ou épuisés, mais Azazor n’avait cure de leur état. Il poursuivait sans relâche, aboyant des ordres, frappant, corrigeant.

— Si vous ne pouvez pas survivre ici, dans cet exercice, vous êtes foutus dans un vrai combat ! grogna-t-il.

Phaïstos souffrait, ses muscles hurlaient, mais il se surprenait à être captivé. Chaque mot, chaque geste d’Azazor semblait être une leçon forgée dans le sang et l’expérience. Il n’était pas seulement un guerrier – il était un survivant.

Quand enfin la session prit fin, les élèves s’effondrèrent dans la sciure, haletants et la peau couverte de bleues. Phaïstos, épuisé mais debout, sentit une lueur de fierté. Il avait tenu bon.

Azazor les surplomba, la froideur acérée du jugement dans son regard. Des yeux rouges, terrifiants.

— Pas mal pour un premier jour. Mais souvenez-vous : face à des kitins, l’hésitation, c’est la mort. Reposez-vous si vous pouvez. Demain sera pire.

En dépit de la brutalité de l’entraînement, Phaïstos sentait une étrange gratitude. Azazor ne cherchait pas à les briser. Il les forgeait.

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#3 [fr] 

une présence dans le lointain

#4 [fr] 

Dans le bureau du Haut Conseil de l’Académie Impériale, l’atmosphère était lourde. Les torches fixées aux murs projetaient des ombres vacillantes sur le sol. Azazor se tenait debout devant une table massive, derrière laquelle trois membres du Haut Conseil de l’Académie Impériale étaient assis. Il fixait ses interlocuteurs d'un regard brûlant, presque incandescent, comme s'il pouvait faire fondre leur autorité à la seule force de sa volonté.

— Azazor, tes méthodes sont inacceptables ! tonna Euphanix Apotheps, l’archiviste en cheffe. Mettre des élèves en danger de mort pour leur apprendre à combattre les kitins est une absurdité ! Hier encore, un élève a été ramené par les Puissances. Il serait tombé du haut de la falaise dans le Canyon Interdit à cause d’un coup de hache de ta part.

— Il a survécu, non ? rétorqua Azazor en croisant les bras, un rictus moqueur étirant ses lèvres. Le danger forge le caractère. Si ces gosses ne sont pas capables de tenir sur leurs jambes, ils n’ont rien à faire ici.

— Tu n’es pas professeur de combat mais de kitinologie, siffla une fyrosse aux cheveux blonds et au visage sec. Il y a des livres pour apprendre comment agissent les kitins.

— Les kitins, eux, ne lisent pas.

— Ce n’est pas seulement une question de méthode ! intervint un fyros à la chevelure blanche immaculée, ses yeux étincelants d’indignation. Les parents de tes élèves nous inondent de plaintes ! Certains considèrent déjà ta nomination au poste de professeur comme une insulte. Toi, un homin des basses classes, qui ose violenter leurs enfants, c’est inexcusable !

Le visage d’Azazor s'empourpra. Sa mâchoire se crispa, et il planta son regard dans celui du fyros.

— Une insulte ? Une insulte, c’est de remettre en cause mon travail après tout ce que j’ai accompli pour l’Empire. Si je suis ici, c’est parce que je connais les kitins mieux que quiconque ! C’est à moi que vous devez les premières cartes précises des nids, à moi que vous devez beaucoup de vos connaissances sur les kitins des profondeurs. J’ai passé une bonne part de ma vie dans les tunnels, à étudier ces monstres, à saigner pour chaque fragment de connaissance. Vous ne sauriez même pas à quoi ressemble un dragon rouge si je n’en avais pas affronté un ! Et vous osez me parler d’insulte ?

Il s’avança d’un pas vers la table, son ombre projetée par les torches semblant grandir derrière lui. Sa voix se fit plus rugissante, comme le grondement du tonnerre sur le point d’éclater.

— Ce n’est pas moi qui insulte l’Empire. C’est vous, avec vos craintes et vos règles ridicules. Vous élevez une génération de faibles, bons à fuir à la première difficulté. Quand les kitins des profondeurs décideront de passer à l’attaque – car ils le feront, croyez-moi – ces enfants gâtés ne seront que de la chair à déchiqueter. Et vous, conseil de lâches, en serez les premiers responsables !

— Azazor ! s’écria Euphanix, frappant la table du poing. Tu oublies ta place ! Discipline !

Mais le Fyros était hors de lui. Il frappa à son tour la table du poing d’une telle force qu’on entendit celle-ci craquer.

— Ma place ? Ma place est dans les profondeurs, à risquer ma vie pour que l’Empire survive, pendant que vous restez ici à m’accuser d’être un monstre. Si vous pensez pouvoir trouver quelqu’un de meilleur pour enseigner, alors renvoyez-moi ! Mais sachez ceci : quand le sol tremblera et que les kitins blancs surgiront, vous regretterez de ne pas m’avoir écouté.

La tension atteignait son paroxysme. Un silence pesant s’était installé, jusqu’à ce qu’un soldat en armure entre précipitamment dans la pièce.

— talumetimos Azazor ! haleta-t-il. Pephoan Kridix te demande dans son bureau. C’est urgent.

Azazor, encore rouge de colère, planta un dernier regard glacial dans les yeux de ses supérieurs. Puis, sans un mot, il pivota sur ses talons et quitta la salle d’un pas martial.

Derrière lui, les membres du Haut Conseil se lancèrent des regards lourds de sens. Une chose était sûre : cet homin, bien que brillant, était un élément incontrôlable. Mais ils savaient aussi que, dans ce domaine dangereux qu’était la kitinologie, ils n’avaient pas de meilleur connaisseur du terrain.

Edité 2 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 1 mois).

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#5 [fr] 

Dans la pénombre du bureau du capitaine Kridix à Dyron, de nombreuses cartes, rapports et armes encombraient l’espace. Kridix se tenait debout, les mains croisées derrière le dos, fixant une carte de l’écorce marquée de symboles représentant les incursions des kitins des profondeurs dans le désert.

La porte s’ouvrit doucement, et Azazor entra. Son visage était marqué par une fatigue profonde, accentuée par les échos d’un récent entretien houleux avec le Haut Conseil de l’Académie Impériale. Il avait été sermonné pour ses méthodes brutales d’enseignement, mais cela ne semblait pas être sa préoccupation principale. Pourtant, une pointe d’amertume brillait encore dans ses yeux lorsqu’il inclina la tête en guise de salut. Kridix se retourna, son regard dur mais teinté d’une sombre camaraderie.

— Tu sembles bien maussade aujourd’hui. Que t’arrive-t-il ?

— Rien qui ne mérite d’être partagé, capitaine. Concentrons-nous sur nos affaires.

Azazor s’avança et s’arrêta devant le bureau. Bien que Kridix lui fit signe de s’asseoir, il resta debout, les bras croisés. Son regard se porta sur des documents écrit sur du cuir de varinx. Il savait ce qu’ils contenaient, parce que c’est lui qui les avait rédigés. Il s’agissait de ses rapports sur les kitins des profondeurs.

— Alors, cette dernière descente dans les primes racines profondes, Azazor, qu’as-tu vu de particulier ?

— Tu n’as pas lu mes rapports ?

Se faisant, il pointa les documents sur le bureau.

— Bien sûr que si. Cela rejoint d’ailleurs ce que les Rangers ont constaté dernièrement au Gouffre d’Ichor. Nous en reparlerons tout à l’heure.

Hésitant, il ajouta :

— Mais avant, je voulais te parler… d’autre chose…

Il prit une longue inspiration, puis il se pencha légèrement en avant, sa voix baissant d’un ton :

— Les adeptes du Culte de Fyrak ? On sait qu’ils vivent quelque part dans ces profondeurs. As-tu vu quoi que ce soit ? Une trace, un indice ?

Un frisson imperceptible parcourut Azazor. Il baissa brièvement les yeux avant de répondre, le cœur battant contre sa poitrine.

— Non, capitaine. Rien.

Un silence pesant s’installa. Kridix n’était pas dupe, il connaissait ce vieux bourru et percevait son trouble. Mais il hocha la tête, l’air de ne pas insister.

— Dommage. Mais nous devons rester vigilants. Si tu apprends quoi que ce soit...

— Bien sûr Kridix, répondit un peu trop rapidement Azazor.

— Ces fanatiques sont tout aussi dangereux que les Kitins. Peut-être même plus.

Azazor ravala difficilement sa salive et hocha la tête.

— Bon, reprenons donc ce que tu as noté sur les kitins des profondeurs.

Il lui fit de nouveau signe de s’asseoir, ce qu’Azazor accepta cette fois-ci. Ils avaient de longues heures devant eux, à étudier ces curieux mouvements de kitins dans les primes. Des heures pour oublier le Haut Conseil et les conséquences qu’il y aurait après son entretien écourté inopinément.

Les remontées sur les kitins des profondeurs ne laissaient rien présager de bon. Pendant qu’Azazor lui rappelait la teneur de ses rapports, Kridix réfléchissait à tout cela. Il observait également. Il observait les gouttes de sueurs coulant du front brûlé d’Azazor. Des gouttes qui venaient s’écraser sur le parquet en bois, telles des gouttes de pluies annonciatrices d’orage. Et il songeait à ce qu’elles pouvaient signifier...

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#6 [fr] 

Azazor se réveille en sursaut d’un cauchemar. Il tend machinalement sa main droite vers sa hachette toujours à côté de son lit mais ne trouve qu’un sol nu. Il se souvient alors. Il n’est pas chez lui mais dans les geôles de Pyr. L’empoisonnement raté de Lykos. Son arrestation. Les insultes de Lyren. Il s’assoit en sueur sur une paillasse très sommaire lui servant de couche.

Des bribes du mauvais rêve lui reviennent à l’esprit. Il s’entend parler d’une voix d’outre-tombe.

« Tu n’es pas vraiment fyros, en toi coule le sang des traitres... »

Il lève alors sa hache ardente et hurle :

« FYRAK, EN TON NOM JE TUE ! »

La hache s’abat, débitant la tête qui vient rouler dans le grand brasier à côté. Dans les flammes, la tête le regarde incrédule. Une tête qu’il connaît bien. Celle de son fils Uzykos.

Dernière édition par Azazor (il y a 2 semaines).

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#7 [fr] 

Au petit matin, Azazor glisse une lettre sous la porte de la caserne des Légions Fyros. Puis, tirant son mektoub, il part en direction du vortex sud de Thesos.
Fils,

Quand tu liras cette lettre, je serai parti via la route d’Oflovak pour les Anciennes Terres. J’irai jusqu’au désert de jadis, sur les traces d’un Empire disparu.
Mais avant, je voulais te dire certaines choses. Je me doute que tu ne voudras pas me parler, alors je le fais par écrit. C’est peut-être mieux comme ça finalement. Ainsi, si tu ne veux pas m’écouter, il te suffit de jeter cette lettre immédiatement.

Tu restes ? Très bien. Tout d’abord, je voudrais te parler de ta mère. Je sais que tu ne la portais pas dans ton coeur. Mais il est trois choses que j’ai appris à ses côtés.
Premièrement, elle m’a appris à me battre sans m’économiser. C’était vraiment la plus douée au combat, une vraie furie. Je pense que Lyren a hérité de quelque chose d’elle. Cet instinct animal, cette rage de vaincre à tout prix. Quand l’enjeu est énorme, il faut parfois prendre tous les risques.
Ensuite, elle m’a fait comprendre qu’il y avait une différence entre mentir et différer la vérité. Toutes les vérités sont bonnes à dire à ceux qu’on aime. Mais parfois, il est des vérités qu’il faut garder un temps secret. Même si ça nous bouffe de l’intérieur. Pour le bien des êtres chers.
Enfin, ta mère m’a appris que le chemin de la vérité est pavé de choses horribles. Ta mère a fait bien de mauvaises choses, mais toujours dans un but louable. Je ne te raconterai pas ses expériences sur les frippos qu’elle m’a décrites, ce n’est pas le genre de chose qu’on couche par écrit. Mais je sais qu’elle avait toujours en tête la quête du savoir.

Je pense que tu vois où je veux en venir en te racontant les qualités de ta mère. Je veux bien sûr parler de son sacrifice. Je n’ai pas cherché plus que ça à expliquer mon geste lors de mon procès. Aucun n’était vraiment disposé à entendre la vérité. Seul Pephoan Kridix a su m’écouter dans ma cellule. J’aurai dû lui faire confiance dès le début. Alors dans cette lettre, je vais te dire cette vérité, à toi, mon fils. Le culte de fyrak, c’est l’antithèse de la culture fyros. Ils ne cherchent pas à combattre le dragon mais à le réveiller. Ils sacrifient pour cela des homins. Et ils s’infiltrent partout dans la société fyros. Ne va pas croire qu’ils se contentent de vivre dans les profondeurs en sortant de temps en temps pour tuer quelqu’un. Non, la plupart des adeptes vivent dans les sociétés homines. Certains ont même quelques responsabilités. Sache que ce taré de Pimokos par exemple était déjà haut placé. Il était chef des gardes de Dyron. Un général ! Que crois-tu qu’il se serait passé si j’avais été condamné ? Il serait devenu un héros, celui qui a sauvé l’Empereur. A la mort de sharükos, nous aurions peut-être eu un adepte du culte de fyrak à la tête du sharük ! Aussi, cette infiltration a probablement sauvé l’Empire. Mais c’est le genre de réalité qu’on préfère ne pas voir. Le sharük est bien trop sûr de sa toute puissance pour imaginer s’écrouler. Et pourtant, il n’a jamais été aussi faible.

Si ça m’enlève ma culpabilité ? Non, bien sûr. Le fait que la cause soit juste n’a rien à voir avec la culpabilité. Déjà, suis-je vraiment responsable de la mort de ta mère ? Une partie de moi se demande s’ils l’ont capturé exprès à cause de moi ou si elle était déjà leur captive. Je n’en sais rien et je garderai ce doute à jamais. Mais tu vois, on pourrait me certifier qu’elle était déjà leur captive avant que je ne décide de m’infiltrer parmi les adeptes, ça n’enlèverait rien à ce sentiment de culpabilité. Car cette culpabilité, je la ressens dans sa mise à mort en tant que telle, dans son application effective. Toi, Lyren, sharükos, personne ici, ou si peu, ne savent ce que c’est que de tuer vraiment. De tuer définitivement. Alors tu penses bien que tuer l’un des êtres qui nous est le plus cher, fusse pour une cause juste, est une meurtrissure de l’âme qu’on garde à jamais. Et cette cicatrice, je n’en tire aucune fierté.

Tu vois fils, j’ai longtemps pensé que nous, enfants des bas fond de l’Empire, étions aussi honorables que ceux d’en haut. Que nous aussi, nous méritions, à force d’effort, de toucher du doigt les avantages d’une vie au sein des élites. Mais non. La société fyros est ainsi faite que ceux qui sortent la tête de la sciure ne sont pas pour autant différents de ceux qui continuent d’y ramper. On te le fait bien comprendre quand tu oses t’approcher de trop près de leurs privilèges. Toi-même, tu ne seras jamais accepté pour ton mérite. Et même si tu pars sur une meilleure ligne de départ que moi à ton âge, tu devras te battre dix fois plus pour gagner ta place. Mais celle-ci restera précaire. Tu ne seras qu’un imposteur aux yeux des élites. Et au final, tu finiras par faire ce que la société attend de toi. Le sale boulot. Celui sans honneur, sans gloire. Le travail ingrat, celui qui ne donne aucune gratitude. On te montrera du doigt comme un meurtrier, parce que tu auras osé faire ce que eux n’auraient pas osé. Tu ne recevras rien. Pire, on te prendra ce que tu as sué à obtenir.

Et tu vois, peu importe. Je me fous de leur reconnaissance. Je les hais, tous autant qu’ils sont, ces traine-palais, ces biens nés. La seule reconnaissance que je peux espérer avoir, c’est dans celle des coeurs durs des fyros de la sciure, comme nous, comme ta mère. Mais eux ne diront rien. Cette reconnaissance est silencieuse. Eeri et moi étions toujours prêt à faire exploser notre colère. Mais quand il s’agissait de montrer de la gratitude, nous étions plutôt taiseux. Et pourtant, il suffisait d’un seul regard pour comprendre que nous nous aimions et nous respections. C’est ce regard que j’ai vu dans ses yeux avant de la tuer. C’est ce regard, et uniquement ce regard, que tu peux attendre de la part des fyros de la sciure. Mais il vaut plus que tous les honneurs, que tous les titres, plus encore que le feu sacré.
Nés de la sciure, nous retournerons à la sciure. Tel est notre destin. Car un fyros doit toujours combattre la fumée qui l’élève pour retourner dans les profondeurs combattre le dragon. Et là-dessus, nous autres, rampant au sol, nous avons déjà une longueur d’avance.

Si tu as atteint la fin de cette lettre, c’est que tu as progressé en capacité de concentration. Sache que je suis fier de toi mon fils. Même si j’ai été un père horrible, je l’ai fait pour la bonne cause. Et là aussi, je n’attends aucune reconnaissance de ta part. Être père, c’est ramper dans la sciure pour le bien de sa progéniture, sans rien attendre en retour. Je t’aime, ne doute jamais de cela.

Sur ce, prends bien soin de ta demi-sœur. Dis-lui que je lui pardonne d’avoir passé les légions fyros du joug des kamis au joug de la karavan. J’espère qu’elle comprendra un jour qu’on peut se passer des Puissances, comme son père et sa mère l’avaient bien compris. Et que si elle veut se venger pour mon crime, qu’elle n’hésite pas à traverser la route d’Oflovak. Je serai heureux de l’accueillir.

Va, suis ton destin, Uzykos, quelle qu’en soit l’âpreté du chemin. Et souviens-toi, fils, de ton courage à chacun de tes pas.

Papa

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