ROLEPLAY


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#54 Multilingue 

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Journal de bord d'Eeri

Azazor m’a rendu mon journal. Et m’a sauvée.
Ce n’est pas la première fois que j’écris ça, mais j’avais de nouveau perdu espoir de réécrire ici. Et une fois de plus, on s’en est sortis. Il faut croire que quelque chose veille sur ma vieille peau. Une puissance? Ou la chance, simplement. Comme à la roue de ce bon vieux gubani toujours plus fortuné.

Les maraudeurs lui ont donc rendu mes écrits. C’est dire qu’ils lui faisaient confiance. Pas comme à moi. Et par ma faute, on se retrouve comme des fugitifs, en haut de cette montagne.

Il a sans doute lu.

Mais je vais réécrire depuis le début, depuis notre arrivée à Sentinelle.
Nous avons été arrêtés par les maraudeurs, nombreux et lourdement armés. Séparés, privés de nos affaires. Il me semble qu’ils aient très vite mieux traité Azazor que moi… Et ils m’ont posé des questions idiotes. De quel clan je fais partie. Là, j'ai compris que mon cristal posait problème. Ce que je fais là. J’ai cru que je pouvais jouer à la plus fine avec eux. Mais pas moyen d’entendre parler du clan des Arpenteurs d’horizons. Résultat, ils m’ont transférée à Citadelle, attachée, avec le convoi qui emmenait Azazor. Détaché et libre, lui. Arrivée là-bas, ils m’ont pendue par les pieds dans un placard à balais. Si j’avais eu une hache à portée de main, je t’aurais fait une bouillie de maraudeurs… La tête en bas, je ne sais combien de temps. Quelques heures, quelques jours? Ils m'ont finalement emmenée pour être interrogée par plusieurs maraudeurs. Sans doute haut-placés, peut-être même celle qui administre la Citadelle, la régente, comme ils l’appellent. Mais je me demandais pourquoi mon cas les intéressaient plus que ça. Il semble que les maraudeurs s’espionnent entre eux, et que les clans se tirent dans les jambes pour récupérer un peu de pouvoir, faire valoir leurs opinions. Ils m’ont peut-être prise pour l’une de ces espionnes. Là, avec eux, j’ai joué franc-jeu, et dit toute la vérité. Je ne saurai jamais si ça à marché, s’ils m’auraient libérée ou tuée. D’après ce que j’ai compris plus tard, j’aurai sans doute été oubliée dans une cellule jusqu’à ce que je meure de faim, les maraudeurs ayant d’autres kitins à fouetter.

Et il s'est réellement passé ce à quoi je ne m'attendais pas, mais alors pas du tout...
Je pensais peut-être qu'Azazor, ayant arrangé les choses pour moi, allait arriver avec des gardes pour me faire libérer avant de reprendre la route. Enchaînée comme j'étais, je ne voyais pas d'autre échappatoire possible. Mais c’est Aride qui est arrivé. Un homin casqué, seul. Je compris après qu’il n’avait pas agit seul, mais je ne fus en contact avec nul autre. Il a assommé un garde, ouvert la porte, m’a délivrée. J’aurais pu tomber amoureuse, s’il ne s’agissait pas d’un matis, et plus tout jeune. Mais je n’étais pas au bout de mes surprises. Il m’a dit connaitre mon nom, mon goût pour la liqueur de shooki - il m'en a même offert une. Je n’ai même pas eu la présence d’esprit de m’intéresser à sa provenance, mais j'ai cru comprendre que c'était plutôt quelque chose de rare à Citadelle. Il est tout à fait pensable que ce savoir-faire soit revenu des Nouvelles Terres, et qu'ils en produisent un peu, quelque part dans un camp du désert morcelé.

Aride, Arma Rapide, Maraudeur et Chercheur d’Elias, exilé dans les Anciennes Terres depuis une vingtaine d’années de Jena. Il m’a montré son visage, chose que les Trytonistes ne font normalement pas, chez nous. Il ne m’a pas donné son vrai nom, et je ne l’aurais de toute façon pas demandé. Il m’a donc connue alors que j’étais une jeune légionnaire qui se posait des questions et venait de tourner le dos aux kamis. Il a surtout connu Lopyrèch… Icus, mon mentor, mon ami. Celui qui a fait de moi une chercheuse de vérité, celui qui m’a fait ouvrir les yeux sur tant de mystères, sur tout ce que les puissances nous cachent… Le seul autre fyros, avec Azazor, auquel je me suis abandonnée... Une fois, l'alcool aidant. Encore une chose que je n'ai dite à quasiment personne, tiens... Et ramèch, voilà le résultat. Une fyros qui abandonne ses mioches et qui ment comme elle respire. Lopy... Si tu étais encore de ce monde, tu me mettrais une paire de baffes bien pires que celles qu’Azazor a envie de me coller tous les jours. Et tu aurais bien raison. Ou tu me dirais simplement de cacher la vérité plus intelligemment... Je me rends compte que si c’était utile sur les Nouvelles Terres, là ou les Puissances nous traquent, là ou nous faisons tant de cas des jeux de pouvoirs insipides entre les nations, c’est quelque chose de totalement stupide et inutile ici, en l’absence des Puissances et des pouvoirs politiques. Mais lorsque je réfléchis à ce que je peux répondre à une question, ne sort de ma bouche que l’option la plus improbable et mensongère… Je dois changer ça.

Je dois donc ma liberté à ce matis. Il a même pris le temps de récupérer mes affaires, et de me fournir une autre armure de maraudeur, bleue. Celle que j’avais en arrivant aurait trop attiré l’attention. Il m’a donnée une pique et un bouclier, en plus de ma hachette et de mes amplificateurs qu'il avait pu récupérer. Une pique ! La seule arme efficace contre certains kitins. J'avais cassé la dernière dans je ne sais plus quel combat. Des vivres, de quoi tenir quelques jours. Il n’a rien demandé en échange, je n’aurais pas pu lui offrir grand chose. Si ce n’est de faire vivre la croyance d’une hominité libérée. Nous sommes partis au petit matin de la cache ou il m’avait amenée et avons repris ce jeu de cache-cache avec les kitins et les patrouilles de maraudeurs. Je ne m’attendais pas à ça de Citadelle. Ce n’est pas une ville, c’est un champ de bataille, ou se déroule une guerre permanente avec les kitins. Les Maraudeurs ici sont presque les Rangers de chez nous, le coté j’aime tout le monde en moins. Ici, c'est marche ou crève, c’est la porte qui retient l’enfer du prochain essaim derrière les montagnes. Bon, je ne dois pas exagérer non plus. Il m'a aussi dit que Citadelle regorge de lieux de vie : des auberges, des écoles, des lieux d'entrainement, des armureries... Ils habitent ici, mais tout a été conçu, au fil du temps, pour être déplacé facilement et rester à l'abris des Kitins. Ils ne m'ont pas proposé de visiter, je lui ai répondu, en riant.

Avant de partir, il me raconta aussi son voyage pour arriver ici. À peu près le même que nous avons fait, mais avec un groupe plus large aux origines assez disparates. Ce qui ne l'empêcha pas de voir plusieurs de ses compagnons tomber, notamment pendant la traversée de la Mer de Bois. Lorsqu'il arriva, l'ancien Sujet du Royaume qu'il était du servir plusieurs années à l'Avant-Poste de la Falaise Nuageuse, avant de pouvoir être considéré comme digne de confiance et d'être autorisé à rejoindre leurs rangs. Après ça, finalement, il a pu rejoindre la Citadelle. Certains de ses compagnons sont toujours ici, quelques-uns, surtout les plus agés à l'époque, étaient restés sur l'île d'Oflovak.

J’ai aussi appris une chose très intéressante. J'avais compris que les maraudeurs utilisent des objets de la Karavan, pillés sur les croiseurs abandonnés par exemple, pour faire fonctionner leur propre technologie. Comment, ça reste à découvrir, mais le contact que j'ai eu avec eux ne va pas m'aider à en savoir plus. En revanche, ce que je ne savais pas, est que la Karavan est encore présente dans la zone, d’une certaine façon. Peu au sol, mais surtout depuis le ciel. Aride m’a expliqué que parfois les vaisseaux de la Karavan attaquent les Kitins. Ils appellent ça une "frappe" ici. De puissants sorts, envoyés depuis leurs vaisseaux situés vraisemblablement au dessus de la canopée. Sans doute quand les kitins sont trop concentrés à un endroit, parfois juste devant les portes de Citadelle. Ou, le plus souvent, dirigé contre certains spécimens en particulier, ces fameux flamboyants dont nous avions entendu parler.

Aucun kami dans la zone, en revanche, m’a dit Aride. En tout cas, pas qu’il sache. Il se raconte que du temps de Melkiar, certains chefs de clans avaient eu des contacts avec eux, mais c'est devenu presque une légende, de nos jours. Non pas que cela me surprenne, ça vient même confirmer pas mal de vieilles théories. Mais que la Karavan essaie encore et toujours de contenir les kitins, avec les maraudeurs, est une information étonnante. Parfois, m'a t-il dit, des agents Karavan sont aperçus à Citadelle, lors de certaines réunions importantes le plus souvent réservées chefs de clans. Nul ne sait, à part sans doute ces derniers, si ces ambassadeurs demeurent en permanence à Citadelle. Il me laissa aussi entendre, sans vouloir en dire plus, que la technologie des Maraudeurs était en partie liée à celle de la Karavan.

Alors, j'ai demandé... S’il n’étaient pas là, les maraudeurs arriveraient-ils à retenir les Kitins? Travaillent-ils vraiment ensemble? Il me semble que sa vision de la Karavan n'était plus celle que nous, Chercheurs d'Elias pouvions avoir dans les Nouvelles Terres. Mais Aride n’a pas vraiment pu m’en dire plus, nous étions déjà en retard pour assister au départ d'Azazor.

Puis quelque chose a sans doute mal tourné. Son plan était de suivre le convoi d’Azazor, et lui laisser quelques heures d’avance. Comme il l’avait prévu, les gardes qui l’avaient accompagné jusqu’à ce chemin escarpé étaient restés là un moment après le départ du fyros, et lorsque celui-ci ne fut plus en vue, ils se dispersèrent dans les anfractuosités du canyon. Après quelques secondes, du point d’observation où Aride et moi étions positionnés, il nous fut impossible détecter la présence d’un seul homin. Le matis semblait tendu. Nous avons encore patienté, puis il m’a indiqué le chemin à prendre, me disant qu’il allait me suivre à distance. En faisant attention à ne pas me faire voir. "Si quelque chose tourne mal pour moi, cache-toi, et laisse moi gérer. Nous ne nous en sortirons que si l'on ne me voit pas avec toi. Si tu es repérée... cours. Je verrai ce que je peux faire". Je lui ai demandé de partir dès maintenant, de se téléporter s’il pouvait. Il avait assez pris de risques. Il m’a fait oui de la tête sans vraiment répondre ce qu’il allait faire. J’espère qu’il n’a pas eu de problèmes. Puis après l'avoir remercié une dernière fois, je suis partie dans la direction qu’il m’avait indiquée.

Après quelques minutes, alors que j'allais traverser une zone relativement découverte, un brouhaha a commencé à se faire sentir, semblable aux nuées de kitins que j’avais pu voir quelques jours plus tôt. Je me suis cachée comme j’ai pu dans une anfractuosité de sciure, et j'ai attendu un bon moment, essayant de ne pas paniquer, que le brouhaha passe. Ça a duré, et je me suis perdue dans mes penséses... Et si ma libération compromettait la sécurité des Trytonistes de Citadelle? Et si, par ma faute, l'attention se portait sur eux, au point qu'ils soient incriminés? Lorsque je suis sortie de mes pensées, le bruit avait cessé.

En ressortant de ma cachette, malgré mes précautions, je suis tombée nez à nez avec un maraudeur, seul, et armé d'une lance. Mon clan, ce que je fais ici ? Je n’ai pas menti, et lui ai dit que je me cachais des Kitins, en ramassant ma pique pour feindre de la remettre sur mon dos. D'un mouvement vif, je la lui ai alors plantée en dessous du casque, droit dans le cou. Un coup sec, fatal, pour un homin qui ne s’y attend pas. "Avec les amitiés d’Akilia" j’ai dit en frappant, sans vraiment réfléchir. Son corps s’est dématérialisé. Toub de toub… Sur le moment, je n'avais rien trouvé de mieux pour détourner leur attention. S’ils pensent que je suis une espionne du clan des cendres, ils en oublieront peut-être les Trytonistes.

Il m'a fallu plusieurs heures d'escalade avant que je ne puisse voir Azazor, de loin. Le bougre s'en sort pas mal, je dois dire. Il est bien plus en forme qu'au début de notre voyage. Je suis restée à distance, pour qu’il ne me voit pas. Pas encore. Je devais lui laisser un jour ou deux d’avance. Par chance, il semblait ne pas regarder en arrière. Lorsqu'il a établi un camp pour la nuit, j'ai essayé de dormir à même la sciure dans une crevasse de la falaise, réfléchissant à comment arriver devant lui. Que pouvais-je lui dire... Pour dédramatiser, maintenant que Citadelle était derrière nous, je pensais à... "Aza ! 'ren pyr, ça marche la grimpette?" "C'est vivifiant ici, tiens. On se fout des avoines maintenant ou on garde ça pour plus tard?".

Il faut croire que je réussis toujours mes arrivées. Le lendemain, il prit une pause après sa traversée hasardeuse d'un pont de corde. J'attendais de l'autre coté qu'il veuille bien re-démarrer, toujours pour lui laisser de l'avance. C'est alors que j’ai réalisé, par chance car j'essayais de me cacher de lui, que quelques maraudeurs escaladaient plus bas, après moi. Ils m'avaient vue, et espéraient m'atteindre sans bruit. Je n'avais aucune chance de me cacher ni des uns, ni de l'autre. Le combat n'était pas une bonne idée, je me suis donc élancée pour traverser le pont avec mon barda sur le dos. Azazor était surpris, j'ai cru qu'il allait m'envoyer par le gouffre. C'était eux, ou moi. Mais il a attendu que je traverse, avant de donner un grand coup de hache dans les cordes du pont pour le couper.

Il a sans doute lu.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#55 Multilingue 

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Les deux aventuriers sont enfin arrivés tout en haut de la dorsale. Alors qu'ils se dirigent vers la bordure du plateau à l'est, Eeri pousse un soupir. Cela l'embête de relancer le sujet, mais il faut crever l'abcès.

- Bon, tu peux me l'avouer maintenant, t'as lu mon journal?

Azazor pousse un grognement mais finit par répondre oui dans sa barbe. Il ne l'a plus taillée depuis leur arrestation par les maraudeurs, lui donnant une allure d'ermite un peu illuminé.

- Donc tu sais pour... Uzykos?

Eeri prend soin de peser ses mots, s'attendant à tout moment à un accès de colère comme le gros fyros en a l'habitude. Cependant, sa réponse est particulièrement posée, ce qui est inquiétant.

- ney, je sais.
- ça a un rapport avec le fait que tu as coupé ces fichues cordes du pont d'izam?

Le fyros ne répond pas, continuant sa marche vers l'est. Eeri ne préfère pas insister. Elle sait déjà une chose, il a lu ses notes. Et c'est pas plus mal finalement.

Une heure plus tard, Azazor s'arrête. Eeri croit alors qu'il va enfin lui en dire plus. Au lieu de ça, il reprend sa marche mais lentement et finit par se figer à une vingtaine de mètres. Eeri le rejoint prudemment, ne sachant trop à quoi s'attendre. La vision qui s'offre à elle est tout bonnement monstrueuse. D'où ils sont, ils peuvent enfin voir le sol en contrebas à l'horizon. Un sol rouge et mouvant. Encore quelques centaines de mètres, et ils sont au bord de la falaise. Tout en bas, on distingue à peine le sol. Celui-ci est littéralement recouvert de kitins. On peut remarquer des endroits plus denses en kitins que d'autres, mais où que porte leur regard, tout n'est qu'invasion rampante.

Azazor tourne son regard vers la fyrette. La peur se lit sur son visage. La peur mais aussi... l'excitation. Car ce qu'ils voient en contrebas, c'est aussi la terre de leurs ancêtres. Ils y sont enfin arrivés. Ils voient pour la première fois ce que peu d'homins des Nouvelles Terres ont déjà vu: l'ancienne terre des fyros.

Ils restent assis là une bonne heure, les jambes dans le vide, à contempler le paysage qui leur rappelle celui des dunes impériales, une marée de kitins rouges en plus. Quand Azazor prend enfin la parole.

- Eeri?

Celle-ci lève les yeux de la marée grouillante de kitin.

- Hein, quoi?
- Si je t'ai aidé avec les marauds qui te poursuivaient, c'est bien à cause d'Uzykos. Je ne veux pas qu'il grandisse comme moi sans connaitre sa mère.

Il pointe un doigt plein de menace vers Eeri.

- Alors t'as intérêt à survivre.

La fyrette sourit et hoche la tête.

- De toute façon, je te préviens, si tu survies pas, je te tue!

A ces mots, il éclate de rire, suivie aussitôt par Eeri. En bas, les kitins continuent de grouiller, occupant les terres qui furent jadis celles des fyros.

Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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fyros pure sève
akash i orak, talen i rechten!
élucubrations
biographie

#56 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Eeri surgit de derrière un grand morceau d’écorce et lança sa pique, qui toucha sa cible au poitrail. Sans attendre, elle s’élança en sortant une dague de sa ceinture, rattrapa la pique de sa main gauche et fit pivoter le manche vers le haut, afin de faire tomber l’animal au sol. Elle acheva le capryni d’un coup de dague, en grimaçant un peu. Puis, l’attrapant par les pattes arrières, elle le traîna sur une centaine de mètres, en direction d’Azazor.

— Azazor, prépare un feu! On va se gaver de barbaque!

Le fyros s’exécuta aussitôt, avec le peu de bois qu’il avait pu trouver. Il avait faim,ça faisait bien deux jours qu’ils n’avaient pas vu la trace d’un animal.
Dès que le feu commença à prendre, il posa sa cuirasse dessus afin de faire cuire les tranches de viande que découpait Eeri. Après ça, elle fit pendre à sa pique de fines lamelles découpées dans les parties grasses, et positionna l’arme horizontalement à proximité du feu. Une façon assez rapide de faire sécher la viande pour pouvoir la conserver quelques jours, espérait-elle. La tâche aurait été plus facile à la lumière naturelle, mais la zone était fraiche, à l'ombre de la canopée, et le soir arrivait.

Les deux mastiquaient en silence, profitant du repas. Dès qu’Eeri eut terminé, elle se leva.

— Nous n'avons pas assez de bois pour terminer de faire sécher la viande. Je retourne essayer d'en forer.

Sans attendre, elle empoigna sa hachette, la pioche qu’Azazor avait encore, par chance, et s’éloigna.

Le fyros était assis à mâchonner le reste de son repas. Il observait la canopée au dessus de lui, d’un oeil un peu rêveur. La végétation qui couvrait certaines parties et pas d’autres, la façon dont certaines racines semblaient se reposer littéralement sur d’autres, comme si par leurs enchevêtrements complexes, elle s’entraidaient pour ne pas s’effondrer. Puis il suivait des yeux les entrelacs jusqu’à l’horizon, espérant apercevoir les endroits où l’écorce et la canopée se rejoignaient. À vue d’oeil, estimer la taille des différentes canopées était difficile, même d’où ils se trouvaient. Il se rapprocha un peu du feu. Tant ils avaient eu chaud durant leur ascension, ce qui contrebalançait les nuits fraiches, la zone qu'ils venaient de traverser était en permanence à l'ombre de ce grand pan de canopée. Ils s'attendaient à une nuit glaciale.

Passer par le haut de la dorsale était certes la meilleure solution pour aller en direction de Coriolis. En revanche, ils ne pouvaient transporter que peu de vivres, leurs mektoubs étant restés à la Citadelle. L’altitude et le chemin escarpé, ou plutôt, l’absence de chemin et les crevasses, rendait la probabilité de croiser des Kitins presque nulle. Au plus avaient-ils aperçu un ou deux kipestas, à flanc de colline, en contrebas. Mais très vite ils se rendaient compte qu’ils ne croisaient aussi que peu de gibier. Le capryni qu’Eeri venait de chasser était un miracle inattendu. Ils n’avaient, depuis leur départ, capturé tout au plus qu’un ou deux Yubos plutôt maigres et déshydratés.

Lorsqu’Eeri revint avec un peu plus de bois, elle commença par consolider le feu et en rapprocher un peu la viande à faire sécher. Restant accroupie là, près du feu, elle regarda Azazor, et sourit. Pour la première fois depuis des jours, il semblait reposé et détendu.

— Je dois te raconter comment je m'en suis sortie.

Azazor, détourna ses yeux de la canopée pour regarder le feu, et répondit.

— La question que je me pose, c’est comment on va revenir. Il est hors de question de repasser par la Citadelle, et je ne pense pas qu’ils re-construisent ce pont de corde de sitôt. D’autant que je ne serai pas bien reçu non plus…

Eeri continua en ignorant ces nouveaux bougonnements d’Azazor.

— C'est grace un ami de Lopyrèch. Il m’a connue quand j’étais jeune.

Azazor frissona en entendant ce nom, sa mâchoire s'arrêta lentement de mastiquer et ses yeux s'écarquillèrent. Il resta quelques secondes en silence, comme pour se convaincre qu'il avait bien entendu.

— Il t’a libérée?
— ney. Il a pris beaucoup de risques pour ça. C’est lui qui m’a donné cette armure bleue, la mienne était trop voyante.
— Ça ne les a pas empêchés de te repérer et te poursuivre.

Eeri raconta sa captivité et son évasion, en effleurant le sujet des convictions Trytonistes de son libérateur.

— Tu es sure que c’est tout?

La fyrette regarda le feu, hésita un moment, puis continua :

— J'avais pas fini. J’ai du tuer un maraudeur, avant de pouvoir escalader. C’était lui ou moi… Il s’est dématérialisé et a sans doute donné l’alerte. Je pense qu’ils croient que je suis une espionne d’un autre clan maraudeur. Ils doivent sans doute considérer que toi aussi, maintenant.
— Je ne pense pas, mais ça compliquera le retour.
— On s'en sortira. On trouve toujours un moyen.

Eeri recommença à s'occuper de la viande qui séchait là, alors qu'Azazor reprenait doucement ses bougonnement.

— D’ailleurs... Tu as toujours ton cristal?

Edité 2 fois | Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#57 Multilingue 

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Journal d'Eeri
J’ai tout dit à Azazor. Plus de mensonges. De toute façon, je n’ai plus rien à lui cacher… Je n’ai plus grand chose en ma possession. Ils ont tout pris. Toutes les expériences que j’avais prévues, envolées. Plus de poison, afin de tester si la réaction des kitins ici est la même que dans les Nouvelles Terres. Plus de goo, plus de casque filtrant, et ce n’est pas ici que je vais réussir à en reconstituer. Plus de fioles vides, je ne pourrai pas non plus ramener d’échantillons sensibles… On oublie les poisons et sécrétions de kitins locaux, ou autres résidus que je pourrai trouver à Coriolis. De toute façon, j’aviserai… Il faudra bien du courage pour transporter quelque chose de plus, sans avoir de mektoub…
Un miracle que je puisse encore écrire, et que mes carnets de notes me soient revenus. Les maraudeurs les ont copiés, d'après Azazor. Au point ou on en est, tout aurait pu être pire.

Je n’ai même pas demandé à Azazor pourquoi il n’avait rien dit, rien fait, pour me sortir de cette situation de ramèch. Je lui dois bien ça. Il avait ses raisons, que je respecte. J'ai merdé. Je n’aurais peut-être pas du écouter Mazé’Yum, mais sans lui, sans ce cristal, j’aurais vraiment terminé dans le ventre d’un monstre des eaux de la grande flaque. J'aurais peut-être simplement dû lui en parler. Qui a raison, qui a tort… Nous faisons bien de laisser de coté ce qui a pourri nos relations depuis qu’Azazor a découvert ce flacon de poison, il y a si longtemps déjà.

Qui avait dit que passer en haut de la dorsale serait une partie de plaisir? Le chemin que nous avons emprunté pour arriver en haut a certes été façonné par des homins par le passé. Mais arrivés en haut, quasiment plus rien. Nous avançons comme nous pouvons, évitant les crevasses, parfois obligés de faire un détour de quelques kilomètres pour traverser. Et parfois, un escalier ou une échelle sont installées. Peut-être que tout simplement, nous perdons la trace du peu d'aménagements qui ont été réalisés, le chemin étant si peu emprunté. J'espère surtout qu'ils n'ont pas installé de Zinuakeen plus loin, dans la direction que nous prennons. Les maraudeurs pourraient simplement être en train de nous attendre, les armes à la main... Azazor semble avoir entendu dire que seul quelques rares chasseurs de dragons rouges et quelques Rangers s’aventurent encore dans cette direction... Ils ont sans doute autre chose à faire que de nous poursuivre. J'imagine que nous ne sommes pas si important à leurs yeux.

D’après les indications qu’Azazor a reçues, il nous reste quelques semaines de marche avant de pouvoir atteindre Coriolis. Nous marchons à l’affut du moindre gibier, de la moindre plante comestible. Quand nous serons à Coriolis, il nous faudra trouver le moyen de descendre de la dorsale, très prudemment. Éviter de tomber, et éviter de nous faire repérer par les kitins. Qui sait ce que nous trouverons... Peut-être rien, peut-être la réponse à tant de questions.
Si nous ne mourrons pas de faim d'ici là.

En contrebas, nous pouvons voir l’enfer qui a envahi le désert de nos ancêtres. Lorsque nous ne marchons pas, la vue que nous avons sur le mouvement des kitins est impressionnante. Mais plus nous nous éloignons de Citadelle, plus nous pouvons voir qu'ils ne couvrent pas la zone, loin de là. Ils se déplacent en groupe, des groupes bien plus fournis que ceux que nous pouvons voir dans nos Nouvelles Terres. Mais certaines zones semblent compter moins de kitins, voir aucun. Peut-être s’agit t-il de terrains sans gibier ou nourriture? De zones que les Kitins évitent pour d'autres raisons? Se déplacent-ils de zones en zones, en fonction des saisons? En fonction de la nourrirure qu'ils trouvent? Il me semble que malgré leurs mouvements de groupes distincts, certains troupeaux de kitins on tendance à se rapprocher de la dorsale pendant la journée, et de s'en éloigner le soir. Peut-être pour trouver la fraicheur? Nous verrons, mais il nous faudra peut-être descendre vers Coriolis de nuit. Le désert s'étend à perte de vue, et nous n'en apercevons qu'une petite partie, il nous faudrait quelques jours de plus à observer ces mêmes zones pour déterminer s'il s'agit des mêmes groupes, ou si de plus larges mouvements s'opèrent. D'ici, il est aussi relativement difficile de distinguer de quelles espèces il s'agit, ni de se faire une idée sur la taille de ces régions. Nous sommes si loin du sol, si près de la canopée, sans qu'elle ne soit accéssible. Voir le monde de si haut donne une sensation mêlée, entre victoire, vertige et angoisse infinie. Et plus nous avançons vers Coriolis, plus notre impatience se transforme en fébrilité.

Coriolis, la terre de nos ancêtres, là où, en creusant, ils ont réveillé l'essaim de Kitin. Ou Fyrak, peut-être... Peut-être bien l'endroit ou les Puissances cachent leurs plus terribles secrets.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#58 Multilingue 

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Journal d'Azazor
Après quatre ans de voyage depuis Silan, nous sommes enfin arrivé à Coriolis! Ou tout du moins là où aurait dû s’ériger la cité minière. Quatre ans pour en arriver là! Nous sommes des novices, clairement. Des novices, affaiblis par des générations à vivre sous la protections des Puissances, quand des homins, maraudeurs ou rangers, ont su faire sans et réussissent le trajet Silan-Citadelle en deux ou trois cycles.

Du haut de la dorsale, en regardant en bas, il n’y a rien. Pas de bâtiments, pas même de ruines reconnaissables. Tout semble avoir été balayé par les kitins. On peut les voir au loin émerger de différents trous au niveau du sol. Il s’agit peut être des anciennes mines d’ambres, depuis complètement colonisées par les kitins. Ceux-ci forment une nuée grouillante à première vue totalement anarchique. Pourtant, cette masse se sépare ensuite en deux. Une partie converge vers quelques part au sud-est, vers ce qui est d'après moi l'ancienne forêt matis, l’autre se dirige vers la Citadelle. On dirait vraiment que Coriolis est une sorte de point de départ des kitins.

Nous savons que nous sommes au niveau de Coriolis, car, hormis cet agglutinement de kitins plus dense qu'ailleurs dans le désert, on peut encore apercevoir quelques ruines à flanc de falaise, en hauteur. L’une d’elle me fait penser à ce qu’il reste d’une tour de guet, une autre à un morceau de façade à moitié écroulée. Mais la ruine la mieux conservée est celle dans laquelle nous nous trouvons. Il s’agit d’une sorte de temple plus ou moins troglodyte presque tout en haut de la dorsale. Seule sa façade émerge de la falaise, le reste du temple étant creusé dans l'écorce. Il nous a fallu descendre un peu avec les cordes pour y accéder. La position de cette ruine, très difficile d’accès pour les kitins depuis le bas ou le haut de la dorsale explique son relativement bon état de conservation.

Il s’agit très probablement d’un temple au regard des colonnes d'ambres qui décorent la façade d’entrée. Sur le tympan, lui aussi visiblement taillé dans de l'ambre pure et finement décoré, on peut encore y lire « talum glad èt », le savoir est une arme, ainsi qu’une gravure ressemblant à s’y méprendre au tatouage des Flammes de Coriolis. Difficile de dire la fonction qu'avait ce temple. Une bibliothèque? Je les imagineais plutôt à Fyre qu'à Coriolis. Un lieu de fabrication et de restauration des cubes d'ambres peut-être comme le suggère Eeri? Ce qui ne serait pas idiot, vu la proximité des mines d'ambres.

Concernant les accès, un escalier taillé dans la falaise permettait autrefois d'accéder au temple par le bas, mais celui-ci est désormais totalement inutilisable, ne subsistant que deci delà quelques morceaux, tout le reste étant écroulé. Il devait aussi y avoir d'autres batîments plus bas à flanc de falaise, accessibles par ce même escalier serpentant sur la paroi. En se penchant, on peut encore voir quelques restes de ces bâtiments de temps à autre.

A l’intérieur du temple, on y trouve une salle principale avec un toit à moitié effondré. Tout le fond de la salle est inaccessible à cause de l’effondrement du plafond qui forme un tas de gravas bouchant les possibles pièces du fond. Seules deux portes bien conservée, sur les côtés, sont encore accessibles. L’une à gauche, menant sur une pièce entièrement effondrée sur elle même, et une autre à droite, dans laquelle je me trouve. Au sol, quelques meubles tombant en poussières, des étagères vides taillées à même l’écorce, et les restes d’un feu de camp, laissant entendre que cette pièce a déjà été utilisée dans un passé par si lointain. Par qui ? Des marauds de passage comme ce fameux clan de chasseurs de dragons rouges dont faisait parti jadis le père de Titus ? Ou par des rangers en mission d’observation? Il faut dire que depuis l’unique fenêtre de la pièce, on a une vue imprenable sur le désert et sa marée grouillante de kitins.

Avec Eeri, nous avons décidé d’excaver le fond du hall principale, pour tenter d’accéder à d’hypothétiques pièces plus au fond. S’il reste encore quelques savoirs préservés en ces lieux, ce ne peut être que derrière l’éboulement. Il nous faudra bien plusieurs heures pour espérer se créer un passage vers ce qu’il peut y avoir derrière tout ce fatras.


......


Nous avons commencé à excaver l’arrière du hall mais nous prenons une pause pour réfléchir. Un truc nous intrigue. En retirant patiemment les gravas de bois, nous avons pu remarquer que certains n’étaient probablement pas la résultante d’un effondrement mais avaient été mis là volontairement. C’est en fait un endroit précis qui nous alerte. Comme si à cet emplacement, il y avait un tunnel déjà creusé dans l'éboulement originel et rebouché ensuite avec les moyens du bord. A croire que nous ne sommes pas les premiers à creuser pour se frayer un passage, mais que les derniers à l’avoir fait ont vite eu fait de reboucher par la suite. Ce rebouchage ne doit pas dater de très longtemps. Notre hypothèse est que derrière se trouve une galerie par où peuvent potentiellement sortir des kitins et que cela a été rebouché par des homins pour assurer une relative sécurité du lieu. Pourtant, même si ce n’est pas très prudent, nous devons voir ce qu’il y a de l’autre côté.

Je crois que pour la première fois de ma vie, j’aime creuser. J’ai l’impression d’être comme ces mineurs de Coriolis qui, s’enfonçant toujours plus profondément pour chercher le Grand Dragon, tombèrent les premiers sur les kitins. J’ai beau savoir ce que l’histoire a donné, je ne peux m’empêcher de ressentir cette excitation propre à ma race de fyros, celle d’avancer, toujours plus loin, toujours plus profondément, en quête de la Vérité. S’il y a des kitins derrière, alors tant pis. Je suis prêt à mourir, ici, sur nos terres, entouré de nos ancêtres. Car après tout, le courage demeure-t-il à jamais dans les souvenirs de nos ancêtres morts au combat, ou coule-t-il encore dans le coeur des patriotes ?

Edité 3 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#59 Multilingue 

Multilingue | [English] | Français
                
"Aza, look at this!"

Eeri completes the clearing of the sawdust covering a skull that is in pretty good condition. For several hours Azazor and Eeri have been meticulously clearing what looks more and more like a tunnel dug by who knows who. Homins? Kitins? It's impossible to say. The fact remains that the said tunnel has been refilled afterwards. The state of the backfill makes no doubt about it. The two Fyros did not try to clear the entire tunnel and limited themselves in digging a narrow one that only a single homin, lying down, wuld be able to cross. By dint of going back and forth, they dug for themselves a gallery of several meters long and eventually entered a kind of small cave lined with sawdust. The cavern ends in another tunnel, perfectly open as for it. This one must not be part of the temple, considering the walls which seem rather rough. Were this cave and tunnel already present when the temple was built by the Fyros Empire? Or were they built afterwards, the tunnel leading to who knows where? Unless this tunnel is just a kitin digging?

Before perhaps venturing further into the tunnel beyond the cave, the two Fyros set out to search the ground for anything important that might have been preserved under the sawdust. Very quickly, they managed to uncover there a piece of shield in advanced decomposition, here the blade of a retch without its handle or some finely cut balls of sap probably issued from a jewel. The few remains found so far suggest that a number of Fyros died here. The light of the torch they have planted in the ground brings out the remains of this battlefield, making the scene rather gloomy.

Azazor gets closer to the skeleton found by Eeri. So far, only its skull is clear of the soil. The remainder is still buried in the soft ground made of sawdust and debris of all kinds. Unlike Eeri, it is not the first time that he is confronted with a skeleton, he has already seen one during his anatomy classes at the Imperial Academy. However, it is the first time he touches one, and the contact of the bone under his fingers gives him a shiver that runs through his spine. Clearing his throat to refocus, Azazor begins to clear around the skeleton to free the rest of the body.

"What are you doing?"
"Doesn't it show? Digging."
"Do you want to see if he was bow-legged?"
"dey, I want to see if the rest of the body has been better preserved by the sawdust. Jewelry, boots, a semblance of clothing, anything. We found only crumbs for the moment.

Eeri shrugs her shoulders but nevertheless helps the Fyros in his task. Even if it disgusts her, she is also curious to know if the homin in question left something else than his old bones in his death. After a few minutes of searching around the skeleton, Azazor comes across a box closed by a latch. He proudly holds it up to Eeri, who opens wide astonished eyes. The Fyros smiles at her and hurries to open the box. Alas, nothing is inside. Azazor's discomfited face makes the Fyrossa smile. What was he hoping for after all? To find an amber cube ?

As this thought crossed her mind, her gaze caught a brief flash of light below where the box had been. The Fyros saw it too and dips his hand to grab the object before she does.
This time, no disappointment. The object that Azazor pulls out is cubic in shape, giving off a slight purplish glow.

"Coriolis ! can't help but let go of the Fyrossa."
"There is an inscription on it. Wait…"

The Fyros blows on it to expel the impurities then starts to read the inscription. His voice echoes in the cave.

"bavèchen coriolis fyrum…"
"Rumors about the fire of Coriolis!"
"ney! But given the condition of the cube, we won't be able to read it here. We'll have to reactivate it at least."
"Yep, it's missing a piece, too."

A corner of the cube is indeed missing. Seeing this, Azazor starts to search around the skeleton for the lost piece, when a noise is heard from the back of the tunnel.

"Aza, did you hear that?" Eeri bellows.
"Help me searching!" the Fyros yells while continuing to rummage frantically around the skeleton.

Another noise is made hear, closer this time. Eeri, with a sharp ear, recognizes the rapid movement of a kitin coming to meet them.

"Aza, there's a kitin turning up!"

The Fyros looks up at Eeri, looking peeved. A kincher's growl paints the terror on his face.

"ramèch! We scram!"

They both rush towards the gallery they have dug and, crawling as fast as they can, come out panting, covered with sawdust and completely panicked. Behind them, the kincher lets out another howl.

"He… he won't be able to pass, the gallery is too narrow and…

As if to make the Fyros lie, the kincher starts furiously scratching the gallery to enlarge it. Its strength is phenomenal, and soon it seems obvious that the beast will quickly cross over to the other side, where the two terrified Fyros await it. They have faced kitins before in the New Lands, but not here. The ones in the Old Lands are much tougher, they know. And most of all, if they fall, there will be no one to pick them up.
But soon their martial training takes over and they equip themselves with the weapons they had left in the small room to the right of the hall. Azazor equips himself with his shield and his hatchet, Eeri slip on Azazor's amplifiers, her pike being anyway ineffective against the kinchers and the Fyros having formally forbidden her to handle his two-handed axe. In any case, he is the tank, he has always been, always reluctant to take care of healings.

Ready to fight, the two Fyros face the gallery from which the kincher soon emerges and explodes the pile of fill that was blocking the tunnel. It is gigantic compared to those of the New Lands. Even bigger than a Gerder or a Daï-den. Its red color also clashes. Its mandibles slam violently against each other while it lets out an even more piercing howl than before.

As if to respond to the kincher's attempt at intimidation, Azazor bangs his shield with his hatchet.

"Come here, kitin! Here, there are still Fyros fighting!"

The fight that follows is particularly violent. More than once, the Fyros must painfully take the hits of the kincher on his shield while the Fyrossa provides support from behind. Fortunately, the kitin fights no differently than in the New Lands, and most of all, Eeri is there to provide healing and cast fire spells when the opportunity arises. After a tough fight, where the Fyros sees his hatchet shatter in the kincher's mandibles and is forced to let go of the shield to fight with the two-handed axe, the kitin finally collapses under a final fatal fire spell from Eeri. The two Fyros barely catch their breath when a tremor is felt in the temple. A thousand paws crackle from the back of the hall, where the kincher has appeared.

"There are others Aza! We have to get out of here!"
"ney! Back to the rope and then to the plateau!"

Running like crazy, they just managed to hang on to the rope when a multitude of kitins, mainly kirostas, come out of the tunnel and head towards the two Fyros. These don't hesitate and climb back up as fast as they can, while the kirostas stay below, unable to follow them in their climb.

Edité 4 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#60 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
— Pour une fois, c’est pas à cause de mes conneries, haleta Eeri. Tu as pu sauver le cube?
— ney, râla Azazor dans un souffle, en s’avachissant sur le dos pour reprendre son souffle.
— ramèch, espérons qu’il n’y ait pas de galerie aboutissant sur le plateau de la dorsale…

Eeri se redressa vivement et entreprit de remonter lentement la corde.

— Un tryker de plus avec nous, et ça aurait lâché, ricana-t-elle. On a eu de la chance. Mais je pense qu’on ne pourra pas s’en resservir.
— Une fyrette de moins et j’aurais terminé mon voyage ici.
— Dis pas de bêtises. On forme juste une bonne équipe, répondit Eeri. Quand on ne se fout pas des tartes, pensa-t-elle.

Eeri s’empressa d’escalader une petite butte, et observa les alentours, aux aguets.

— Faut pas traîner, Aza. Si les kitins ont un moyen de monter ici, ils vont pas tarder à se pointer...
— T'as raison. Traînons pas.

Azazor se redressa vivement. Il leur fallait s’éloigner du bord de la dorsale et progresser prudemment, à l’affut. La montagne comptait sans doute de nombreuses galeries, il pourrait suffire d’un accès pour qu’une horde de kirosta déboule à leurs trousses.

— C’était donc ça, Coriolis, annonça Azazor, de façon solennelle..
— Faut croire. Je ne savais pas trop à quoi m'attendre...
— Il ne reste plus rien, à part le peu qu’on a pu voir.
— Sinon, faudrait trouver un moyen de descendre plus bas.
— Tu y penses sérieusement?

Eeri s’arrêta, et regarda vers l’horizon.

— geniyùch, talorùch, didraùch… dey, odraùch.*
— Tu crois vraiment que c’est le moment de faire de la poésie, railla Azazor?
— Bah... On est arrivés jusque ici, et même si c’est pas aussi glorieux qu’on l’imaginait, il faudrait trouver le genre de citation qui pourrait rester dans la légende, tu vois…

Azazor haussa les épaules d’un air peu convaincu.

— La légende, ricana Azazor en reprenant sa marche. T’en fais une belle, de légende.
— T’as raison, ney, ça sonne pas si bien, continua-t-elle. Et puis y’a personne d’autre que nous, on pourra trouver un truc qui en jette un peu plus tard.

Eeri emboita le pas d’Azazor en lui tirant la langue.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: English translation by Nilstilar !

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#61 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Ils trouvèrent l’endroit idéal pour poser leur campement alors que la nuit était déjà tombée. C'était un grand morceau d’écorce, formant par chance une petite hutte. Eeri sortit ce qu’il restait de viande séchée et la posa entre Azazor et elle. Ils avaient marché des heures. Ils avaient eu raison de rester sur leurs gardes : quelques kirostas avaient bien trouvé le chemin du plateau, et semblaient patrouiller dans la zone, en groupe. Les fyros redoublèrent de prudence. À deux, ils n’auraient pas eu la moindre chance contre plusieurs kirostas, mais un groupe était plus facile à éviter que s’il s’agissait d’individus épars et indépendants. Il leur fallut cependant plusieurs heures pour contourner la zone et s’éloigner suffisamment.

Encore haletants, ils piochèrent dans la viande, morceau par morceau, mastiquant lentement. Moins il y a à manger, plus il faut faire croire à son corps que l’on mange. Eeri prit la parole en chuchotant, afin de rester aux aguets du moindre bruit aux alentours.

— Aucune idée d’où on est, dey?
— Plus ou moins à l'est de Coriolis. Il aurait fallut aller vers l’ouest, mais ces satanés kirostas…
— Je pense qu’on a bien fait de rester très à distance. Certains kirostas de chez nous nous sentent de très loin… Alors ici, qui sait.
— Je dis pas qu’on aurait dû s’en approcher.

Eeri avala un morceau en déglutissant bruyamment.

— De toute façon, l'est, c’est notre route.
— Qu’est-ce que tu racontes?

Eeri prit un autre morceau de viande et commença à la mastiquer. Elle alla pour recracher un morceau de couenne, mais se ravisa et mâcha de plus belle. La nourriture était rare. Azazor continua.

— On va vers l’Ouest, on trouve un moyen de descendre de cette fichue dorsale vers le désert de la route d’Oflovak.
— dey. On continue vers l'est, vers Fyre.
— MAIS T’ES COMPLÈTEMENT MALA…
— Mais chuuuut !! On a dit pas de bruit !

Azazor, se reprit en chuchotant d’une voix étranglée, les yeux exorbités

— T’es complètement malade… C’est au moins à trois mois de marche...
— Et alors, tu as déjà été si près que ça de Fyre, toi? Moi dey.
— Et puis, on a plus rien à bouffer!
— On trouvera.
— Eeri... On a un cube d'ambre qui semble parler de Coriolis! Je peux pas prendre le risque de le perdre. Et puis, y’a sans doute plus rien, comme ici.
— Je suis prête à prendre le risque. J’irai seule, si tu ne me suis pas.

Azazor ne répondit rien. Il savait bien que si Eeri avait une idée en tête, il serait difficile de la convaincre de changer d’avis.

— On en reparle quand il fera jour, grommela-t-il.
— Je vais monter la garde quelques heures, dors un peu, répondit Eeri.

Eeri, à l’affut du moindre bruit, sortit de l'écrin d'écorce dans lequel le fyros ronflait déjà. Dans l'obscurité, son regard se porta à l'est, toujours plus loin des Nouvelles Terres. Fyre, la terre de ses ancêtres, la ville dont le nom faisait vibrer les rêves des enfants de Pyr, quand elle était petite. Une ville si grande, si lointaine. Probablement détruite, entièrement ou en partie, maintenant. Elle s'adossa contre un petit buisson, posa sa pique en équilibre sur ses genoux et ferma ses yeux. C'était décidé, dès que les lueurs du jour allaient apparaître, elle allait partir pour Fyre. Avec ou sans Azazor.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: english Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#62 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
— Eeri !!!

Le fyros s’époumonait, mais continua d’avancer en haletant pendant quelques centaines de mètres, avant de hurler de nouveau :

— Eeri !!! Bougresse de saleté de tête de bois !!

Azazor s’arrêta un moment, pour reprendre son souffle. Voilà plusieurs journées qu’il suivait ses traces, et maintenant il avait cru l’apercevoir, au loin. Elle avançait vite, bien plus vite que quand ils étaient à deux.
Alors que la nuit tombait, il pensa à allumer un feu. La lumière dans la nuit pourrait prévenir la fyrette qu’il était à ses trousses, et elle l’attendrait sans doute, du moins espérait-il. En même temps, la lumière d’un feu pouvait attirer des prédateurs. Trop risqué, surtout en étant seul.

— Quelle idée de la laisser partir seule, bougonna t-il en se remettant en route. Il pouvait encore marcher au moins deux heures avant la tombée de la nuit, il ne fallait pas perdre de temps. Si seulement il avait pris plus tôt la décision de finalement partir lui aussi vers Fyre... Mais était-ce bien une bonne décision? Il avait un cube d'ambre, un cube qui récélait peut-être une grande vérité sur le feu de Coriolis. C'était irresponsable de prendre ce risque, il le savait. Mais il ne pouvait se résoudre à laisser seule Eeri découvrir Fyre. Et puis... c'était la mère d'Uzykos. Son fils. Ils étaient partis ensemble, ils reviendraient ensemble.

Azazor avança tant qu’il put voir où il posait ses pieds, de plus en plus prudemment à mesure que la nuit tombait. Lorsque l’obscurité fut presque totale, il avisa une anfractuosité dans la sciure et s’assit là, la hache à la main. Depuis qu’ils étaient partis, ils s’étaient habitués au même rituel à la tombée de la nuit lorsqu’ils avaient à se reposer ou s’arrêter dans un endroit inconnu et sans protection. S’assoir. Pendant un moment, silence total, les armes à la main, et se concentrer sur les sons, en essayant d’imaginer leur distance et position dans l’obscurité. Un bruit isolé n’était jamais mauvais signe, il pouvait toujours s’agir d’un craquement d’écorce. Des bruits de pas rapides, plus ou moins proche, étaient souvent signes de la faune aux alentour, en général des herbivores, comme eux, à l’affut de prédateurs. Ici, il y en avait peu, il fallait se concentrer sur de possibles prédateurs. En général, des pas feutrés sur l’écorce, s’approchant, ou décrivant un cercle autour d’eux. Si après de longues minutes, la zone restait silencieuse, ils pouvaient commencer à se détendre. Les prédateurs n’attendent jamais longtemps avant de signaler leur présence et d’attaquer.

Alors que tout semblait silencieux, il put enfin fermer ses yeux, exténué.


***


Il s’éveilla dans la même position à l’orée du jour et regarda autour de lui. Tout semblait différent de ce qu’il avait pu observer dans l’obscurité. Il n’avait pas cru s’endormir si près du précipice, et réalisait maintenant que seulement quelques mètres le séparaient du ravin. Il se leva, s’étira et regarda le spectacle du désert en contrebas, une nouvelle fois. Le désert de ses ancêtres, toujours grouillant de Kitins, une véritable armée retenue par cette montagne. L’essaim qu’il avait vécu dans les nouvelles terres n’était rien comparé à la quantité de Kitins qu’il pouvait voir ici, et la petite portion de désert qu'il pouvait voir d'ici lui faisait imaginer qu'il devait y avoir des millions d’entre eux rien que dans ce désert, si ce n’est plus. Sans doute un nombre qu’aucun fyros ne pourrait jamais s’imaginer.

Rapidement, il se remit en route en suivant le bord de la falaise, et après plusieurs heures de marche, il se posta sur une petite butte pour observer s’il pouvait retrouver une trace d’Eeri. Mais rien, elle était sans doute déjà loin, en avant. Il redescendit et reprit sa route, en réfléchissant à une meilleure façon de lui signaler sa présence. Si seulement il avait un feu d’artifice… Ou une corne de torbak, c’était possible de créer des sons prodigieusement bruyants en soufflant dedans. Mais rien de tout ça. Il avançait légèrement dans ses pensées, jusqu’à ce qu’il entende un grognement. Par réflexe, il attrapa sa hache et s’arrêta.

Un cuttler, en face de lui, le regardait de ses yeux affamés, une sorte de bave poussiéreuse aux lèvres. Sa couleur se confondait avec la sciure de la dorsale.

— ramèch, j’avais bien besoin de ça…

Il regarda autour de lui, sachant bien qu’un cuttler n’arrive jamais seul. Il devina un second, légèrement en retrait sur sa gauche, dans l’ombre. Deux? Trop facile. Il serra sa hache et se prépara à l’assaut. Attaquer le premier, et être prêt à parer les crocs de celui qui arriverait par derrière, si possible en lui décochant un coup de hache. Pourtant, son attention était troublée par quelque chose, une autre présence. Un troisième cuttler? Il n'était pas sûr. Le prédateur, en face de lui, ne l'avait pas encore attaqué, semblant lui aussi hésiter. C'est alors qu’un cri terrible se fit entendre. Eeri surgit du talus et s’élança sur l'animal, les dagues à la main.

— Gruuuuhhh !!
— Eeri !
— Gaffe au troisième !
— Quel troisième?

Un autre cuttler, qu’il n’avait pas vu, sauta en direction d’Azazor. Le fyros esquiva, et d’un grand coup de botte, envoya l’animal dans le ravin.

— Bien joué ! Un autre derrière, s’écria Eeri, toujours aux prises avec le premier.
— Mais qu’est-ce que tu fous là, je te croyais à des jours d’ici, répondit Azazor, envoyant un coup net de hache dans la mâchoire de son attaquant, lui explosant quelques dents.
— C’est à moi de te demander ça ! Je te pensais parti !

Après plusieurs coups de hache d’Azazor, le troisième cuttler finit par s'enfuir sur trois pates, halletant et dégoulinant de sang, tandis qu’Eeri achevait celui qu’elle maintenait au sol, d’une série de coups de dagues. Azazor haussa les épaules.

— À deux, c’est facile.
— ney. Donc tu m’accompagnes?
— ney. Tu croyais quand même pas que j'allais laisser la redécouverte de Fyre à une fyros à moitié tryker?
— A la bonne heure.
Pointant un cuttler au sol, elle ajouta:
— T’as déjà bouffé du cuttler?
— dey. Ça doit être dégueulasse mais s’il n’y a que ça, je vais pas refuser.

Le visage d’Eeri offrit à Azazor son habituel sourire de bouchère, et elle entreprit de couper les quatre membres de l’animal.

— Il faut bien marteler la viande avant de la griller, ça réduit l’acidité et c’est plus digeste. Puis si tu as le temps, tu la fais cuire lentement, c’est un peu plus tendre.
— Je sais que ça l'attendrit, mais l'acidité?
— Tu savais que les fraiders mangeaient parfois du tyrancha? Eh bien, ils savent aussi cuire le cuttler.
— Et du coup ils tapent dessus?
— ney, tu l'écrases et fais sortir le jus. C'est plus sec, mais ça t'évite une sacré débâcle.

Elle jeta une cuisse à Azazor.

— La tête et le torse, c’est vraiment pas mangeable. En plus celui-là n’est pas bien gros. En revanche, il faut trouver un endroit à l’abris du vent, on ne peut pas faire de feu ici.

Elle attacha les deux membres avant à son sac à l’aide d’un reste de cordelette, puis jeta la cuisse sur son épaule.

— En route. On trouve un endroit pour établir un camp et on cuisi…

Eeri fut interrompue par un grondement d’une puissance incroyable qui fit vibrer la montagne.

— J’sais que tu as faim, mais quand même…

Quelque chose approchait. Les deux fyros restèrent un moment interdits, immobiles et silencieux. Le grondement se fit de nouveau entendre, plus proche, tandis que l'air se chargea d'une tension inquiétante. Scrutant le bord de la falaise d'où venait le bruit, ils virent surgir une créature gigantesque, comme ils n'en avaient jamais vue.

— Mets tes amplis, hurla Azazor !!
— dey, TU mets des amplis. Cette fois c'est à moi de jouer, hurla à son tour Eeri, arrachant la hache des mains du fyros.
— Mais… !!
— Ma pique ne fera pas le poids !! Fais ce que je te dis !

Edité 2 fois | Dernière édition par Eeri (il y a 1 an).

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Eeri
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#63 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Eeri laissa tomber la viande qui pendait à son sac et vissa son casque sur sa tête. Ses mains se crispèrent sur la hache.

— Un dragon rouge ! gueula finalement Azazor.

L'homine se concentra, décidée à se battre, et observa le kitin afin de déceler la moindre faille dans sa carapace. Ce dernier était déjà à quelques mètres d’eux, et avait ralenti sa course, comme s’il voulait lui aussi observer et apprécier ses proies. Sa carapace était écarlate, vive et luisante. Chaque écaille semblait palpiter d'un feu brûlant, comme si les veines du kitin transportaient des braises en fusion. Ce dragon rouge était un énorme kipesta de plusieurs mètres de long, entouré d’un halo de fumée grise, semblant prêt à exploser. Sa carapace, bardée de crêtes d'épines acérées, reliait son crâne protubérant au bout de sa queue écailleuse. Quant à sa poche à pollen, elle était bien plus imposante que celle qu'un kipeskoo pouvait avoir, et suintait d'un liquide écarlate et fumant, bien différent du celui que les kipestas produisaient habituellement. Pour finir, le battement de ses six ailes faisait voler la sciure autour de lui, et générait un vrombissement assourdissant.

Obnubilée par l'allure de la créature, Eeri ne vit pas sa première attaque arriver. Le puissant coup de queue qu'elle reçut dans la poitrine la fit valser sur plusieurs mètres et l'envoya s'écraser droit sur une souche, qu'elle se prit en plein dans les reins. Le souffle coupé par le double impact, la Fyrette s'écroula dans la sciure, totalement sonnée. Elle ne s'était pas attendue à une telle vivacité. Ne perdant pas une seconde, Azazor lança un sort de soin en direction d'Eeri. Bien qu'il n'était pas un mage expert en magie curative, l'enchantement mis sur son amplificateur était de bonne qualité et faisait parfaitement son office. Enfin... Fallait-il encore qu'il n'épuise pas tous les cristaux de sève qu'il avait en réserve, sans quoi il ne serait plus capable d’utiliser l'enchantement de son amplificateur. Et malheureusement, le premier coup porté par le kipesta ayant mis KO Eeri, il se vit contraint de bien entamer son stock. Tournant autour du corps de son amie en envoyant des salves de soin, et en esquivant les attaques du kitin qui l'avait désormais repéré, il parvint finalement à la relever. Ce qu'il ne vit en revanche pas, c'est le bord de la falaise qui se rapprochait dangereusement de ses pieds...

— Par ici ! hurla Eeri, de nouveau debout.
— Rends-moi ma hache ! Tu soignes mieux que moi ! répliqua le Fyros.

Ignorant Azazor, la Fyrette fonça sur le kitin, qui lui tournait désormais le dos, et lui assena un puissant coup de hache, touchant l'une de ses ailes. La créature fit volte-face et riposta d'un coup de queue circulaire, qu'Eeri esquiva cette fois-ci. Voyant que le kipesta avait à peine bronché, elle comprit qu'il en faudrait bien plus pour venir à bout de cet ennemi. La blessure qu’elle venait de lui infliger était ridicule en comparaison de sa taille... Furieux, le monstre donna un troisième coup de queue en direction de l'homine, qui l'esquiva une seconde fois. En vérité, cela n'était pas chose facile : le monstre était si gros qu'il fallait largement anticiper son attaque pour espérer éviter le choc. Par ailleurs, chaque coup porté par la bête faisait voler la sciure, envoyant un nuage de poussière brouillant largement la vision des Fyros. Repérant l'aura incandescente du kitin dans le brouillard de poussière, Eeri s’élança de nouveau vers lui en hurlant, telle une furie, frappant où elle pouvait. Mais la hache ne fit que ricocher sur la carapace brûlante. Le kipesta tenta une nouvelle attaque avec sa queue et la Fyrette se baissa juste à temps pour sentir les pics acérés racler le dessus de son casque. Elle en profita alors pour exécuter une contre-attaque, que le kitin esquiva d'un battement d'aile en prenant de la hauteur. Se retournant brusquement malgré son immense masse, la bête effectua finalement une charge aérienne et réussit à percuter Eeri, qui valsa une seconde fois à plusieurs mètres. Désarmée et affalée dans la sciure, l'homine eut à peine le temps de comprendre que l'impact avait déboitée son épaule gauche que l'enchantement d'Azazor remit aussitôt l'articulation en place. Son camarade continuait inlassablement de tourner autour d'elle, attentif à soigner chacune de ses blessures. Ramassant sa hache et vérifiant d'un moulinet du bras l'efficacité de l'enchantement, Eeri fonça une nouvelle fois vers la créature. Le combat allait définitivement être long...

Et effectivement, le combat dura ainsi quelques minutes. Des minutes qui, dans ce genre de situations, étaient pareilles à des heures. Si le kitin réussissait la plupart du temps à blesser Eeri, rares furent les fois où la Fyrette put le toucher en retour. Sans les soins prodigués par Azazor, elle serait morte depuis longtemps... Et lorsqu'elle parvenait finalement à atteindre sa cible, la hache venait se fracasser sur l'épaisse carapace du kipesta. Pas une seule fois elle ne parvint de nouveau à toucher ses ailes, seule partie a priori plus vulnérable que les autres. Comme si la bête avait compris. Comme si elle avait compris qu'il lui suffisait de prendre un peu de hauteur pour éviter les coups les plus dangereux. Le kipesta était, en effet, capable de s'envoler très haut dans le ciel, hors de portée de toutes attaques. Quand il ne pouvait pas s'envoler assez rapidement, il lui suffisait de présenter sa tête de front pour parer le coup de hache qui venait alors buter sur l'épaisse carapace protectrice de son crâne. Pendant ce temps, Azazor vidait progressivement son stock de cristaux de sève en soignant Eeri à chaque fois qu'elle se retrouvait au sol. Il n'avait même pas eu le temps d'ôter son armure lourde pour tenter de lancer un quelconque sort de feu. À quelques moments, le monstre tenta de s'en prendre à Azazor. Lorsque que cela arriva, Eeri enfila sa propre paire d'amplificateurs, afin de soutenir son camarade le temps de réussir à attirer à nouveau l'attention du kitin. Et le manège se répéta.

Il se répéta jusqu'à ce que, soudainement, comme lassé par la tournure que prenait le combat, le kipesta fit tranquillement demi-tour, s'éloignant d'une dizaine de mètres. Déconcertée, Eeri baissa sa garde et jeta un coup d'œil à Azazor. Face à un tel adversaire, un match-nul avait valeur de victoire, non ? Si son camarade n'était pas casqué, la Fyrette aurait probablement pu lire l'horreur qui s'exprima sur son visage alors qu'il pointa ses amplificateurs en direction du kipesta. Mais il était déjà trop tard. La créature se raidit, fit pivoter ses six ailes, et se propulsa en marche arrière en direction d'Eeri. Jamais les deux Fyros n'avaient vu un kipesa opérer une telle manœuvre. Sans même qu'Eeri ne puisse réagir, la queue écailleuse et acérée transperça son ventre. Tel un fouet, le monstre n'eut alors qu'à faire claquer son extrémité abdominale sur le sol pour se débarrasser du corps de l'homine, qui roula dans la sciure telle une vulgaire poupée de chiffon. Son corps mutilé et désarticulé allait demander de nombreux soins avant d'être totalement réparé... Sa précieuse pique aussi, auparavant attachée sur son dos, et désormais brisée en deux dans la poussière.

Probablement conscient de sa réussite, le kitin délaissa Eeri et se retourna vers Azazor, qui tentait tant bien que mal de relever sa partenaire. La créature poussa un grondement terrifiant, mais n'agit pas, comme si elle jaugeait son adversaire. Profitant des quelques secondes qui lui étaient offertes, Azazor fonça vers Eeri, vidant ses amplificateurs de toute charge magique, épuisant tout son stock de cristaux. Cela ne suffit cependant pas à la relever. Elle était vivante, il le sentait. Mais en très mauvais état, quasiment inconsciente. N'abandonnant pas, il tenta de la soigner sans enchantement, en armure lourde, épuisant progressivement son endurance à manipuler la sève. Si le kipesta continuait à l'observer ainsi sans réagir, il aurait le temps de la relever. Il le devait. Et alors que la Fyrette commençait à peine à se remettre à genoux, le kitin la renvoya aussitôt au sol d'un coup de queue. Désemparé, Azazor accrocha sa paire d'amplificateurs à sa ceinture sans quitter la créature des yeux. Il jouait avec eux, il en était certain. Ce monstre jouait avec eux, et après avoir vaincu Eeri, il cherchait désormais à combattre Azazor seul à seul. Sans pouvoir confirmer son hypothèse, qui n'était peut-être que le fruit d'une projection fiévreuse, le Fyros accepta le duel. Quitte à mourir aujourd'hui, que ce soit une retch à la main que des amplificateurs !

De longues secondes s'écoulèrent, durant lesquels les deux guerriers se jaugèrent, puis Azazor passa finalement à l'action. D'un habile mouvement de pied, le Fyros ramassa la pique brisée d'Eeri et la lança en direction du kipesta, qui la para d'un énième coup de queue et fonça sur son adversaire. Le duel avait commencé. Jouant sa vie, Azazor évita la charge du kipesta d'une roulade et ramassa la hache qu’Eeri avait laissée échapper de ses mains. Puis, il s’élança également vers le kitin, hurlant comme une bête. Cet accès de courage n'impressionna pas le monstre, qui fit valser le Fyros par-dessus le précipice d'un coup de crâne en pleine poitrine. Plantant sa hache in extremis dans le rebord de la falaise, faisant fi de son souffle totalement coupé, Azazor réussit à éviter la chute mortelle. Il arrivait à peine à respirer, ses côtes étaient probablement brisées, et il n'était désormais plus capable de relever Eeri. Mais il n'était pas encore mort. Réussissant à se hisser sur le plateau, le Fyros leva sa hache et la fit tournoyer au dessus de lui, gueulant de toutes les forces qu'il lui restait. Un cri de guerre, peut être son dernier. Puisant dans ses dernières ressources pour régénérer son corps blessé, il chargea le dragon rouge. D'un saut, il évita la queue acérée, et à la suite d'une ultime roulade, il réussit à porter un coup de hache furieux sur le flanc de la créature, qui ne s'attendait probablement pas à voir le frêle homin prendre tant de risques. En récompense de sa bravoure, Azazor vit alors voler une écaille écarlate. La bête avait finalement un point faible.

— ORAK !!!!

Mais la joie fut de courte durée. Le kipesta poussa un hurlement ignoble, et au même moment, le Fyros crut voir des flammes palpiter en lieu et place de l'écaille qu'il avait réussi à arracher. Comprenant que quelque chose était en train de se préparer, Azazor décrocha le bouclier qu'il portait jusqu'alors sur son dos et vint se placer devant Eeri, gisante toujours sur le sol. À peine eut-il le temps de se positionner qu'il sentit la température augmenter. C'est en observant la créature une dernière fois qu'il comprit que son impression était fondée. Le kitin était en train d'enfler de part en part. Du bout de sa queue à son crâne. Mais cela n'était rien en comparaison de sa poche à pollen, qui venait de tripler de volume en à peine quelques secondes. D'un mouvement erratique, le monstre planta sa trompe dans le sol, et Azazor sut alors que c'était la fin. Une explosion gigantesque survint, brisant la portion de falaise sur laquelle ils combattaient, et libérant un flot de flammes si puissant qu'elles rasèrent tout sur une centaine de mètres. La dernière chose que sentit Azazor fut la chaleur.

Faisant fondre son bouclier.

Puis son armure.

Et enfin sa peau.

((HRP: texte écrit à 6 mains par Eeri, Azazor et Finaen))

Dernière édition par Azazor (il y a 1 an).

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#64 Multilingue 

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Azazor ouvre un œil. Un seul. Il se voit flotter, voler, comme la fumée d’un grand brasier. Il flotte au dessus du désert. Il voit la grande dorsale, le désert et même de l’eau plus loin, par delà une autre chaine de montagnes. La grande flaque peut-être.

Mort, il est mort. Il n’y a pas de doute. Son corps est tout en bas, carbonisé, réduit en cendre par le dragon rouge, et il flotte comme la fumée. Il lui faut pourtant lutter contre l’envie de se laisser porter.

gladuch odraèt og, didrauch fyrak gladuch, tels sont les mots des gey-zas morts au combat, tel est son devoir. Combattre la fumée qui élève pour redescendre dans les profondeurs afin d’y combattre le dragon. Alors il ferme son oeil et se concentre pour redescendre vers son dernier combat.



Dernière édition par Azazor (il y a 1 an).

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#65 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Eeri ouvre un œil. Peut-être les deux, qui sait. Tout est brouillé. Elle ne voit rien, ne sent rien, à part l’impression d’être posée sur une matière en même temps glaciale et brulante, vibrante d'énergie. La douleur et l’absence de douleur. Un long hurlement sans fin semble avoir pris possession de son esprit, un fracas strident résonnant sur les parois de son crâne. Un cri long et terrible enfermé en elle, effaçant toute notion de temps, de passé, de présent, de futur.

C’est donc ça, le vide? Le néant? La punition pour son âme et sa graine de vie, le châtiment pour les erreurs de sa vie passée, ses secrets, ses mensonges, ses fuites, ses abandons?

Un hurlement sans fin, assourdissant.

Une ombre émerge du chaos. Il y a des ombres, dans le néant? Une forme, plutôt, une silhouette, un casque. Le casque de l’épouvante. Le vacarme dans son esprit se fait plus intense et perçant, à mesure que la silhouette se rapproche. Des dagues glaciales viennent se planter dans ses orbites, ses tympans, sa gorge, son torse.

La douleur, dernière délivrance avant la mort.

Et soudain, le silence. Son esprit sombre dans le néant.

Dernière édition par Eeri (il y a 1 an). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#66 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Eeri jeta doucement dans le feu l’os qu’elle tenait en main, dernier vestige de la cuisse de yubo qu’elle venait de manger. Son interlocuteur se tut et la regarda, en silence, concient qu'il allait falloir lui laisser du temps pour qu'elle encaisse ce qu'il venait de lui dire.

— C’était donc ça, articula t-elle. Ils n’ont rien dit de plus?
— Ils ont dit qu’ils vous avaient cru morts. C’est déjà arrivé, et parfois, ils offrent une sépulture décente aux homins qu’ils trouvent, s’ils le peuvent. Ça t’étonne tant que ça?
— De leur part, oui, répondit Eeri. J’ai toujours cru qu’ils œuvraient contre l’hominité.
— Contre l'hominité ? Tu sais, ils ont besoin d'elle. Et malgré ce que laisse croire leur apparence, ils ne sont pas tous pareil. Certains ont à cœur de protéger chacun d'entre nous.
— ney, je vois. Et nous leur devons la vie. Ils nous ont sauvés et soignés... Un kamiste et une... agnostique.

Le ranger sourit doucement et observa l’homine installée en face d’elle. Cela faisait plusieurs semaines que leurs corps avaient été déposés dans son campement, et il avait pris la suite des choses. Les soins qu'il leur avait prodigués commençaient à porter leurs fruits. Eeri avait été la première à reprendre ses esprits la veille. Elle avait poussé un hurlement incroyable, et s'était tellement agitée qu'il fallut deux homins pour la maintenir le temps qu'elle retrouve la raison. Puis elle s'était plongée dans un silence mutique en voyant son ami, près d'elle. Le lendemain, elle s'était levée calmement pour venir le trouver, acceptant enfin un peu de nourriture. Il avait bon espoir pour l’autre fyros, même si ce dernier avait encore besoin de plusieurs jours de repos.

— Il semblerait que ton ami t'ait protégée des flammes. Il a été beaucoup plus brûlé et blessé que toi, mais il semble lentement récupérer. Ils l'ont retrouvé agrippé à toi, sans doute la raison pour laquelle tu as été moins atteinte par les flammes que lui.
— Il m’a protégée…
— Ils suspectaient que sa graine de vie avait été touchée. Ils ont dû extraire une énorme épine de bois qui traversait son crâne de part en part, et qui aurait dû le tuer. J'espère qu'il n'a pas totalement perdu l’esprit... En tout cas, sa survie est inespérée. Et la tienne aussi ! En vérité, c'est un miracle que vous soyez encore en vie. "Miracle", c'est le mot qu'ils ont employé. Tu imagines ?

Eeri resta silencieuse, le regard plongé dans le feu de camp. Sa faute. C’était sa faute. De nouveau. Prendre le chemin de Fyre, comme si après Coriolis il ne s’agirait que d’une promenade sans aucun danger. Puis elle baissa son regard sur sa main, posée immobile sur son genoux. Les brûlures y étaient encore vives, marquant sa paume et une partie de son avant-bras. Elle retourna son bras gauche, pour contempler la paume de son autre main, miraculeusement épargnée par les flammes.

— Ça ne reviendra pas, dey?
— Je ne pense pas. Tu étais dans un sale état, inconsciente, incapable de te régénérer. Ils ont passé un long moment à déblayer pour vous retrouver sous les décombres de la falaise en partie explosée, et passé un certain délai, certaines blessures deviennent intraitables...
— Ces marques sont donc imprégnées dans notre graine de vie…
— Oui. Et même leur technologie ne peut rien y faire. Comme je te l'ai déjà dit, c'est déjà un fichu miracle que vous ayez survécu.
— On resiste bien au feu, nous autres fyros, il paraît.
— Et à l'enfouissement sous des tonnes de gravas visiblement ! Au fait, comment va ton oeil?
— Toujours rien.

Eeri se leva lentement en s’appuyant sur son bras gauche, et fit quelques pas pour arriver à la tente qui abritait Azazor. Elle regarda le visage marqué de son ami, semblant dormir paisiblement sur un lit de camp. Une étoffe légère couvrait pudiquement son torse et ses jambes.

Elle sentit une larme couler.

Dernière édition par Eeri (il y a 1 an). | Raison: traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
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#67 Multilingue 

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Cela fait plusieurs heures qu’Azazor contemple le plafond de la tente où il est allongé. Plusieurs heures à observer la toile de peau légèrement craquelée par des années d’usure. Regarder les ombres danser au rythme du crépitement du brasero. Ecouter de vagues murmures lui parvenant du dehors. Des sons, des rires, où se mêlent la voix d’Eeri et d'autres homins.

— … ont l’habitude de les chasser avec leurs vaisseaux. Mais même eux font attention lorsqu’ils doivent les combattre. Les flamboyants sont intelligents. Ils savent se mettre à l’abri quand ils se savent traqués.
— Une intelligence individuelle ? Je croyais que les kitins n’avaient qu’une intelligence de groupe ?
— Pas tous a priori.
— Il s’est montré en effet particulièrement roublard au combat.
— Oui, et quand ils ne peuvent fuir, ils ont aussi leur terrible attaque de feu.
— J'étais probablement déjà à terre... Azazor a dû trouver son point faible pour qu'il attaque de la sorte.

La douleur de ses brûlures le fait décrocher de la conversation. Au début, il n’y avait que la douleur, comme un déchirure en continu irradiant tout son corps. Le noir, le silence, l’impression de flotter dans… une grande flaque de souffrance - la Grande Flaque - Eeri qui se fait avaler par le prakker. Eeri… Puis vint la sensation de son propre corps, l’impression d’être alité, d’avoir un haut et un bas. Puis les sons, des murmures, Eeri qui lui dit de se battre. Et maintenant, la vue. Ces ombres qui dansent.

Il n’est pas descendu dans les profondeurs combattre le dragon. Il a survécu. Et c’est à la Karavan qu’il le doit. N'en pouvant plus, il retombe dans ses songes angoissants.

...


De nombreux jours passent avant qu’Azazor ne puisse parler. Ses lèvres, qui s’étaient fondues l’une à l’autre sous la chaleur, ont fini par être séparées grâce aux soins apportés par les Rangers. Il peut maintenant marmonner quelques mots, en articulant péniblement. Il lui faudra des jours pour réapprendre à parler, et probablement autant pour remarcher. Mais au moins, il n’a pas perdu sa tête. Pourtant, des images lui parviennent, comme venues d’un rêve. Il se revoit encore flotter au dessus du désert. Les Rangers qui prennent soin de lui ont pu lui expliquer ce qu’il s’est passé.

On lui parle du repérage et de la mise à mort du flamboyant par un vaisseau de la Karavan lorsqu’il a utilisé son attaque de flamme et fait exploser une partie de la falaise - il se souvient d'ailleurs de cette conversation avec les Maraudeurs lors de sa dernière soirée avec eux, ils lui avaient dit que la Karavan traquait ce genre de kitin en priorité. On lui explique aussi le déblayage des décombres pendant plusieurs heures pour retrouver les corps des deux homins l’ayant combattu, le corps d'Azazor, toujours aggripant et protégeant celui d'Eeri, leur transport dans une sorte de nacelle et le choix fait de les ramener dans ce campement ranger de l’autre côté de la dorsale, malgré leur état, malgré le peu de chance de survie qu’ils avaient. Oui, la Karavan, ou du moins ces agents là, ont fait un choix qui ne leur était pourtant pas favorable : celui de sauver deux homins sans importance. Ainsi, la défense de l’hominité fait bien partie des valeurs de la Karavan.

Eeri vient d’entrer dans la tente. Elle a un sourire aux lèvres et une larme coule de son unique oeil, le deuxième étant caché par un bandeau. Une larme de culpabilité ? Peut être, mais il ne lui en veut pas.

— oren pyr mon gros ! Il paraît que tu peux enfin parler ?
— n..ney
— Ouais ben te force pas trop hein, je suis pas pressé de t’entendre de nouveau beugler !
— de… tal

La fyrette éclate de rire puis, contre toute attente, enlace d'un seul bras le fyros allongé qui grimace de douleur.

— ramèch, j’oubliai que t’étais sensible. Attend, je vais voir si je peux te ramener de cette crème miracle qu’ils t’appliquent depuis notre arrivée ici. Ça répare et ça calme la douleur.
— a...ke..p

Eeri soulève un pan de toile pour sortir de la tente puis tourne la tête vers son ami.

— C’est moi qui te remercie. Les Rangers m’ont dit que tu t'étais probablement placé devant moi, pour encaisser l’attaque de flamme. Sans toi, je serai morte.
— MM..m
— Garde tes forces, je reviens tout de suite.

Il aurait voulu lui dire « moi aussi » mais n’a pas pu. Il ferme les yeux et replonge dans ses rêveries.

...


Plusieurs semaines s'écoulent ainsi dans le campement ranger. Celui-ci est l'un des nombreux postes arrières rangers de la région. Il y en a d'autres, plus discrets, et parfois plus proches encore de la menace kitin, y compris en hauteur sur la dorsale. Le camp actuel est un lieu de passage également pour les maraudeurs et les tribus des alentours. Une sorte de lieu de paix, préservant sa neutralité dans les conflits entre tribus homins et clans maraudeurs. La Karavan l'a bien compris et y dépose parfois les homins blessés trouvés ci et là.

Pendant toutes ses semaines de repos, Eeri apprend à remplacer l'usage de son bras droit par le gauche. Il est clair qu'elle ne pourra plus combattre comme avant, d'autant plus avec un oeil en moins. Quant à Azazor, il réapprend à marcher et à parler, mais les progrès sont lents et difficiles. Par ailleurs, un éclat de bois avait traversé son crâne, abîmant probablement sa graine de vie. La Karavan, en les ramenant au camp, a parlé de "miracle". Ses chances de survie était nulles. Et pourtant, il était bel et bien vivant. Vivant mais durement blessé. La Karavan ne savait pas quelles seraient les conséquences d'une telle blessure, mais qu'il fallait s'attendre à des troubles. Pour l'instant, hormis une large zone devant son crâne où ses cheveux laissent place à une vilaine cicatrice, rien ne semble indiquer que sa graine de vie ait été touchée. La pire crainte était qu'Azazor perde la raison. Mais il parait pour l'instant avoir encore toute sa tête. Si les cheveux ont commencé à repousser à l'arrière de sa tête, malgré les brûlures, le devant sera à jamais dénué de cheveux, rendant son visage encore plus hideux avec ses plaques brûlées et ses cicatrices.

Les Rangers leur disent qu'ils devraient attendre encore avant de reprendre la route, qu'ils pourraient les accompagner, des expéditions rangers en direction de Fort-le-Phare et passant par la Halte d'Oflovak s'organisant régulièrement. Il s'agit principalement d'une rotation de Rangers, pour ne pas toujours laisser les mêmes au front. Le chemin du retour n'en serait que plus sûre et plus rapide pour eux. Azazor et Eeri s'empressent d'accepter. Leur état ne leur permettrait de toute façon pas de faire le chemin seuls.

Ainsi, les jours continuent de s'écouler lentement dans le camp, en attendant une futur expédition...

Edité 3 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 1 an).

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#68 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Il est assis avec ses amis au bar de Thesos. Les flammes d’un brasero éclairent leur visage souriant. Il y a évidemment les légionnaires, Naveruss, Wixarika tête collée sur l'épaule de Lylanea, Zuros et même Lopyrech, revenu d’entre les morts. Il y a aussi Jazzy et toute la bande des Drakani, les Talodis, les Rangers du Cercle du bois d’Almati et d’autres encore. Tous, ils sont là, ils écoutent le récit de leur voyage. Eeri est également à ses côtés, et Uzykos, leur fils, en tunique rouge et qui joue avec la masse de Naveruss. La shooki coule à flot et on entend les rires qui s’entendent jusqu’à la forteresse. Il parle, sans difficulté, sans besoin d’articuler. Ses blessures se sont résorbées comme par miracle et il n’a plus mal nulle part. Il en est à l’épisode avec le dragon rouge.

« Alors nous acceptâmes le combat. Nous combattîmes avec une fureur sauvage et rencontrâmes la mort incarnée avec toutes ses horreurs, sans reculer ni nous plaindre. Aucun de nous deux ne demanda à être épargné ni ne s’enfuit. Nous combattîmes aussi longtemps que nous pûmes nous tenir debout. Et quand la mort sous forme d’une pluie de feu s’abattit sur nous, nous l’accueillîmes avec le sourire des combattants fiers d’avoir su mourir dignement. Je compris alors, juste avant de perdre conscience, ce qu’akep signifiait réellement. akash depyr, la mort dans l’honneur. Et oui, je remerciais alors dans un dernier soupir ce dragon rouge de nous avoir si vaillamment résisté.»

Il marque une pause puis reprend.

« Et pourtant mes amis, nous sommes là, devant vous. Car la destinée n’en avait pas fini avec nous. Elle prit alors la forme de la Karavan, qui vint à notre secours et nous sauva tous les deux. Oui, la Karavan !

Est-ce que je regrette d’avoir été sauvé ? Non ! Moi qui pourtant ne porte pas la Karavan dans mon coeur, je dis merci à elle. Car si cette mort face au dragon rouge fut la plus belle qui m’eut été offerte, celle qui viendra un jour le sera encore plus. Mais pas encore ! Pas aujourd’hui ! Alors vivons mes amis, et levons nos verres à la vie ! Qu’elle soit la plus glorieuse de toute ! CAL I SELAK !»

Ils lèvent tous leur verre en criant le salut du légionnaire. De nombreux rires se font entendre. C’est Uzykos, il a réussi à lever la masse au dessus de sa tête. Il est fort ! Comme son père ! Les rires se font plus fort encore quand il tombe à la renverse et se met à pleurer. Un pleur… Presque un cri. Oui, un cri strident, qui monte et se fait de plus en plus fort. Un hurlement ! Et… et le visage de son fils qui se transforme. Qui… devient… vaporeux… comme vu derrière un écran de fumée. La fumée d’un grand brasier. Un souffle chaud… Un souffle de feu ! C’est un dragon face à lui ! SON dragon ! Et ce qu’il a pris pour des pleurs, c’est son cri. Un son roque et guttural qui le transperce. Une poche sous son gosier se met à gonfler, gonfler… Et le feu se met à jaillir sur son corps qui brûle, brûle comme une bûche ardente, et se consume.

Il se réveille en sursaut, assis sur son lit de camp. Il fait encore nuit. Il se touche le visage avec ses mains et sent les plaques encore vives de ses brûlures. Mais il ne brûle pas. C’est encore ce fichu rêve. Toujours le même. Demain, l'expédition de retour tant attendue partira. Le voyage sera douloureux avec son handicap, mais ce ne sera probablement rien en comparaison de l'aller. Son corps le lance de toute part. Il a l’impression d’être dans un corps trop petit. Ça le tire de partout. La crème qu’il s’applique plusieurs fois par jour lui fait du bien, mais elle ne suffit pas à lui enlever cette sensation de sécheresse et de tiraillement sur la peau. Et bien sûr, les douleurs. Surtout quand il ne s’hydrate pas assez.

Assis dans son lit de camp, il repense à la soirée survenue il y a quelques jours, celle passée avec un groupe de nomades des Atakorum venu au campement pour du commerce de potions. Il a d’ailleurs eu à cette occasion une nouvelle révélation. Une de plus certes, mais le concernant spécifiquement cette fois-ci. En donnant son nom d’Azazor aux nomades, ceux-ci ont été interloqués. D’après leur culte, une forme de kamisme qui ne dit pas son nom, Azaz est le nom donné aux esprits du désert que seuls certains sages de leur tribu peuvent voir. Ce qui aurait pu n’être qu’une simple coïncidence s’est révélée plus profond que ça quand il a donné son nom de famille : Eridlo Mirihus. L’un des nomades lui a alors expliqué que Miri est un nom très courant chez eux. Peut être qu’un de ses ancêtres faisait partie des quelques Atakorum parvenus à fuir lors du premier essaim et ayant rejoins les Nouvelles Terres, tandis que la plupart s’étaient contentés de s’installer de l’autre côté de la grande dorsale. En y réfléchissant, ce n’est pas absurde. Mirihus signifie troisième de la lignée de Miri et son père lui avait expliqué que sa mère était issue d’une famille de nomade. Alors après tout, pourquoi pas ? De toute façon, on a tous un descendant des Anciennes Terres. D’un peuple de nomades très porté sur les potions et les rites étranges, cela ne l’étonne guère. Il est lui même une étrangeté parmi les siens. Encore plus maintenant avec son visage et son corps boursouflés.

Azaz, les esprits protecteurs du désert... Oui, les Kamis sont peut être aussi pour quelque chose dans leur survie miraculeuse. Là était peut-être la réponse au "miracle" dont parlait la Karavan ? Trop de questions sans réponses. Trop à réfléchir pour le moment. Azazor repose sa tête sur son lit de camp et essaie de dormir encore un peu avant demain.

Puis vient le départ tant attendu. Après des années de voyage sur la route d'Oflovak jusqu'au confin de Coriolis, après avoir survécu à milles dangers et vécu ce que peu d'homins des Nouvelles Terres peuvent se targuer d'avoir vécu, nos deux aventuriers prennent le chemin du retour, blessés et meurtris dans leur corps, leurs convictions chamboulées ou parfois renforcées, mais surtout fiers d'avoir su aller au bout de leurs idéaux. En tournant une dernière fois leur regard vers l'est, la mélancolie les rattrape, une pointe d'amertume de n'avoir pas pu aller jusqu'à Fyre et au delà. Mais ils ont tant à raconter, tant à partager. Azazor prend dans sa poche le cube d'ambre brisé qu'il a su protéger des flammes, la seule preuve qu'il lui reste. Il le montre à Eeri qui lui sourit. Oui, ils ont tant à raconter, mais aussi à offrir. Et c'est donc avec le sourire qu'ils se retournent vers l'ouest, là où les attendent les leurs.

Edité 3 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 1 an).

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