ROLEPLAY


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#25 Multilingue 

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Journal de bord d'Eeri
Folially 24, 3rd AC 2619

Les choses commencent à se préciser quant à notre départ. Le temps de nous préparer, nous repartons dans deux jours. On sera de nouveau accompagnés, mais cette fois pas par Kickan. Lui repart dès demain vers le Fort, avec un autre équipier et des marchandises.

Celui qui nous accompagnera, c’est Titus. Un fyros, qui parait jeune, mais semble avoir l'énergie d'un celiakos grabataire. J'exagère. Il est juste jeune, en fait. C'est apparemment aussi dû à l'altitude, ici tout le monde semble un peu plus lent qu'ailleurs. Moi-même, je me sens faible. Je vois bien que Ru-Dun mâche son fourrage plus lentement que d'habitude, aussi. Azazor semble vouté comme après 3 fioles d'ocyx. Comme si tout tournait légèrement au ralenti.
Ce Titus, donc. Depuis que nous sommes arrivés, il nous a suivi, nous a regardés avec de grands yeux, puis nous a posé des questions. Puis il nous a demandé de nous accompagner. Il veut quitter l'île, partir, trouver les maraudeurs. Il parait que son père en était un, sauf qu'il ne l'a jamais connu, il a grandi sur l'île. À force, Azazor a finit par céder à sa demande avec un "Bon. Mais pas de blague, hein?". Emmener un fils de Maraudeur, la belle affaire. Je me suis opposée à ça. Azazor pense sans doute que ça jouera en notre faveur. Et si le père les avait trahi? Bon, ça doit faire un sacré bout de temps, ils auront oublié. Il semble surtout trop inexpérimenté pour un tel voyage. Tu sais au moins tenir une épée par le bon bout, j'ai demandé? Soit disant, il s'entraîne tous les jours, il nous a dit. Je n'ai pas voulu être trop dure avec lui, mais je ne pense pas qu'il se soit déjà confronté un kirosta, ou quoi que ce soit de cette taille.

Et il a demandé pourquoi on voyageait, si nous aussi nous allions rejoindre les maraudeurs.
Je n'ai rien répondu de plus que "voyage scientifique", en sortant tout naturellement ma hache afin de refaire l'affûtage de la lame. Je n'aime pas ça, mais c'est vrai qu'arriver à notre prochaine destination avec un homin de la Halte pourrait être un bon point pour nous. Tenez, une recrue toute fraiche, faites en ce que vous voulez. Ou pas, qui sait. Il faudra que l'on s'adapte très vite à l'accueil qu'ils nous feront.

Donc c'est décidé, il fera le voyage avec nous jusqu'à l’Avant-Poste Diplomatique de la Falaise Nuageuse. Discrètement j'ai demandé à Kickan s'il le connaissait, si on pouvait avoir confiance. Ici, m'a t-il dit, personne n'a de raison de vouloir notre perte, tant que l'on ne provoque pas de catastrophe. J'ai compris ça en buvant un baba avec lui et le matis. En passant, le baba est légèrement meilleur ici qu'au Phare, mais ça reste quand même plus fadasse et insipide que la plus légère des byrh.

Ils nous ont raconté tout un tas de choses sur la Halte. Les habitants ici sont des descendants des Rangers d'Atys, qui se sont installés ici. Au début, il y a maintenant plusieurs générations. Afin de guider les réfugiés, leur offrir une pause sur le chemin des Nouvelles Terres. Ça on le savait. Beaucoup sont partis, mais certains ont fait le choix de s'installer, et la Halte s'est rapidement transformée en une petite ville. Ils ne manquent de rien, ici, m'explique Coccio, le matis. Peu de prédateurs, quelques Javing au nord, tout au plus, assez de gibier, une forêt assez généreuse, un lac. Les homins chassent l'Armadaï, aussi. C'est donc ça, les os et cuirs qui servent à construire les maisons. Azazor a demandé comment, et s'il pouvait assister à une chasse, mais la prochaine n'aura lieu que dans un bon mois. Il y a un grand trou, un piège, quelque part au sud-est de l'île. Des homins imitent le cri de l'animal, ou de son prédateur, et l'attirent vers le piège. Quand ils arrivent à le faire tomber, il est achevé à la pique par les chasseurs, puis dépecé sur place. Il ne pourra de toute façon pas ressortir du piège en un seul morceau. La chasse de l'Armadaï nécessite de nombreux homins, et donne en parfois lieu à une grande fête. Sa viande est très fortifiante et revigorante, la principale source d'énergie pour eux. Coccio nous a d'ailleurs offert deux grands sacs remplis de cette viande séchée, pour la suite de notre voyage.

Plus personne n'est véritablement ranger ici, ou ne fait partie de la guilde, maintenant. L'un des seul qui pourrait prétendre à les rejoindre, c'est Kickan, comme quelques autres de son tempérament. Mais il est satisfait de son travail entre le Fort et la Halte. Et comme il nous disait : s'il ne le faisait pas, qui s'en occuperait? Les véritables rangers passent régulièrement par ici, et sont admirés et accueillis comme des héros, tant la vie à l'extérieur de l'île est rude. Mais si beaucoup de jeunes rêvent de les rejoindre, peu le font. Comme dit le matis, quand on naît ici, la vie est tellement tranqulle, nous n'avons pas besoin de partir courir le monde... Kickan a blagué quelque chose du genre : "Coccio, tu dis ça à deux fyros qui viennent de traverser la moitié de la route d'oflovak, tu crois quoi, que tu vas les convaincre de s'installer ici?"
Le cas de Titus est assez rare, ainsi. Ça s'est déclenché lorsqu'enfant, il a appris que son père était un ancien maraudeur. L'homin en question était d'ailleurs mort lors d'une chasse à l'Armadaï, en glissant et tombant dans le piège. L'animal, paniqué, l'a écrasé d'un coup de patte, accident rare mais fatal.

Mais alors, on a demandé : Sur l'Île, ni rangers, ni maraudeurs, comment peuvent-ils rester aussi désinvoltes? Les Maraudeurs, dans les Nouvelles Terres, sont en guerre contre les nations. Que feraient-ils si les Maraudeurs d'ici venaient envahir l'île ? De ce que j'ai compris dans les explications de Coccio, ça n'aurait aucun intérêt, pour personne. Les maraudeurs sont aussi bien accueillis que n'importe quel homin, par fidélité à la tradition Ranger. Les capacités physiques sont moindres, pour ceux qui n'y sont pas nés, ce qui fait que ces derniers ne restent pas bien longtemps, ils se sentent trop faible. Tout comme pour nous. Et puis, il n'y a rien à combattre ici : pas de Kitins, pas de puissances, pas ne nation, et une organisation populaire. Le travail du Conseil de l'Île est de veiller aux respects de ces traditions, et d'administrer la ville en concertation avec tous. Coccio est élu avec 5 autres pour quelques années de Jena, il laissera sa place, dans deux années. Peut-être à Kickan, a-t'il sourit. Il ferait du bon travail. Ce à quoi Kickan a répondu sarcastiquement qu'il n'était pas assez vieux, comme lui, pour une telle tâche. "Le conseil? Un truc de grabataires". Pas autant que chez nous dans le désert, j'ai ajouté.
Nous savons calmer les fauteurs de trouble, pour en revenir aux maraudeurs, me dit Coccio. En général ils se comportent bien. Il est même arrivé par le passé que certains s'installent sur l'île, ce qui est très mal vu chez eux. Tout comme nous, on sera très mal accueillis, nous prévient-il. Le fait que nous partions avec un homin d'ici aidera peut-être, et si l'on amène quelques marchandises, aussi.

Outre leur bienveillance, Azazor et moi avons cru voir une sorte d'insouciance face aux problèmes du monde, et surtout, étions stupéfaits par ce manque de curiosité, cette absence totale de la soif de savoir qui nous habite. Nous nous sommes regardés, et n'avons rien dit. Comme si pour la première fois depuis pas mal de temps, nous nous comprenions.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: NOTE : Traduction en Anglais par Nilstilar ! English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#26 Multilingue 

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Journal de Titus
Aujourd’hui, deux étrangers sont arrivés de l’ouest. Ils accompagnaient notre cher Kickan. Je les ai pas encore vu, mais Tikra dit que ce sont deux fyros venus d’au-delà des contrées verdoyantes. Plus loin que Fort-le-Phare. Plus loin que chez Kickan. Je dis que Tikra raconte encore n’importe quoi. Depuis qu’elle travaille à la passerelle ouest, elle me raconte que des conneries. La dernière fois, elle avait vu un armadaï plus gros que les autres écraser un yetin sous son poids. Si c’était pas ma grande sœur, je la haïrai. Demain, j’irai voir les deux étrangers, et on verra si c’est encore des krakras de Tikra.


J’y crois pas, les deux fyros viennent bien d’un endroit très à l’ouest de la Halte. Par de là l’horizon, il existe des terres où les homins ont bâti d’immenses cités. Le fyros a parlé d’un empire avec un type à sa tête qui a plus d’un siècle. Ça a fait rigoler la fyrette qui l’accompagne. Mais le plus incroyable, c’est que ces deux homins vont vers l’est, en direction de la Citadelle. Du coup je leur ai parlé de mon père, qui était un ancien maraudeur venu prendre sa retraite ici. Ils ont trouvé ça intéressant puisqu’ils m’ont tout de suite posé des questions sur comment c’est là-bas, et où était mon père. J’ai bien vu la déception sur leur visage quand je leur ai dit que mon père était mort deux ans après ma naissance et que je connaissais rien de là-bas. Mais moi, j’ai plein de questions à leur poser. Des étrangers venus d’aussi loin, ça a forcément des tas de choses à raconter, sûrement plus intéressantes en tout cas que les conneries de Tikra et ses armadaïs géants.


Le fyros s’appelle Azazor. Il m’a dit qu’il était une sorte de chercheur de dragon. Du coup, je lui ai montré le dessin du tatouage qu’avait mon père, celui avec le monstre volant cracheur de feu qui s’appelle dragon rouge d’après les vieux du Conseil. Mon père, c’était un chasseur de dragon lui aussi. J’ai bien vu que ça a plu à Azazor. Il a d'ailleurs un tatouage de dragon sur le visage lui. Mais c'est pas le même. Ouais que je lui ai dit, mon père maraudeur était un vrai tueur de dragons. J’aimerai tant être comme lui. Mais faudrait que je quitte ce trou. Parait qu’en dehors de la Halte, c’est trop dangereux. Mais je m’en fous moi du danger ! Je suis fils de maraudeurs ! Fils de chasseur de dragon ! Qu’est-ce que ça peut me faire des yetins ou des armadaïs ?


JE VAIS QUITTER LA HALTE !!!! Après 3 jours à leur tanner les fesses, ils ont fini par céder. Je partirai donc avec eux, direction la Citadelle ! Azazor m’a montré la carte de la route qu’ils suivent depuis tout ce temps. Ça passe d’abord par l’Avant-Poste de la Falaise Nuageuse. Ils me laisseront là-bas et je devrais me débrouiller ensuite tout seul pour continuer. Azazor m’a dit qu’il aimerait bien que je continue avec eux jusqu’à la Citadelle, mais Eeri, la fyrette, ne préfère pas. Parait qu’elle a pas confiance. Azazor m’a rassuré en me disant que la confiance, je la gagnerai en chemin et qu’Eeri changera peut-être d’avis une fois qu’on sera arrivé à l’Avant-Poste. 
Maman, si tu reviens un jour de la Grande Flaque, je te laisserai mon journal intime, pour que tu saches que je t’aime. Mais mon destin m’attend, loin à l’est, chez les maraudeurs. Je veux vivre comme papa.


Le grand départ arrive. J’ai fini de charger Polly avec ma viande séchée. Mes deux nouveaux compagnons l’ont goûté et ont adoré. C’est des bouchers chez eux, entre autre métier qu’ils exercent. Ma viande doit donc être exceptionnelle. Je vais t’ouvrir un marché à l’avant-poste de la falaise, ça va être la folie !
Allez, qu’est-ce que je peux écrire comme phrase ultime sur mon journal ? Un truc qui en jette. Je sais, la phrase que m’a dit Azazor quand Eeri a dit que ce serait trop dur pour moi de les accompagner.
Ne souhaite pas que ce soit plus facile, souhaite que tu n’en sois que meilleur. 
Ouais, je sais que je vais en baver. Mais quand j’arriverai à la Citadelle, je serai un autre homin. Fort et fier, comme mon père !


Neuf jours se sont écoulés après leur départ de la Halte d’Oflovak. Dans la plaine désolée et recouverte de brouillard, Azazor est en tête du cortège, recht à la main. Suivent Titus, tirant son mektoub Polly chargé de viande séchée, puis Eeri, fermant la marche avec son mektoub Ru-Dun, une hachette dans l'autre main. 

Soudain, un grognement se fait entendre. Comme un reniflement puissant. Avant même que Titus comprenne ce qu’il se passe, Eeri lâche son mektoub et sort son bouclier, se plaçant derrière lui pour le protéger. Azazor se rapproche d’eux et se met devant Titus. Le groupe, faisant bloc, a une vision panoramique de la région. Pourtant, rien ne bouge à l’horizon. Le brouillard empêche de voir à 20 mètres. On entend cependant comme une galopade venant droit vers Eeri, suivi d’un nouveau grognement. On voit alors surgir du brouillard un immense yetin haut comme un homin. Il bondit sur Eeri qui pare avec son bouclier et l’envoie valser par-dessus elle. Le yetin tombe sur le dos d'Azazor qui n’a pas eu le temps de se retourner. La bête, à peine sonnée, va planter ses crocs dans le dos du fyros quand Titus, n’écoutant que son courage, s’enfuit en hurlant. Le yetin a un moment d’hésitation en voyant le jeune homin s’enfuir, instant qu’Azazor saisit pour se retourner sur le ventre et donner un coup de hache dans la gueule du monstre. Celui-ci recule en grognant et charge Titus. Il lui bondit dessus les deux pattes en avant et plante ses griffes acérées dans son dos. Le jeune homin s’écroule en hurlant de douleur. Son cri est de courte durée, car le yetin ne perd pas de temps et arrache sa tête d’un coup de mâchoire qu'il envoie valser au loin. Celle-ci roule sur quelques mètres avant de s'immobiliser, le visage déformé par la peur et le regard tendu vers les deux survivants. Le yetin tourne alors sa gueule vers les deux autres fyros qui se sont remis sur leurs jambes et s’apprêtent à en découdre. Mais le yetin s’en délaisse aussitôt et attrape le corps décapité de Titus dans sa gueule qu’il emmène dans le brouillard, vers l’ouest. Ne demandant pas leur reste, Azazor et Eeri en profitent pour s’enfuir, chacun prenant les rênes d’un mektoub et hâtant le pas vers l’est. Ils jettent un dernier coup d'oeil sur la tête de Titus, qui continue de les fixer de ses yeux épouvantés. 

Ainsi vécu Titus, fils d’un ancien maraudeur du Clan des Chasseurs de Dragons et d’une homine partie pour on ne sait quelle raison en quête de la Grande Flaque. Telle est la vie en ces terres reculées. Cruelle, dévorant les faibles et leur destin, dévorant même leur propre passé. Toi qui oseras peut-être t’aventurer là-bas, n’oublies jamais d’écrire ton histoire si tu ne veux pas être dévoré.

Edité 4 fois | Dernière édition par Fyrenor (il y a 2 ans).

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biographie

#27 Multilingue 

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Journal de bord d'Eeri
Germinally ..., 4th AC 2619

Je lui avais dit de mettre un casque.
Si seulement. La bête aurait arraché le casque, et sa tête serait encore sur ses épaules. Qui sait.
Mais dey, j’ai chaud sous mon casque, ça me démange, il a dit.

Cela fait cinq jours que nous marchons, Azazor et moi, sans dire un mot, sans même presque rien avaler. J’ai l’impression de voir les yeux de ce Titus en face de moi, dans la brume. Ses yeux exorbités de terreur sur sa tête sans corps, un flot de sang imbibant sa bouche encore ouverte.
Et dire, j’en ai vues, des choses dégueulasses. Des scènes de torture, des morts atroces, des membres voler. Tiens, quand j’étais jeune légionnaire, la fois où Icus avait tranché le bras d’une matisse, avant de lui ouvrir les veines du cou une à une. Le sang avait giclé sur mon armure, et on lui avait dit de ne pas revenir. On a rigolé. Et évidemment, elle est revenue. On a recommencé jusqu’à ce qu’elle ne revienne plus.

Si seulement on pouvait arriver à la falaise nuageuse, et voir un Titus tout frais, ramené par je ne sais quelle puissance… Peut-être par les maraudeurs ? Mais ça me semble peu probable qu’il ait un cristal, et quand bien même il aurait celui de son père, que celui-ci soit actif.

Sur le moment, je n’ai pas eu le temps d’enfiler mes amplificateurs et d’essayer de le soigner. La bête était déjà loin, emportant son corps. Je sais maintenant que ça aurait été vain. Aucune magie de soin, même la plus puissante qu’il soit, ne peut recoller une tête sur un corps, autrement qu’en passant entre les mains des puissances. Nous avons donc fui, emportant les mektoubs, et laissant sa tête là où elle était tombée. Si Jena ou Ma'Duk l'avaient rappelé à eux, son visage terrorisé aurait déjà disparu en poussière fine, dégageant cette lueur bleutée.

J’ai peur. Nous avons peur. Mais il faut avancer. On ne le reverra plus. Mis à part dans ma propre folie, ses yeux dans la brume, et ma propre voix qui ressasse dans ma tête : "‘si tu tombes ici, tu ne reviendras pas.".

D’après nos estimations sur la carte, l’avant poste devrait encore être à cinq ou six jours de marche. Jamais je ne me suis autant réjouie de rencontrer des maraudeurs.


Eeri et Azazor s'attendent d'un moment à l'autre à apercevoir les lumières de l'avant poste au loin.

- Bon, on leur parle de Titus, aux maraudeurs, ou pas, demande Azazor.
- Qu'est-ce qu'ils vont en avoir à faire? Ils le connaissent pas. Au mieux ils se rappelleront du père. Et pas forcément en bien.
- C'est vrai. Sans lui, c'est nous qu'ils vont avoir envie de lyncher, s'ils s'en souviennent comme d'un traitre.
- En même temps, vu leur espérance de vie ici, ceux qui s'en souviennent sont sans doute grabataires.
- Je sais quoi leur dire, de toute façon.
- Et tu comptes m'en parler quand?
- Fais moi confiance, ça te changera.

La fyrette s'arrête :

- Confiance ? Mais ce n'est pas une question de confiance, mon pauvre fyros. On a dépassé ce stade. Bien sur que je te fais confiance, je ne me serais pas mise dans cette bouse de situation avec toi, sinon.
- Bon, alors, tu me laisses parler.
- dey. On ne fait pas comme ça. Nous devons avoir la même ligne de conduite. Plus de cachoteries.
- C'est toi qui dis ça, après avoir ramené du matos dangereux sans rien me dire ?
- ça va, on va pas recommencer. T'es rancunier ou quoi ?
- Tu viens de le découvrir ?
- Je veux bien comprendre que tu sois devenu parano avec moi, mais justement, là je te propose de parler, de dire les choses.
- Mouef...
- C'est une question de stratégie. Si tu leur dis quelque chose, puis que j'affirme le contraire juste après, on aura l'air de deux gnoofs... déjà qu'on pue comme des yelks...

Azazor s'arrête, reste un instant pensif, puis renifle autour de lui

- Je ne vois pas le problème.
- Il n'y a pas de problème. Juste une chose à faire : s'asseoir et parler. Tu me dis ce que tu comptes faire, et je te dis quel est mon plan. Puis on...
- Peut-être que je ne veux pas entendre parler de ton plan ?
- Il le faut. Il y a trop de choses dont tu ne veux entendre parler. Je fais partie de ce voyage. Nous passons ensemble, ou nous crevons. Ensemble.
- Mais je le connais ton plan. On arrive, tu leurs colles une bombe à goo en pleine tronche, et on passe. Mais on ne fera pas comme ça.

Eeri a un petit rire pendant qu'Azazor termine de grommeler quelque chose

- La bombe à goo, c'est le dernier plan. Quand tous les autres ont foiré.
- Excellent. Alors je te ferai signe à ce moment.
- Azazor... Je déconne pas. Tu ne veux pas finir comme Titus. Pas maintenant. Et moi non plus.
- Hrmf...
- Alors on s'assoit, on parle, et on définit ce que l'on fera et dira. Si ça tourne mal, on définit un second plan, et ainsi de suite.
- Tu ne me fais donc pas confiance.

Eeri réfléchit un moment, et soupire.

- Mais si !! Mais imagine, je dis une touberie de trop... Autant que je sache à quoi m'en tenir... Et que je ne sois pas surprise par ce que tu vas leur dire.

Azazor grogne un moment :

- Bon, dès qu'on peut, on s'arrête, et on cause. Si tu y tiens.
- J'y tiens. Nous sommes une équipe, rappelle toi.
- ney... une équipe...


Quelques kilomètres plus loin, les deux fyros trouvent un endroit un peu abrité et caché, pas loin d'une balise et dans le creux d'une petite butte. Ils décident de rester là pour la nuit et mâchonnent chacun un morceau de viande d'armadaï, nourriture énergétique, la seule qui permet de garder un tant soit peu d'énergie et d'entendement dans cet endroit.

- Je commence, ou tu commences ?
- À quoi?
- Plan A, plan B, plan C...
- T'en as tant que ça ?
- Jusqu'au plan goo.
- Alors je vais commencer, comme ça si tes conneries sont trop longues, je pourrai m'endormir.

Eeri ne peut s'empêcher de rire à cette dernière remarque d'Azazor, qui étrangement répond par un un petit sourire satisfait..

-Je t'écoute, dit-elle.
- Alors, voilà ce que je vais leur dire...

Edité 2 fois | Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#28 Multilingue 

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Après trois semaines de marche, ce sont deux homins épuisés qui arrivent au pied de la pente menant à l’Avant-Poste de la Falaise Nuageuse. Celui-ci est jusque-là resté caché à la vue des homins par un épais manteau de brume, si ce n'est il y a quelques jours, quand la brume s'étant levée, ils ont pu l'apercevoir à flanc de falaise. Comme on leur avait expliqué avant leur départ de la Halte, l’ascension commence par un long et étroit chemin serpentant entre les racines, souvent remplacé par des escaliers taillés à même le bois quand le chemin est trop pentu. Il finit ensuite par un élévateur comme pour la Halte. D'après ce qu'on leur a dit, le désert où est construit l'avant-poste est bien plus haut que le continent verdoyant où se situait Fort-le-Phare. Ils ne peuvent pas encore voir le haut de la falaise à cause de la brume, mais la falaise doit être gigantesque.

Après une remontée laborieuse de plusieurs heures, en tirant des mektoubs aussi éreintés qu’eux, Eeri et Azazor sortent enfin de la brume. Ils peuvent alors voir se détacher l'avant-poste, une structure principalement en bois posée à flanc de falaise. Bâti sur une grande racine qui dépasse de la falaise, l'avant-poste est solidement protégé, à l'ouest par le vide, ailleurs par des murailles. Celui-ci est détenu par les maraudeurs, bien que les rangers y soient autorisés. La nuit tombant, il se détache du ciel étoilé grâce à des flambeaux allumés de-ci delà. D'où ils sont, il semble déjà imposant. Pourtant, il leur reste encore plus de la moitié de la hauteur de la falaise à grimper.

- Il reste probablement au moins une heure avant d’arriver à l'élévateur. Je te propose de passer la nuit ici et d’attendre demain matin pour y aller.
- Sûr qu’on sera plus frais.

Eeri note le changement d’Azazor à son égard. Avant, il n’aurait pas proposé mais imposé. Mais depuis leur conversation il y a quelques jours sur leurs plans respectifs pour se faire accepter des maraudeurs, il semble enfin la prendre un peu plus au sérieux.

Ils posent leurs affaires à dos de falaise. Comme toujours depuis leur départ, Eeri s’occupe d’attacher les mektoubs et de leur donner à manger, tandis qu’Azazor s’active à allumer un feu. Avant que le bois ne prenne, Eeri le stoppe dans son élan.

- C’est peut être pas très prudent d’indiquer notre présence ce soir tu trouves pas ?
- T’as raison, pas de feu ce soir.

« T’as raison ». Oui, décidément, Azazor a changé.

De là où ils sont installés, ils peuvent voir à l’ouest la couverture nuageuse qui recouvre la Mer de Bois. Sagaritis émerge au-dessus de la brume. L’astre aux anneaux semble flotter sur les nuages, comme une bulle de savon prête à éclater. Une bulle fragile, comme la situation de nos deux homins, perdus dans le brouillard à des années de marche de leurs amis.



Azazor rêve ce soir-là. Il se remémore ce jour où il a annoncé son départ à la chancelière de l’Académie Impériale.

C’est un jour d’orage, comme le désert en connaît parfois. La pluie vient marteler les façades de l’Académie Impériale dans un grondement assourdissant. Prenant son courage à deux mains, Azazor frappe à la porte de l’archiviste impériale. Il a terminé sa formation initiale depuis peu. Avec la publication de ses nombreux ouvrages, il se sent enfin légitime pour demander une place au talumetim-an, la formation élitiste de l’Académie, celle auprès des grands maîtres.
Pourtant tout ne se passe pas comme prévu. Euphanix Apotheps lui dit que le temps n’est pas encore venu. Et puis, aucun maître ne le soutient. Tous accordent à l’akenak une certaine intelligence, de l’intuition et une bonne mémoire. Mais il lui manque tantôt un peu de rigueur et de discipline, tantôt un je ne sais quoi. Azazor a beau insister, demander ce qu’il lui manque réellement, rien à faire, l’archiviste n’a pas le temps pour ça, elle est très occupée. Le fyros finit par exploser, il exige qu’on le mette au défi, qu’il est bien plus méritant que la plupart des élèves qu’il a côtoyés pendant sa scolarité tardive, que ce n’est pas juste. Il veut seulement qu’on lui dise ce qu’il doit faire.
Alors, se levant calmement de son bureau pour s'approcher d'Azazor, Euphanix prend un ton grave.

- Tu veux savoir Azazor pourquoi à l’Académie rares sont les homins qui t’apprécient ? Je vais te le dire, puisque tu tiens tant à savoir la Vérité.

Le fyros regarde intensément la chancelière, prêt à encaisser le coup. Celle-ci lui dit alors ce qui le marquera à vie, ce qui le poussera à entreprendre ce voyage jusqu’aux Anciennes Terres.

- Tu n’es pas de leur monde, voilà tout. Ils sont issus pour la plupart des plus hautes classes sociales. Alors que ton père était un médiocre apprenti boucher et un piètre combattant. Quant à ta mère, ce n’était qu’une prostituée dégottée au bar par ton père un jour de beuverie. Voilà la crue Vérité !

Azazor encaisse difficilement le choc. Il avait toujours vu son père comme un grand soldat. Quant à sa mère, qu’il n’a pas connu, il ne la connaissait que dans les dires élogieux de son père. Il sert les poings, son visage virant au rouge.

- Désolé akenak, mais tu viens d’une classe sociale à peine au-dessus de la sciure. Ton ascension au sein de l’Empire est une injure pour beaucoup de bien nés.

N’en pouvant plus, l’ancien légionnaire s’écroule à genoux, ses poings serrés venant cogner le sol avec force. Une larme vient s’évaporer sur son visage brûlant de colère et de honte. La dernière fois qu’il a versé une larme, c’était à la mort de son ami Lopyrech, il y a bien longtemps. La rage ne tarde toutefois pas à reprendre le dessus.

- Mon père est mort lors du second grand essaim pour défendre la retraite de notre peuple jusqu’à l’Oasis Kami ! Il a sauvé tous ces traines-palais, tous ces lâches qui...
- Oui, je sais. Il a fait partie des volontaires restés à Pyr pour couvrir la retraite des autres homins. Et en cela, il a sauvé l’honneur de ta famille. Mais tes origines parlent malheureusement en ta défaveur auprès d’une certaine élite sociale.

Elle pose une main amicale sur l’épaule du fyros.

- Fût un temps, l’Empire était beaucoup plus méritocratique. Mais de nos jours, ceux d’en haut se méfient de ceux qui viennent d’en bas. C’est comme ça. Alors laisse le temps au temps. Ils finiront par reconnaître ta valeur.
- Le temps… Non, je n’ai pas de temps à perdre ici ! Ils veulent du mérite, alors je leur en donnerai au centuple !

Se faisant, il se relève et s’apprête à partir. La chancelière ne tente pas de le retenir. Elle sait qu’il ne sert à rien d’apaiser un feu qui brûle. Il faut attendre que celui-ci ait fini de se consumer. Alors qu’il est dans l’encadrure de la porte, Azazor se tourne une dernière fois vers elle.

- En vérité nous autres les basses classes, nous sommes comme le bois. C’est le bois qui supporte la douleur du feu. C’est lui qui, enflammé, cuit la viande. Mais quand vient l’heure de manger, on dit au bois : tu ne peux pas venir à table, tu salirais la nappe. On laisse alors le bois se consumer et retourner à la sciure.

Avant qu’il ne claque la porte du bureau de l’archiviste, Euphanix l’apostrophe.
- Que vas-tu faire Azazor ?
- Je vais chercher le Dragon, là où tout a commencé.
- Au Nexus ?
- Non, dans les Anciennes Terres. A Coriolis.

Quelques jours plus tard, il enverra une lettre à Euphanix, lui expliquant son projet, qu’il mûrissait depuis des années déjà. Établir une carte de la route d’Oflovak et du désert ancestral, étudier les kitins locaux, et si possible, percer le mystère de l’incendie de Coriolis. Il ne précise pas son intention de marchander du savoir avec les maraudeurs. Il n’est même pas sûr qu’il en discutera avec eux. Cela dépendra de l’impression qu’ils lui donnent. Quant à récupérer un éventuel artefact impérial dans la cité de Fyre, autant ne pas en parler non plus. Rien ne dit qu’il arrivera jusque-là...

Edité 2 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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biographie

#29 Multilingue 

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Journal de bord d'Eeri
fin de Nivia, 4th AC 2619. Ou déjà 2620?

Nous y voilà, nous sommes chez les maraudeurs.

Depuis que nous sommes arrivés, nous avançons de surprise en surprises. Certaines plus désagréables que d’autres.
La plus inattendue, c’est qu’Azazor a été de bien meilleure humeur ces derniers jours. Nous parlons plus calmement, et nous nous sommes mis d’accord sur notre ligne de conduite. C’était pas trop tôt. Je ne m’y attendais plus. Le bodoc, il m’a même demandé mon avis, et pas qu’une fois. J’ai cru qu’il manigançait quelque chose, mais j’ai dû me tromper.

Bref. Nous avons passé une nuit à flanc de falaise. Je n’ai jamais escaladé une falaise si haute. Nous nous sommes arrêtés à mi-chemin environ, suivant les indications des homins de la Halte, lorsque nous avons pu trouver une plateforme convenable. Puis nous avons encore marché quelques heures le matin avant de trouver cette fameuse nacelle. Là, ça n’a pas été aussi facile.
Déjà, il a fallut comprendre ce qu’ils racontaient. Plus on s’éloigne des Nouvelles Terres, plus l’accent est atroce. Toub, et il a fallu qu’on se rende compte que c’était réciproque. Que nous devions parler lentement, avec des mots simples, articuler. Ne pas parler vite en mangeant des mots comme j’avais pris l’habitude de le faire chez les trykers, par imitation.

Alors, ils ont descendu la nacelle, et gueulé des trucs d'en haut. À force de gueuler de chaque côté sans se comprendre, ils ont finit par remonter la nacelle avec nous dedans. Elle était bien plus large que celle de la Halte, ce qui nous a permis de tenir avec les deux mektoubs. En arrivant en haut, on a tout de suite senti que les homins en face de nous avaient une autre carrure que ceux de la Halte. Le système de poulies était pourtant similaire, faut croire qu'ils savaient tirer plus fort.

Ils nous ont regardés avec des yeux un peu effarés, sans doute à cause de notre accoutrement ou de ce qu'on avait gueulé d'en bas, puis l'un nous a dit qu'ils ne s'attendaient pas à voir un convoi de la Halte avant plusieurs semaines. J’ai laissé Azazor parler, comme convenu. Nous ne sommes pas un convoi de la Halte, même si nous en arrivons. Nous sommes des scientifiques fyros des Nouvelles Terres, nous nous dirigeons vers la Citadelle. Ils étaient visiblement confus, comme on s’y attendait. Ils ont demandé si on avait des marchandises, on leur a vaguement expliqué ce que l’on transportait, un mektoub chargé de sacs de viande d’Armadaï. De derrière eux est arrivé un matis le pas un peu pressant et l’air sévère.

"c’ui là, je l’aime pas" j’ai chuchoté à Azazor. Deux heures plus tard, on était fixés, j’avais entièrement raison de pas l’aimer.

Celui là, c’est Ostini. C’est une sorte de chef des gardes, ou plutôt c’est l’un des sous-fifre du chef du clan qui possède l’avant-poste, les Passeurs, comme ils se font appeler. C’est toujours comme ça avec les homins. Donne leur un peu de pouvoir, ils s’emploieront à dévaloriser les autres pour conserver le petit bout de privilège qu’ils ont en plus. Au final, Ostini a posé les mêmes questions que ses homins, employant un ton condescendant et obséquieux. Un bon matis du genre de ceux qui m’avaient manqué depuis notre départ. Après quelques minutes, nous avons compris qu’il ne s’intéressait qu’aux marchandises que l’on pouvait transporter, et comprenant que nous n’étions pas des marchands, il nous a alors demandé de payer notre séjour ici. Un sac de viande d’armadaï par personne et par nuit. On lui a donné deux sacs du mektoub de Titus, sans rechigner. Celui-là ne viendra plus les réclamer, sauf dans mes cauchemars. Ostini nous a fait un topo des règles de l’avant-poste. Ils nous laissent nos armes, mais nous devons les garder rangées lorsqu’on est à l’intérieur de l’enceinte, ainsi que deux ou trois trucs relativement logiques, l’eau est rationnée et il nous faudra la payer. Nous sommes libres d'utiliser le dortoir, la taverne, et un hall en partie ouvert qui sert de lieu d’échange, de marché. Il nous a montré le dortoir où l’on pourra rester, en précisant de nouveau : tant qu’on a de quoi payer.

Nous avons donc pu arriver au centre de l’avant-poste. Il y a en effet six bâtiments dont deux visiblement réservés aux membres du clan, disposés en cercle à l'intérieur des murs d'enceinte. Une tour de guet, le marché, l'auberge, le dortoir. Rien de bien joli, comme à la Halte. Un style plutôt fonctionnel, mais certains détails ressemblant vaguement à ce que les maraudeurs construisent dans les nouvelles terres.

"Deux sacs par nuit, on ne va pas faire long feu", j’ai chuchoté à Azazor.
À ce moment mes yeux se sont posés sur deux étranges silhouettes qui passaient plus loin, entre deux bâtiments. Deux silhouettes étrangement familières.
J’ai eu un moment d’inattention, comme si j’avais cru rêver. Azazor m’a dit des choses que je n’ai pas intégrées sur le moment. Il me les a répétées plus tard : on allait peut-être passer plus de temps que prévu ici. Par exemple qu'on devrait se faire embaucher comme bouchers ou cuisiniers à la taverne pour payer notre séjour, le temps d’organiser et surtout de récupérer notre énergie après plusieurs semaines dans la Mer de Bois.

Les silhouettes, entre-temps, avaient disparu. Sur le moment, Azazor ne m’a pas crue. Quoi, des Fraiders? Qu’est-ce qu’ils foutraient là? Tu es sûre? Que feraient-ils dans un camps maraudeur? Nous sommes entrés dans ce dortoir. C’est très rudimentaire, mais ça sera toujours mieux que de passer une nuit en bas. Je profite d’un moment de repos pour écrire ces lignes, puis nous irons à la taverne. J’ai un plan.


Plus tard, les deux fyros se dirigeaient vers la taverne :

— Bon, on va d’abord se renseigner comment on va pouvoir payer, dit Azazor.
— On leur propose nos services, tu disais… Mais ils ont sans doute déjà des cuisiniers…
— Il faudrait pas que ça nous coûte tout notre stock de viande séchée. En garder quelques sacs serait bien pour la traversée du désert.
— C’est vrai. Mais demandons déjà ce qu’ils servent. Je donnerais un bras pour une shooki… Ou plutôt un oeil, tiens, ça sert moins souvent.

Eeri ferma alors son oeil gauche, ouvrant son oeil droit au maximum, ce qui fit légèrement rire Azazor. La situation aurait pu être pire. Un peu plus loin, de la fenêtre d’un des halls du clan, Ostini regardait les fyros qui traversaient lentement la place déserte de l’Avant-Poste en discutant.

— Alors, ces Fraiders, demanda Azazor ?
— C’est notre chance, dit Eeri. J’ai passé tellement de temps chez eux, je connais suffisamment leur dialecte, L’une de mes hachettes est de leur fabrication, je l’ai ici. Enfin, ça vient des fraiders des Nouvelles Terres, mais ce n’est sans doute pas bien différent.
— Mais pourquoi allais-tu chez eux? Qu’ont-ils de spécial?
— As-tu déjà vu un agent Karavan ou un Kami chez eux?
— Hmmm…
— Même si on raconte que les Fraiders avaient été approchés par la Karavan, ils se sont sans doute désintéressés avec le temps.
— J'avais lu un truc sur eux à l'Académie, comme quoi ils collectionnaient pas mal d'artefact kara. C'était moins par foi qu'une sorte d'addiction.
— J'ai jamais vu ce genre de chose dans leur campement.
— Et donc, tu y tenais des réunions de Trytonistes?
— Même pas. Juste pour être tranquille, penser, m’entraîner. En zone neutre. Tu vas te moquer… Mais je leur trouve une sagesse que les homins n’ont pas.
— Oh, ça, c’est facile. Ils sont sans doute moins corrompus, et moins avides de pouvoir.

Eeri sourit, hocha la tête, et ajouta :

— Ils sont avides de matières premières rares, pour leur artisanat. Mais ils maintiennent un équilibre et partagent les richesses dans leur tribu.
— Bon, mais alors comment les convaincre de nous aider?
— On va déjà voir ce qui s’échange ici, ce qu’ils recherchent et ce qu’ils offrent. Si je montre ma hache et que je leur parle de la tribu des Nouvelles Terres, avec un peu de chance, on se fera des alliés.
— Et si on n'a pas de chance?
— On pourra toujours faire des affaires avec eux.
— On a quoi à leur échanger?
— À voir. Il me reste quelques matières rares sur mon Mektoub. Quelques ambres de Zun, que je préfèrerais garder au cas où nous ayons besoin de nouveaux amplificateurs… Deux lianes de Maga, un peu de Vedice. Jusque là, nous avons moins usé nos armes que je ne l’avais prévu.
— Tu as ça dans ton Mektoub?

Eeri sourit et répondit à mi-voix, en s’arrêtant.

— Dans une poche cachée sous la selle. Les ambres sont dans le rembourrage. De quoi fabriquer deux paires.

Le fyros regarda Eeri en coin, sans rien dire, alors qu'elle ajoutait :

— Eh, ça je t’en avais parlé, que j’emmène de quoi refaire des amplificateurs. Je ne t’avais juste pas dit à quel endroit c’était rangé.
— J’avais dû oublier… Tant que ce n’est pas une troisième bombe à goo, grommela Azazor.
— Mais je n’en ai qu’une, promis !

Entre temps, Eeri et Azazor étaient arrivés à la Taverne. Ce dernier poussa la porte et entra, suivi d’Eeri. Après quelques secondes, les quelques homins présent se turent, certains se tournant pour fixer les nouveaux venus. Autour des quelques tables se trouvaient des maraudeurs, reconnaissables à leurs armures rutilantes, quelques homins aux tenues plus discrètes, comme on pouvait en voir à la Halte. Des rangers, peut-être, pensa Eeri. Un certain nombre étaient vêtus de longues tuniques et de turbans couvrant quasiment tout leur visage. Un Fraider était même attablé avec l'un d’entre eux.
Les voyageurs s’avancèrent lentement vers le comptoir où se tenait, à leur grand soulagement, un fyros massif qui les regardait, un couteau à la main.

— oren pyr, qu’est-ce que vous servez ici?
— Je vais vous appeler la patronne, répondit-il. O’Teelo?

Quelques secondes plus tard, une tryker descendit l’escalier et se dirigea derrière le comptoir, une expression légèrement pincée, mais souriante, pendant que les clients reprenaient petit à petit leurs conversations d’une voix légèrement plus feutrée.

Edité 2 fois | Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#30 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
La tavernière avait le corps charpenté et bien en chair. Des tatouages tribaux ornaient ses deux avant-bras qu’elle avait nus. Son sourire semblait marquer une certaine appréhension devant les deux nouveaux venus. Ce n’était pas tant qu’ils soient nouveaux qui l’inquiétait. L’Avant-Poste n’était qu’un va-et-vient d’homins de toute sorte, marchands pour la plupart, d’autres simples aventuriers ou vagabonds en recherche d’un gîte temporaire. C’était aussi un haut lieu d’assemblée diplomatique entre rangers, maraudeurs, haltiens et les tribus des alentours. La taverne était alors le lieu où l’on venait fêter la signature de tel pacte d’entraide ou accord commercial.
Non, ce qui l’inquiétait émanait d’eux comme une sorte d’aura déplaisante. Etait-ce leur armure entièrement fyros quand celle des rangers était disparate, ou leur tatouage inconnu alors qu’elle se targuait de connaître les tatouages de toutes les tribus alentour. Il y avait quelque chose en eux de complètement inconnu, de jamais vu.

L’homine lui demanda avec un accent étranger à couper au couteau une liqueur de shooki. O’Teelo s’étonna :

— Une quoi ?
— Laissez tomber…
— Ici, on ne sert que du baba, rajouta la tavernière devant la moue de la fyrette.
— C’est combien le baba, dit le fyros en posant sa bourse sur le comptoir.

Celui-ci portait un étonnant tatouage de dragon sur le visage. Pourtant, il ne ressemblait pas à celui du Clan des chasseurs de dragons rouges. Le fyros n’était d’ailleurs pas maraud à en croire son armure.

— ça dépend, vous réglez comment?
— Vous acceptez les dappers?

La tavernière prit un air dédaigneux. Les dappers restaient encore utilisés sur la route mais étaient de plus en plus délaissés en faveur du troc. On trouvait aussi quelques monnaies locales suivant les endroits.

— Ce sera 5000 dappers, et c’est accompagné du plat du jour, expliqua O’teelo. Ragoût d’arma aux graines de botoga.

Les deux fyros se regardèrent avec une mine déconfite.

— Y’a rien d’autre à manger et surtout à boire ?
— Demain y’aura peut être du ragoût de ploderos, ça dépend des arrivages. A boire il y a aussi le glorx.
— Le glork ?
— Glorx, répéta la tavernière, en insistant bien sur le x final. C’est une spécialité des Atakorum.

Ce faisant, elle pointa de la tête le groupe d’homins enturbannés.

— Mais faut avoir le coeur bien accroché. Y’a qu'eux et les Fraiders qui en boivent d’habitude. Je sais même pas à partir de quoi c’est fait.
— Alors va pour le glorx, s’exclama la fyrette en tapant de la main sur le comptoir.
— T’es sûr? s’enquit le fyros.
— Ça peut pas être pire que le baba…

Le fyros fit un signe pour dire qu'il prendrait la même chose.

— Ce sera 10 000 dappers en tout, dit la tavernière.

Les deux fyros passèrent une bonne partie de leur journée à la taverne, tentant d’engager la conversation avec différents homins. Eeri pris contact avec un fraider, Azazor discuta le bout de gras avec un gros fyros du nom de Krapoutos. Ils apprirent ainsi que l'Avant-poste Diplomatique accueillait des réunions entre des généraux importants de la Citadelle et des Rangers. Le clan qui possédait l’Avant-Poste ne jouait cependant pas le rôle de porte-parole de la Citadelle. Le Clan des Passeurs en profitait seulement pour faire leurs affaires, d'autant plus que la diplomatie passait parfois aussi par le commerce.

Le soir venu, après une longue discussion entre Azazor et O’Teelo, celle-ci finit par être convaincu de les embaucher pour une semaine en cuisine. Pelorus, le cuistot, manquait de bras. Azazor lui avait assuré qu’ils étaient bouchers et qu’elle ne le regretterait pas. Elle leur proposa un contrat d’une semaine pour voir, en commençant dès demain, avec possibilité de prolonger s’ils faisaient l’affaire. L’accord se conclut sur une poignée de main et un akep du fyros. Celui-ci lui avait expliqué d’où ils venaient, où ils allaient et ce qu’ils étaient. Des scientifiques venus des Nouvelles Terres en route pour la Citadelle et au-delà. Oui, son instinct ne l’avait pas trompé. Ces deux homins étaient vraiment très particuliers. O'Teelo se demandait si elle n’allait pas regretter l’accord avec le fyros...

Edité 2 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#31 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Pelorus Mekor observe les deux nouveaux avec dédain. On lui envoie encore des incompétents qu’il va falloir former. Il paraît même qu’ils viennent de la Halte. Des faiblards à n’en pas douter, qui ne savent probablement pas se servir d’un couteau.

P - Bon les novices, prenez un couteau, on va découper une cinquantaine de steak de bodoc pour ce soir. Je vais vous montrer comment on fait. On prend un rosbif et...
A - Inutile malos, on sait faire. Tu les veux tendres ou pas les steaks ?
P - Comment ça ?
E - Azazor veut savoir si on les coupe dans le sens du grain ou pas.
P - Le… un sens ?
A - Ouais, regarde ton rosbif, y’a un sens pour les fibres musculaires. Si on coupe dans leurs sens, la viande est moins friable.
E –Mais elle est moins tendre. Tailler dans le sens perpendiculaire, c’est plus dur, mais la viande fond en bouche.
A - Attend, on te montre comment faire.
E - Le truc, c’est de bien aiguiser le couteau.

En quelques minutes, les steaks sont tous coupés. Les deux fyros regardent en souriant le chef cuistot.

A - Tu les veux encore plus tendre ?
P - Gue…
A - Dans ce cas, fais les mariner.
P - Mariquoi ?
E - Mariner, baigner dans l’huile pendant une bonne heure
A - Sans oublier les herbes aromatiques pour plus de goût
E - Ah ça oui, on a justement quelques aromates cueillis dans la forêt près de la Halte.
P - Mettre des herbes avec la viande?
E - Fais nous confiance, on était boucher d'où on vient.

Pelorus s’assoit quelques instants pendant que les deux bouchers s’activent avec aisance à faire mariner les steaks de bodocs dans une marinade aux herbes.

E - Ce sera parfait pour faire poêler.
P - Poêler ?
E - Ben oui. Tu les cuis comment tes steaks ?
P - On fait bouillir avec les légumes.
E - Mais on fait pas bouillir une viande comme ça !
P - Parfois, on la cuit en broche, mais pas le bodoc, c’est trop dur.
A - Pas comment on l’a découpé. Et encore moins une fois marinée.
P - Bon, écoutez, visiblement, vous avez l’air de vous y connaître. Alors je vous laisse carte blanche pour la viande de ce soir à la taverne.
A - C’est comme si c’était fait. T'as une poêle ?
P - C’est quoi une poêle ?
A - Une hanche de ploderos qu’on place sur les braises. Quand c’est bien chaud, on met le steak dessus, trente secondes, on retourne pour encore trente secondes et c’est fini.
P - C’est tout ?
A - Oui.
E - En oubliant pas d'arroser avec le jus de cuisson.
P - J’ai pas de "poêle".
A - Tant pis. Eeri, passe-moi ton plastron.
E - Ma Kostomyx ? T’es fou. On a une poêle dans le mektoub.
A - Ouais mais c'est loin, et dans le plastron, avec la sueur, ça donne un goût inimitable
E - Je comprend d'où vient l'odeur chez toi
A- Alors va chercher la poêle. Et ramène la louche aussi, pour arroser les steaks.

Une fois Eeri revenue avec la poêle, Azazor la place directement sur le feu dans l’âtre, calée avec quelques braises.

A - Poêler ça prend pas de temps. Le plus long, c’est de laisser mariner. Mais c’est pas obligatoire. Une petite marinade de quelques minutes, c’est déjà pas mal.
E - Surtout si le bodoc a été battu avant.
A - ça attendrit la viande.
E - Faut aussi bien faire attention quand on le tue.
A - Ouais, faut éviter le coup de stress quand il sent qu’il va mourir. Ça libère de mauvaises choses dans le muscle.
E - D’où l’importance de le tuer par surprise et rapidement.
A – Ou alors encore mieux, faut prendre du bodoc élevé par les kitins
E - Ouais, directement ramené d’une kitinière. Vous avez pas ça à proximité ?
P – Une kiti… Non, pas ici. Il y a des bodocs dans les kitinières ?
A – Bien sûr. Même que notre métier consistait à aller les chercher.
E – ça et les aranas, les madakam…
A – Hmm très bon le madakam
E – As-tu déjà essayé le madakam braisé ?
A – ney ! Toi aussi tu le déglaces avec de la shooki ?
E – Ah Ah carrément ! Même qu’une fois...


Laissant les deux fyros disserter sur l’art de cuisiner la viande, Pelorus quitte à reculons la cuisine pour aller voir son chef. Ou ces deux-là étaient de vrais baratineurs, ou il venait de tomber sur les deux plus grands maîtres bouchers d’Atys. Quoi qu’il en soit, il devait avertir le chef.

Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#32 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Du haut de sa tour de guet, Wozung observe les deux fyros marcher lentement dans l’enceinte du camp. Ils viennent de passer la grande porte à l'est en transportant sur leurs épaules un arma de taille moyenne, ficelé à un pieu. Le fyros semble invectiver la fyrette derrière. Celle-ci éructe quelque chose en faisant un signe vers le coin sud-ouest du camp, auquel le fyros répond par un crachat au sol.

Cela fait quatre jours que Wozung observe le même manège. Au petit matin, les deux fyros sortent par la porte est, unique porte menant au désert. Ils reviennent une heure avant midi chargés tantôt d’un arma, tantôt d’un ploderos, qu’ils emmènent à la taverne pour le repas du midi. L’après-midi, ils repartent de nouveau pour revenir avant la tombée de la nuit, cette fois-ci chargé d’un grand sac plein à l’aller et vide au retour. Le garde zoraï ne se pose pas de question sur ce qu’ils mijotent. Ce ne sont pas ses affaires et de toute façon, ces deux-là se sont fait une belle réputation à la taverne. Il est vrai qu’il n’a jamais aussi bien mangé depuis qu’ils sont aux fourneaux. Alors ce qu’ils peuvent bien trafiquer, il s’en fout comme de son premier troc.

Alors qu’il est sur le point de se désintéresser d’eux, l’un des officiers les apostrophe. C’est Ostini Facili, le chef des gardes. Pas un tendre celui-là, véritable parano et expert en poison. Il leur montre le sac utilisé par les fyros l’après-midi. Les fyros posent leur arma au sol et haussent les épaules. Ostini semble monter d'un ton. Le fyros se met à pousser l’officier qui l’étale d’un coup de poing au plexus. La fyrette relève le fyros tout en éructant à son tour quelque chose. Ostini fait un signe aux gardes alentour qui se mettent aussitôt autour des deux fyros, puis ils les emmènent en direction du nord-est du camp. Wozung sait ce qui se trouve au nord-est. La prison de l’avant-poste. Dommage, c’était de bons cuistots.


Quelques instants plus tard, dans le bureau d'Ostini.

Celui-ci les regarde froidement assis sur leur chaise. Ils ont chacun un garde lourdement armé derrière eux.

O - Je passerai outre votre geste agressif envers moi tout à l'heure. Nous mettrons ça sur l'épuisement d'une chasse en plein désert.

Le chef des garde leur montre alors le sac qu'il leur a présenté dehors.

O - Je vais répéter ma question de tout à l'heure. Pourquoi portez-vous ce sac qui sent la viande dans le désert chaque après midi? Il est plein à l'aller et vide au retour.
A - Bon, vous voulez vraiment savoir ? D'accord, alors on va vous le dire.
E - Aza, tais toi !
A - Non, ce marché je ne l’ai jamais approuvé. Je savais que ça allait nous retomber dessus.
E - orak !
A - Et talen t’en fais quoi ?
O - orak, talen ? Qu’est-ce que c’est que ça ?
A - Un truc que tu peux pas comprendre l’orskos !
O - L’orsk…
A - Le sale mat…

Eeri parvient à temps à mettre sa main devant la bouche d’Azazor.

A - Ça va lâche-moi !
E - C’est juste du fyrk, parlé encore dans les nouvelles terres.
O - Ecoutez-moi bien les deux comiques, ici ce ne sont pas les Nouvelles Terres. Ici, nous sommes chez les Passeurs. Et le détournement de marchandise est sévèrement puni par notre clan.

Azazor rumine un truc inintelligible et crache au sol.

O – Alors ce marché ?
A – ça va, tu vas l’avoir ta vérité l’orskos !
E – Tu trahis ton honneur Aza en révélant notre accord.
A – Rien du tout. J’ai pas signé moi. Je t’ai juste donné un coup de main par amitié.
E – Amitié ?

La fyrette éclate de rire.

E - Tu peux te la mettre où je pense ton amitié, le traître.
A – C’est pas moi qui flirte avec des dégénérés.

Eeri se lève et balance un coup dans la tête d’Azazor qui vacille de sa chaise. Celui-ci se relève et réplique en se jetant sur elle pour l’étrangler. Les gardes doivent alors intervenir pour séparer les deux furieux.

O – C’est pas bientôt fini ? Mettez-moi celle-là au cachot en attendant. Quant à toi le fyros, ma patience à des limites. Tu te mets à table tout de suite ou on joue à un autre jeu.
A – C’est des avances mon beau ?

N’y tenant plus, Ostini attrape le fyros et le met au sol violemment. Il fait un signe aux gardes qui se mettent à le bastonner à coups de pieds jusqu’à ce que le fyros s’évanouisse sous les coups.

O - Trainez-moi ça au cachot avec l’autre !

Ostini n'a jamais perdu patience comme cela. Il est réputé pour son calme à toute épreuve. Et pourtant, là, il vient de faire rosser un homin. Il sent qu’il va avoir du mal à faire parler ces deux-là. Il en connaît des retors, mais eux semblent vraiment se moquer de se prendre des beignes. On dit que d’où ils viennent, on meurt difficilement. Si c’est le cas, ça explique qu’ils résistent aussi bien aux coups. Ça doit être une habitude chez eux. Alors qu’ici, la meilleure technique de survie est justement de les éviter.
Il lui faut d'abord reprendre son calme. Sa réputation est en jeu. Et puis, visiblement, les coups n'ont aucune emprises sur ces homins. Il respire un grand coup et tente de se calmer un moment.


Dans la cellule où sont enfermés nos deux fyros.

Une fois Azazor enfermé dans la même cellule qu’Eeri, celle-ci attend un moment que les gardes partent. Puis elle se dirige vers son compagnon de route sévèrement amoché. Celui-ci ne se relève pas. Son souffle est roque et haletant, comme s’il allait s’étouffer. Alors qu’elle approche son visage pour mieux le voir, il ouvre un œil et la regarde avec un grand sourire.

E - Crétin !
A - Hahaha

Il se relève alors et s’assoit à côté d’elle.

A - Alors, il était beau notre numéro non ?
E - Un vrai chef d’œuvre...
A - On a gagné un peu de temps. Vu ce que j’ai dégusté, ils vont penser que ce que je vais leur dire sera la vérité. Ça nous laisse quelque temps pour trouver quoi leur dire.
E - ça va être compliqué d’expliquer pourquoi le sac qu’on amène plein tous les après-midi dans le désert pue la viande et se retrouve vide à notre retour.
A - On peut leur dire qu’on a un marché avec la tribu des Atakorum.
E - Les Atakorum? Les nomades mystiques dont parlait l'autre grande gueule au bar la dernière fois?
A - Ouais. On explique qu’on leur apporte de la viande en échange d'informations?
E - Si tu dis ça, c’est la potence directe.
A - C’est toujours mieux que de leur dire la vérité, à savoir qu’on détourne de la viande et qu'on l'enterre dans le désert pour la suite de notre voyage. Un marché c'est mieux que du vol.
E - On sait même pas à quelle distance ils ont installé leur campement les Atakorum. Si on veut prétendre trafiquer avec eux, faut être crédible un minimum.
A - Bah, ils doivent pas être bien loin d’après les dires de Krapoutos.
E - Krapoutos raconte beaucoup de choses, mais ça n’en fait pas des faits.
A - De toute façon, je pense pas qu’ils voudront avoir les détails. Si on leur dit qu’on leur ramène un peu de viande qu’on a chassé en échange de renseignements sur la région, ils vont pas monter au créneau non ? Ces marauds n'ont pas l'air d'être de gros lourds comme ceux de chez nous. Faire du marchandage, même si c'est pas avec des marauds, ça semble toléré.
E - Pas avec leurs biens.
A - C'est nous qui la cuisinons.
E - Mais ça reste leur viande. Et ils vont vouloir récupérer le fruit du marchandage. Des informations que les Atakorum nous aurait filé sur le désert, ils s'en foutent.
A - Tu penses à quoi alors?
E - On peut dire qu'on marchande du poison.
A - Du poison? Mais on n'a pas de p....

Eeri lui sourit de toutes ses dents en battant des paupières.

A - Ah, la fameuse fiole...
E - héhé
A - Et elle est où cette fiole?
E - Dans mon toub, s'ils l'ont pas déjà fouillé.
A - ça peut se tenter. On trafique de la viande avec la tribu en échange de poison. On s'est fait prendre et donc on accepte de rendre le poison...


Soudain, des pas se font entendre dans le couloir menant à la cellule. Eeri et Azazor se taisent immédiatement. Ce dernier s’allonge et se met à tousser. Une clé vient tourner dans la serrure de bois de feu et la lourde porte s'ouvre dans un grincement, laissant apparaître dans l'encadrure de la porte un garde à l'air sévère.

G - Toi le fyros, assez dormi. Le chef doit te causer.
E - Azazor, ne lui dit rien ! On a juré de ne rien dire !
A - Pas moi.
G - Avance et ferme là !

Tandis qu’Azazor est escorté par deux gardes dans le couloir jusqu’au bureau d’Ostini, Eeri ne peut s’empêcher de sourire. Une vraie pièce de théâtre. Mais avec mise à mort si celle-ci ne plaît pas au public.

Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#33 Multilingue 

Multilingue | [English] | Français
OOC: This scene was played live on RC by Eeri, Azazor and Finaen (lorist playing NPCs). Only the layout and some micro changes have been made.


Ostini opens the door to his office. He curtly addresses the two guards accompanying him.

"Make him sit down."

The two guards obey, ready to strike the Fyros if he tries to resist. Azazor sits down with a mocking look on his face. 
Ostini closes the door, walks around his desk and sits down in turn. He taps the solid wood desktop for a few moments, staring into space, then finally pulls an object out of a drawer. A finely crafted dagger. Azazor looks at the Matis and the dagger in turn, without losing his slight mocking smile.

"Well you comic, I want you to explain me precisely this story about a 'deal'."

"Or what? Are you going to play the dagger?"

Ostini plunges his hand into his desk again. When it reappears, it holds a small vial filled with a greenish liquid. Azazor's smile immediately fades at the sight of the vial. The Matis uncorks the vial and lets fall a few drops on the dagger's curved blade. A few wisps of smoke are born from the reaction between the liquid and the hardened amber.

"What is it? Poison? If you kill me, you will not know anything!"

"Indeed, it is poison. In case you have forgotten, you should know that you have left the resurrection behind when you undertook this journey. In this desert, no Power will come to help you. So I urge you to cooperate, and not to try to trick me. Am I clear?"

As Azazor remain silent, Ostini goes on:

"I am in charge of the security of the Outpost. I have to understand what you are up to. And believe me, I'll get you to talk, if you try to resist."

The Matis seems particularly calm. The two guards remain flanked in front of the door. Azazor shrugs his shoulders.

"You know, Matis, I'm not the type to lie. And I'm willing to tell you everything. But you see, I don't like those of your race. Back home, the Matis are a bunch of smelly, vile pretentious people. I want to believe that here, it is different. But talk to me offensively again, threaten me again, and all you can get from me is a good spit on your pallid face."

Azazor can't help but look at the vial, the dagger, and the Matis, alternately.

"'Those of my race'? Have you not yet managed to get rid of the racism of our common ancestors? Your civilizations are definitely way behind…"

"You don't know the Matis of the New Lands…"

Ostini lets out a small chuckle, cut off by Azazor.

"I know a few rare Matis…. well, I know two, that are acceptable, out of a whole bunch of boot scrapings."

The Fyros pretends to remember another Matis.

"Ah no, three."

"You confirm what I thought: you are generalizing. But it's not your fault, that's what they want. Don't forget: you are playing into the hands of the Powers by waging war against each other for racial, political, religious, or whatever reasons… And meanwhile, you are divided. Facing them, and facing the kitins."

Ostini makes the dagger disappear under the desktop.

"Anyway. So you are willing to talk. That's fine. I am listening."

Azazor takes a breath.

"Didn't you guess? The bag that smells like meat, the poison you just pulled out… You have all the elements."

He watches Ostini's face, waiting to see the light.

"The poison?"

Ostini looks at the vial that was left on the desktop.

"What's the connection? That vial belongs to me."

[b]Suddenly, Azazor's face breaks down.[/i]

"Ah… ramèch! Well… What was said is said, he adds while tapping his foot on the ground."

Ostini starts tapping his fingers on the desk again.

"We had a deal with the Atakorums. In exchange for some of the meat we would go out in the morning to hunt for Pelorus, they would give us a vial of poison of their own creation."

The Fyros pauses and then continues:

"Given the danger of the road, Eeri and I thought it would be prudent to carry this kind of stuff with us for the rest of the trip. I know, it is a detour of matter which belong to you, but we had figured that, well, on the one hand, we were the ones who brought back this meat. Bodocs and armas are not easy to kill here."

"You're telling me that strangers who everyone distrusts, because of where they come from, are trafficking poison in the very resting place where they have been generously welcomed?"

Azazor has difficulty hiding his embarrassment.

"Not here, no, they didn't want to. They said you would not agree. So we were doing it in the desert, further east. We had agreed on a meeting point."

"If I was paranoid, I'd think that this poison was meant for use against us."

"Are you crazy? Why would we do that?"

"To avenge all the horrors that Akilia's goons did to you on your home lands, at random? There is no reason why Akilia is the only one to send agents to operate in foreign lands.

Ostini marks a pause, then goes on:

"Fortunately, I am not paranoid. I am simply the chief of the guard. An extremely cautious chief of guard, taking his job to heart. The Atakorums, you said?"

"You can't blame them. They have nothing to do with it. We give them meat that we hunt in exchange for poison. They could not know that the meat was prepared in the tavern. What? We used your knives? Big deal!"

Ostini taps faster and faster on the desktop. Maybe he's a little paranoid after all.

"I need to analyze this poison. Where is it? Luckily, I happen to have a little expertise in poison. A knowledge that comes from my former clan."

"You'll have to ask Eeri. She's the one who stashed it."

"I see."

"And don't worry, we don't look like killers. As for the horrors of Akilia, well, we gave it back to her."

Ostini makes a sign to the guards.

"One of you take him somewhere else, and the other one get the girl back to me. Make sure they don't cross paths."

The two guards nod and signal Azazor to get up. He stands up without any resistance and turns to the chief of the guards.

"Ostini? If you want to make Eeri talk, be polite to the lady. She too, vomits the Matis."

"Racist too? Surprising."

"You really don't know the Matis of the New Lands…

One guard accompanies Azazor and the other one goes to the cell where Eeri is locked up. As requested, the two Fyros will not cross paths.

***



"Follow me," says the guard to Eeri.

Eeri grumbles something, then stands up without a word. She obediently follows the guard to Ostini's office where her gaze searches the whole room for Azazor, without success. She puts on a determined and pugnacious face.

"Good. Sit down."

He pauses and adds:

"Please."

Eeri complies, giving a sidelong look at the Matis, trying not to face him.

"I'd like you to explain to me what you and your comrade were up to with those meat-smelling bags. And what is this 'pact' that he mentioned, and that caused your fight."

Eeri remains silent for a moment, and looks at the Matis again, with a smirk on her face.

"What, he didn't say it all already?"

"I want to confront your versions."

Ostini looks closely at the Fyrossa's face.

"A Fyros does not lie. talen, the truth.

The Matis starts tapping on the desk again.

"I am listening."

Eeri fixes his eyes on the Matis' fingers for a moment.

"About what? What we were doing with that meat?"

"I'll repeat my questions: I'd like you to explain to me what you were doing with those bags that smell like meat. And what is the nature of this 'pact' you made with whoever. I expect answers, not questions.

Eeri holds back a grunt.

"I can't say anything about this pact, I don't know what you are talking about. What I can say, is that we exchanged some pieces of meat with some Atakako… dey… Atakorums."

Eeri continues, not waiting for the Matis to ask against what.

"In exchange for a very powerful poison."

"May I see this poison?"

"Do I have a choice?"

"No, says the matis with a sigh."

"We will have to go to the stable."

"Just tell me where it is hidden."

"You won't find it without me."

Ostini grits his teeth… Then he calms down. He stands up.

"Right."

[b]He straps a dagger to his belt and signals to the guard."

"Direction to the stable then."

As she stands up, Eeri remembers that the poison is in a matis-made vial. She stammers:

"It is on my mektoub. I changed the vial, the one of the Ata…takorum was too fragile."

Eeri gets up and follows the guard. The three homins head towards the stable, located next to the dormitory. Then she adds, in a not too confident voice.

"I don't know where they got that poison from. It probably didn't come from their place."

"If it didn't come from their place, then it came from our. But don't worry, that's a question I can answer."

The adrenalin going to her head, Eeri doesn't answer. The three homins finally arrive in front of the mektoub. After the terrible journey he went through a few weeks earlier, he seems to be living a better life.

She grabs the mektoub's harness, unties two straps, which frees the pack a bit. She reaches behind it and delicately pulls out a small black box, the size of a dagger. She adds:

"I put it in the vial I brought with me, with a Matis paralytzing poison. Nothing too harmful. This one seems much more powerful."

***



Meanwhile, in his cell, Azazor is having scruples and is walking around in circles. Eventually he calls for a guard.

"Yes?"

"I have something else to tell your boss."

"He is busy. But I don't think he's done with you. You can ask him later."

Azazor grunts a little, perfunctory.

***



"And what did you do with the previous poison?"

Eeri opens the box, and reveals a vial, and a living dagger.

"Spilled. But the vial was intact, luckily."

Eeri looks at Ostini with his most convincing look, thinking that the bigger it is, the better it goes.

"We wanted to test in on the kitins of the Old Lands. Paralytic poison. It works pretty well our place."

Ostini gently picks up the vial and looks at it.

"I'll keep this. I'll keep this. And you go back to your cell."

He waves to the guard again.

Eeri replaces the straps of her mektoub and follows the guard. She turns and says to the Matis, in a squeaky voice:

""Be careful, though. They told us that one drop would kill a homin in two minutes. Not that I'd cry about it…"

"I know poisons well, don't worry. But this one… It doesn't look familiar," he says, looking at the vial.

***



Eeri is led back to the cell. Azazor is still in a room adjacent to the cells with the other guard. Minutes pass and the two Fyros are finally led back to the Matis' office. The two guards seat them next to each other, but these don't exchange any glance.

Ostini, sitting behind his desk, seems colder than before. He rolls Eeri's vial between his hands. A guard whispers something in his ear and his gaze falls on the Fyros.

"Did you want to tell me something? The truth, perhaps? That might be useful, indeed."

Eeri remains silent, and gives a sidelong look at Azazor, who begins to speak:

"ney… But first, tell me the Truth. You told me about Akilia, about her goons. Tell me if I'm wrong but… you don't seem to be too fond of her, do you? I know well that she is your leader, but you have nothing to fear, we won't repeat."

"Indeed, I don't hold her in my heart. And no, she is not my 'leader'… But I am not in the mood to speak about Akilia."

"Yet she declares herself the leader of the Marauders," Azazor continues.

Ostini ignores Azazor's last remark and continues:

"You see, I showed your vial to three Atakorums present at this very moment in the tavern. Do you know the rest?

Azazor loses his smile and, looking grave, looks at Ostini. The Matis lets a few seconds pass, then repeats himself, emphasizing each word.

"Do. You. Know. The rest?"

"The Atakorums had nothing to do with that, says Azazor. We just hijacked some food that we stashed in the desert for the rest of our trip. And the vial is from the New Lands. I can't say anything about it, having discovered its existence by chance in the Sea of Wood."

Eeri lets out a loud, upset sigh.

"We arrived here with a full loaded mektoub. We gave you everything…"

Ostini shows a satisfied smile. He seems proud of himself.

"Or rather, you took everything from us," she adds.

Azazor turns to Eeri.

"They're merchants here, what did you expect?"

"You paid for your stay here. And you could have kept working to get food. But you chose to steal from us instead."

"We didn't steal anything," Azazor growls.

"To get food? We work like crazy, and that's just enough to pay for your dorm!" adds Eeri.

Ostini raises his hand and beckons the two Fyros to silence.

"This food, we hunted and prepared it," Azazor adds anyway.

"Save your plea for my boss. My real boss, not Akilia. I did my part of the work."

Ostini gets up and heads for the door.

"I'll be right back."

Azazor turns to Eeri.

"You and your stupid ideas…"

"The Atakorums was your idea," she whispers to Azazor.

"You had a better idea?"

"dey! But sometimes it's better to just keep silent…"

"You think that saying nothing would have made a difference? Pfff !"

***



A few minutes later, the door opens. Ostini is accompanied by a Trykeri. A Trykeri that the Fyros have already crossed very often.. O'Teelo, the tavern keeper. The two Fyros are astonished. Eeri widens his eyes and gives O'Teelo a tense smile, in doubt. Azazor imitates Eeri like a mirror.

"Thanks Ostini, I'm borrowing your office. Can you take care of the bar while I take care of them?"

"What? Uh, yes. Sure."

Ostini sends an angry smile to the two Fyros and then leaves the room. The two guards remain present. The Trykeri slumps down on the seat and puts her boots on the desk of the Matis, who would probably not appreciate the gesture if he were present. She seems far less friendly than usual.

"I hear you've been embezzling goods that belongs to us."

"Embezzling? No… We have produced more than enough," Eeri protests.

"Technically, it's not your belongings since we're the ones hunting and cooking," adds Azazor.

O'Teelo does not pick up Azazor's remark and continues:

"I've been watching and listening to you a lot over the past three weeks. To tell you the truth, I was beginning to like you. Especially since you're an extremely good cook! But this… This is serious."

Eeri, perplexed, looks at Azazor and, doubting that this is the right strategy, tries to get her neuron to work out a better one. O'Teelo continues:

"You want to talk 'technique' with a merchant, Azazor? If I understand correctly, your thing is politics, alcohol and fighting."

"And a sense of justice," says Azazor.

"And the cooking of the bodoc," adds Eeri, half-heartedly.

"You think it's fair to exploit people? We just wanted to pay ourselves properly by taking some extra meat," says Azazor.

"Otherwise, we won't last two days in the desert," added Eeri.

"So why cover it up? Why didn't you discuss it?"

"Because you are rascals," the Fyros almost shouted. "We too have been watching you. We had to give you all our stock of dried meat just to enter the camp and sleep for two nights in your dormitory."

[Eeri winces at Azazor's words and elbows him, hoping he will shut up.

"So you both survived two more nights thanks to us. Then three weeks more," says O'Teelo.

"Ostini, whom we thought was the leader, did not seem open to discussion," Azazor points.

"Or rather, he was happy to take all the stock we had, adds Eeri. After three days, we had nothing left. And nothing left to buy anything…"

"Ostini, the boss? O'Teelo sneers. He is only the chief of the guard. A good chief, by the way, paranoid as can be. It's often very useful."

Eeri raises an eyebrow at "good chief, by the way". O'Teelo continues:

"That's why we hired you. To help you."

"We have the experience with the Marauders of the New Lands. So don't be surprised if we didn't play it straight from the start. Especially after being racketed at the entrance."

Eeri nods in support of Azazor's words, who is ruminating alone in a low voice: "Merchants, thieves, like the Trykers, all of them are…."

O'Teelo grimaces.

"Don't compare us to those barbarians. And you two don't talk to me about racketeering, you don't know anything about this country. You come from a world where everything seems easy. Haven't you wondered how hard it was to create this outpost, and to keep it going for all these decades? Yes, life is hard here. That's a fact. But better that than death.

Eeri takes a deep breath:

"Well, we screwed up. What can we do now to make up for it?"

O'Teelo looks at the Fyrossa.

"That's a good question."

"You have Eeri's vial of poison, isn't that enough for a few pieces of meat? Or do we have to give you our armor and underwear too?

O'Teelo looks at the Fyros armor.

"No thanks, I'm fine."

Eeri turns to Azazor.

"Don't add to it. They have no use for a poison like that, either."

"If you say so…"

Eeri arouses O'Teelo's curiosity.

"And what is its use?"

Eeri points to the palm of his hand, which shows a black spot.

"I never tested it. But I can tell you that I suffered to get it."

"Who do you want to poison, asks O'Teelo?"

"Yes, who do you want to poison," squeaks Azazor, turning to Eeri.

"No one in particular," answers Eeri. "If I came across your Akilia, I might not mind. It was just a matter of not to leave unequipped, and at worst it could have been a bargaining chip. I intended to try this on kitins from the Old Lands, too."

"If you're looking for Akilia, head back west. She must be somewhere between the New Lands and her headquarters."

Eeri shakes her head.

"We're not looking for her."

"In any case, it is certain that I will not let you progress to the east with an unknown poison. Ostini thinks you are assassins sent on a mission to the Citadel," O'Teelo sneers.

[b[Azazor turns to Eeri.[/b]

"And another toubshit from Eeri, one!"

"Oh, hey, it's okay… We wouldn't be here if you hadn't thought of saying that."

"Okay, then. What do you have to offer, then? For this stolen meat supply."

"That's not even worth the armadai meat we brought in," Eeri grumbled.
"Sorry, I know, it doesn't matter," she adds, lowering her eyes.

O'Teelo seems to be thinking.

"You know what? Maybe you could do us a favor…"

"That's all we can do. We don't have anything else to offer."

"A delivery mission. You'll get to keep the meat, and even get a little extra for the… long detour you'll have to make."

"Will this detour go through the place where we stashed the meat?" Azazor asks.

Eeri nudges him again.

"Aza… that's a detail."

"If you don't make it to the indicated point, I will know. Either it will mean that you died on the way, or it will mean that you preferred to rip us off a second time by continuing on YOUR way. If this is the case, try not to pass by the Outpost again on your way back… Also try to avoid Sentinel and the Citadel…."

"Where is the delivery located?"

"In the south, on the coast. The network of Zinuakeens does not yet cover the southwestern part of the desert, which makes it difficult to communicate with our relic hunters."

"It can't be worse than going back to the Oflovak Halt. We'll do it. I guess you agree, Azazor?"

"What should we deliver?" he asks in a grumble.

"A trinket."

"On one condition," Azazor replies. "We need a map of this detour."

"It might help… At least for knowing where to go.

"Of course you'll have one. I don't intend to send you to your death," says O'Teelo, a satisfied smile on his face.

The two Fyros, still sitting side by side across from the Trykeri, find it hard to hide their relief.

"While we're there, is there anything in particular you need us to bring back?" Eeri asks.

"Perhaps someone will give you another delivery mission, yes. It's up to you whether you take it or not. But as far as I'm concerned, I'm only hiring you for this delivery."

"akep. Uh… thanks."

"What I'm curious about is how you'll know that we made this delivery," asks Azazor… "What's this trinket?"

"I'll know, because if you do, there will be a new Zinuakeen."

Azazor nods, trying to hide his extreme interest in the 'trinket'.

"The object, in itself, is not particularly valuable. I would hate to lose it, of course. But the main problem is its delivery in those hostile lands."

Eeri prefers not to know what it is about, and is almost smiling in front of O'Teelo.

"So we're free to go?"

"If you want us to make this delivery, we're going to need equipment," cuts in Azazor.

Eeri chuckles slightly, well recognizing Azazor in this words.

"We can't ask for too much, can we?"

"I say that in the interest of the mission," says Azazor, taking a serious look."

"You are free to go back to the kitchen and work. I still have a couple of things to take care of on my end before you leave. Again, I'm not sending you to your death. You will have what you need to travel to the coast, both in terms of information and equipment. But it is mostly your resourcefulness that you will have to rely on." While saying so, O'Teelo puts Eeri's vial in his pocket.

"Be careful with the vial. And I must give you something else. On the one hand, an antidote. And on the other hand, a piece of advice… Never touch this dagger without first putting on a glove…" Eeri adds, shaking his head "… because I like you after all."

"What dagger?"

"The one in the box on the table there."

O'Teelo cautiously opens the box and observes the dagger. Eeri shows the palm of his hand again.

"This is a Matis weapon. And, in our regions, Matis are foolish enough to make weapons more dangerous to those who carry them than to those who are hit with them. There is no antidote for the poison of the handle."

"Um, okay. Now that our 'friendship' is sealed with a contract, can you tell me why you're traveling? Simply science and a thirst for adventure, truly?

"How much are you paying for this information?" Azazor asks.

Eeri sighs.

"Azazor… you are despairing."

"Eeri, we talk to hagglers here. So we haggle."

O'Teelo smiles.

"How much do you estimate its value?"

"A Marauder's armor. But we can negociate."

"A suit of armor? Um, I'm fine with that."

"One for of each of us, that goes without saying, since we each have a different reason for being here," adds Azazor.

"I don't mind. That's not a big deal."

"It's worth a lot to us. Home, we even have Marauders waging war to other Marauders for them to get. But I don't want to tattle…"

O'Teelo scratches her head.

"If it helps you understand why we have a bad opinion of you…" Eeri adds.

O'Teelo sits back in the chair and looks at the two Fyros with a concerned look.

"The Throat Cutters' Clan, the Black Sawdust Clan, the Ashes Clan, and more generally all the goons of Akilia, represent only themselves. Well… This is my opinion. That's not shared by all. One thing is however certain: Akilia does not represent, in her behavior at least, the whole of the Marauders. If by miracle, you find a way to reach the Citadel, you will be able to see that with your eyes. We are not savages. And I hate to think that some people think that about us, while in the east many of us are fighting day and night against the kitins."

The leader then rests her elbows on the table and lifts her chin toward Azazor.

"If I have your word, then it's okay," he says. "The reason I am here is to go to the lost city of Coriolis, in the desert of my ancestors. I want to find out the mystery of the Fire reported in our chronicles. I also want to study the kitins there, and of course make a map of the place. A little more too, even if I don't have too much hope about that: I would like to establish a first contact with the Marauders to discuss with them about a possible exchange of knowledge with the Empire."

Eeri speaks in turn, after a moment of spinning her words in his head.

"My reason will not be easy for you to understand, I imagine. Back home, I am a Trytonist. We are also called Elias seekers."

"I see," replies O'Teelo.

"I guess I have no reason to hide my beliefs here. I'm looking to verify some old theories, some evidence. Just like Azazor the fire of Coriolis, among others. Also to meet scientists, in the east. And… An old dream. I wouldn't want to die without having seen the city of Fyre with my own eyes. Or what's left of it…"

O'Teelo takes a serious look.

"You know that you have a very high likelihood of dying? The Oflovak Road is but a pleasure garden compared to what lies beyond the Citadel."

"We are Fyros," says Azazor.

"We'll see in due time," says Eeri, shrugging his shoulders.

"No, you are, above all, homins from the New Lands, used to being brought back to life by the Powers. Whether you believe it or not, thatt affects the way you act and think. I mean no disrespect, but you have grown up in an 'under-bubble' world."

"After several years on the Road, I can assure you that's changed", says Eeri.

"That's possible, yes, but the day when we'll back off has not yet come," adds Azazor.

"I speak with all the facts. I've seen the new generation, both in Sentinel and in the Citadel, start to get used to resurrection… It changes the way one looks at life."

"You have resurrection at the Citadel?" Azazor choked.

O'Teelo raises her eyebrows.

"Akilia and her goons would have brought the Marauders' resurrection system to the New Lands without it existing at the Citadel? That doesn't make any sense. Well, anyway…"

O'Teelo stands up, and walks towards the door, waving the guards to leave.

"… To the kitchens, you two!"

Eeri whispers to Azazor:

"It's Ostini who's going to make a face…"

"Yep, so much the better."

Eeri smiles with all his teeth. Azazor returns her smile.

"By the way Eeri, you are a very poor trader. The information about the dagger, you should have sold it…"

Azazor leaves the room whistling, followed by an Eeri too relieved to protest.

Edité 6 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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fyros pure sève
akash i orak, talen i rechten!
élucubrations
biographie

#34 Multilingue 

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Journal de bord d'Eeri
2620, été du troisième cycle.

Nous y voilà, nous repartons demain. Il s’est passé tant de choses ici que j’en ai oublié ce journal.
Pour résumer très vite… Des fois que je perde la mémoire.
Arrivés à l’avant poste. Ils ont pris notre viande, on a créché quelques nuits là à se demander ce qu’on pourrait faire, puis on s’est fait embaucher à l’auberge comme cuisiniers. On a commencé à planquer de la viande pour préparer le reste de notre voyage. Ils ont remarqué, Ostini, le chef des gardes, nous est tombé dessus. Azazor a eu l’idée brillante de raconter qu’on échangeait ça avec les akako akatorums contre un poison, En racontant qu'on a perdu celui qu’on avait emmené. Puis il a fallu que je montre mon poison à ce salopard d’Ostini, leur chef des gardes. Un matis. Bien entendu, il a tout de suite vu que ce poison ne venait pas des akatakomachins… Ensuite, celle qu’on prenait pour la simple tenancière de la taverne s’est révélée être la cheffe de leur clan. Elle nous a fait cracher le morceau, mais s’est montrée relativement compréhensive. Comme quoi, les maraudeurs d’ici, c’est pas comme ceux de chez nous. Ici, on peut parler.

Résultat, on a accepté de faire une livraison pour elle, pour repayer nos erreurs. Enfin, nos actions, pas nos erreurs. Ils ont eu la cordialité de ne pas nous balancer par dessus la falaise, ou quoi que ce soit d’autre. Sur le moment, la situation était assez excitante, je n’ai réalisé qu’après que l’on jouait vraiment avec nos vies.
La bonne chose, c’est qu’O’Teelo est prête à nous fournir en matériel pour ce travail. Des armures de maraudeurs, locales. Juste ce qu’il nous faut, pour espérer arriver à la Citadelle un peu plus inaperçus qu'avec nos tronches de fyros hébétés. Elle nous a filé une carte, le chemin à suivre semble simple, comme ça. Premièrement, longer la falaise vers le sud, pour trouver le point de livraison. Ensuite, là-bas, nous sommes censé rencontrer d'autres maraudeurs. Ils pourront nous en dire plus sur les danger qui nous attendent si nous décidons de suivre la grande chaine de montagne qui mène à Sentinelle. C'est ça ou faire demi tour, retrouver l'avant-poste et reprendre le chemin des Rangers.
Finalement, là est la moins bonne chose : quoi qu'on choisisse, on est contraint de faire un détour de plusieurs semaines, voire plusieurs mois...

Ce qu’on doit livrer? Je n’ai jamais vu un truc pareil. O’Teelo nous a ammené un petit coffret, et l’a ouvert devant nous. Elle sait bien que notre curiosité nous aurait poussés à l’ouvrir, de toute façon. Elle a sorti avec précaution trois objets, aux bords un peu verdâtres, ornés d’un coté d’inscriptions étranges, brillantes. Des lignes, dans tous les sens, des points. De près, j’ai remarqué qu’il s’agissait de motifs gravés, pas seulement dessinés. Les points sont de tout petits picots, incrustés. De l’autre côté, comment décrire… une multitude d’ornements, de petits objets, agglutinés les uns aux autres. Comme des éclats de bijoux de différentes couleurs, reliés par de petits fils brillants. Des rectangles, des cercles. À première vue quelque chose de chaotique, et pourtant laissant apparaître une organisation incroyable, chaque élément semblant trouver sa place. Comme s’il s’agissait d’une ville miniature.

O’Teelo les a rapidement enveloppés dans des étoffes de fibres, pour les caler dans le coffret, nous recommandant de ne pas l’ouvrir. Pas trop souvent, en tout cas. Elle pense que le vent et la sciure du désert pourraient les abîmer. On a promis d’en prendre soin. J’ai alors demandé : c’est Karavan, non?
La Trykette m’a alors regardée d’un air affligé : "Non, ça a été pondu par un Lumper". Azazor n’a pas perdu une occasion de se moquer de moi, avant qu’elle nous fasse signe de la suivre vers l’étable en emmenant le coffret. J’aurais voulu lui poser plein d’autres questions, mais ma première ayant été d’une bêtise totale, je n’ai pas osé en rajouter. Quand même, des fois je ferais mieux de fermer ma gueule.

Elle nous a sorti des armures. Couleur de la sciure du désert, rutilantes. Une à Azazor, une à moi. Déjà utilisées, visiblement, mais d’incroyable facture. On a négocié ça. Enfin, Azazor a réussi à négocier... Il m'a bluffée, là dessus. Ah oui, j’oubliais, avant ça, on a du aller chercher le fameux stock de viande. On s’est quand même sentis comme deux crétins, même si on était soulagés de l’issue de tout ça. Au final, on a même cru comprendre qu’ils allaient nous regretter en cuisine.

Il me faut écrire ça, aussi : je dois admettre que je me suis trompée. Nous nous sommes tous trompés. Les maraudeurs ici n'ont rien à voir avec ce à quoi on s'attendait. Akilia n'est qu'une cheffe de clan parmi d'autres, et tous ne reconnaissent pas son autorité, ni son combat, ni ses idéaux. Loin de là. La guerre qu'elle mène n'est pas la guerre des maraudeurs des Anciennes Terres.
Barmie le savait, sans doute. Je ne peux plus me souvenir de s'il nous l'avait dit, mais nous étions sans doute trop sûrs ne nous, de notre savoir, nous ne l'aurions de toute façon pas cru. Quoi, des maraudeurs qui ne sortent pas leur masse pour régler le moindre problème, qui savent écouter, et plus inquiets de contenir la menace kitin que de s'occuper des pitreries de nos empires des nouvelles terres. Presque des rangers, en fait. À croire qu'il s'agit des mêmes. Nous n'avons croisé que peu de rangers, jusque là.

Nous allons de surprise en surprise. Barmie nous avait prévenu des frahars du désert. Il s'agit surtout de Fraiders ! Je garde la hache que je tiens de ceux des nouvelles terres à mon ceinturon, mais je n'ai hélas pas eu le temps de créer de lien de confiance avec aucun d'eux. On en croisera sans doute d'autres dans le désert. Je dois en savoir plus sur eux.

Ah, tiens, et Azazor a décidé d'envoyer toutes ses notes vers Pyr. Je pense que c'est idiot, il a plus de chance de se les faire voler ou que le porteur se fasse bouffer par n'importe quelle bestiole sur le chemin. Je lui ai dit de faire une copie. Pas le temps pour ça, qu'il me dit. Tiens, ça me fait penser que les lettres que j'avais confiées au phare sont peut-être arrivées. J'espère qu'ils vont tous bien.

Pour résumer... En fait, non, il n'y a pas grand chose à résumer. Juste à se remettre en route.
Si. Je dois ajouter... et avouer : j'aimerais tant passer plus de temps avec les homins d'ici, découvrir les richesses et leur savoir, les comprendre mieux. Revenir un jour vers les nouvelles terres avec leur message. Mais allez, ce n'est pas le moment de s'arrêter, nous sommes si près de notre but. Un nouveau désert nous attend.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#35 Multilingue 

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Journal de bord d'Azazor

Je me suis résolu à envoyer vers les nouvelles terres tous mes rapports depuis Fort-le-Phare jusqu’à notre départ de l’Avant-Poste Diplomatique. Sur les conseils d’O’Teelo, je les ai remis à un ranger de confiance qui devait aller à la Halte. Espérons que tout se passe bien. La route dans la Mer de Bois est bien plus risquée. Au pire tant pis si le paquet se perd. Toutes les informations qu’on a récupérées sont dans ma tête et je jure de revenir vivant pour les raconter un jour.

Bref, comme déjà expliqué dans mon précédent rapport, nous avons trois artefacts à livrer aux maraudeurs installés près de la Grande Flaque au sud. Ils sont censés servir à la construction d'un zinuaken dans la région. Les marauds sont en contrebas d'une falaise. Mais a priori, il n'y aura pas de monte charge ou d'escalier. Donc ce sera escalade, sueur et huile de coude. S'ils se sont installés en bas, sans moyen pratique pour descendre, ça ne veut dire qu'une chose: que la région est très dangereuse et que c'est pour eux un moyen de se défendre.

Je vais tenter de décrire au mieux ces artefacts qui me rendent vraiment mal à l’aise. Déjà, on voit tout de suite que ce ne sont pas des créations homins. On dirait des sortes d’écailles de dragon vertes et oranges, sur lesquelles sont peintes ou peut être gravées des lignes qui se croisent et s’entrecroisent. Incrustés sur les écailles il y a des trucs noirs carrés, ronds ou rectangulaires et des sorte de coulées brillantes, durs et froides qui les relient à l’écaille. Eeri parle de bijoux. Pour moi, on dirait des pustules noires d’une créature innommable suintant un liquide gris et brillant qui se serait solidifié. Il y a aussi quelques symboles dessus. Des lettres, des chiffres, mais sans aucun sens. Des symboles qui insufflent la vie comme pour les foreuses kamis ? Mais ça n’a rien de kami. Rien que de toucher ce machin ça me dégoûte. Au moins, je n’ai pas vu de traces de goo dessus. Je note tous les symboles sur une page à part et je tente un dessin du plus gros artefact, pour vous donner une idée. Mais vous savez mes talents pour le dessin…

Extrait du dessin d'un des artefacts.


On nous a pas dit le nom de ces trucs, O’Teelo se contentant d’appeler ça une babiole. En tout cas, c’est pour moi clairement karavan. Je ne vois pas les maraudeurs créer ce genre d’artefacts. Il va falloir que j’en sache plus sur le lien entre marauds et kara. Sur les NT, il y a parfois des alliances de circonstances pour les batailles d’Avant-Postes. On peut imaginer qu’ici ce soit là même chose. La karavan fournissant la technologie pour fabriquer les zinuaken en échange de ressources récoltées par les marauds. Une rumeur que j’avais entendue autrefois parlait de dissidents de la karavan. Eeri en sait peut-être plus sur le sujet. Bref, tout ça renforce l'hypothèse d'un fyrak mécanique de la karavan dont les écailles seraient ce genre d'artefact, même si ici il ne s'agit pas de dragon mais d'un zinuaken.


Pour changer de sujet, laissez-moi vous décrire brièvement le désert que nous parcourons. A première vue, il n’y a pas de différences avec le désert impérial. Même dunes, même sciures, même plantes, peut être un peu plus chaud. Des olash, des olansis, des savaniels, des botogas qui nous aident à ne pas trop puiser dans notre stock d'eau. On n'a pas encore vu de Bothaya. Je présume que la présence de la grande flaque pas trop loin permet une hydratation des sous-sols qui empêchent son apparition. Mais je sais plus, je dois confondre avec une autre plante. J'aurai dû mieux suivre les cours de botanique à l'Académie. Il n'y a pas de papalexi non plus sur la route pour l'instant. Et pas croisé de loojine également. Il parait qu'ils sont de la même famille. Ceci explique peut être cela... Concernant la faune, pour l'instant on a seulement croisé au loin des varinx. D'après les maraudeurs, nous ne devrions pas croiser de Fraiders, ne passant pas sur leur territoire. Cela semble déplaire à Eeri, mais qu'elle se rassure, ce sera pour le chemin du retour, dans quelques années.
Par ailleurs, j'ai stocké dans une bourse une petite partie de sciure pour analyse ultérieure, quand je rentrerai. Si le maitre xylologue Ulyton Meros accepte de se pencher dessus, on aura peut être une surprise.
Ah oui, un point intéressant à noter: l'astre du jour est bien plus haut que dans les Nouvelles Terres. C'est un fait. J'ai pu le mesurer avec le sextant. Je note toutes mes mesures sur une page à part. En estimant le nombre de kilomètres parcourus vers l'Est, je pense qu'on peut donner une estimation de la courbure d'Atys. Mais n'étant pas doué pour les calculs, je laisserai ça au soin des maitres de l'Académie à mon retour. Est-ce que le fait qu'il fasse un peu plus chaud viendrait de là, les rayons arrivant moins obliques que dans les Nouvelles Terres? Plus nous avonçons sur la route, plus je découvre de choses, mais plus je me pose de nouvelles questions. La quête de la Vérité est un chemin infini.

Nous devrions arriver au point de rencontre d'ici quelques jours. En espérant ne pas se faire bouffer par un varinx d'ici là...


Journal de bord d'Azazor

Ce qui devait arriver arriva. Ce matin, nous avons croisé un groupe de quatre homins accompagnés d'un varinx. Ramèch! Un varinx de compagnie! Une bête magnifique, aussi haute qu'un homin. Un peu comme Aen chez nous. Sauf que ce n'était visiblement pas des maraudeurs. Ils ne se sont même pas présentés. Ce ne sont pas des Atakorum en tout cas, mais sûrement une énième tribus de nomades du désert. Ils ont exigé qu'on leur laisse tout notre bardage et le mektoub en échange de la vie sauve. On a essayé de négocier un peu de viande pour eux et leur varinx, mais rien à faire, c'était la totalité de nos affaires si on voulait pas, je cite: "finir dans le ventre de Razor". J'ai présumé que c'était le nom du varinx. Toujours est-il qu'on pouvait pas se permettre de leur filer l'objet de notre quête. Il y allait de notre honneur. Alors pour la première fois depuis notre départ de Silan, on a du se battre contre des homins pour sauver nos vies.
Résultat: on en a tué deux et le varinx, les deux autres se sont enfuis. Enfin... Eeri a tué le varinx, un homin et en a blessé un autre grièvement. Moi je me suis contenté de l'achever, récoltant au passage une belle entaille à la cuisse droite quand la pique d'un homin a réussi à perforer l'armure maraudeur au niveau d'une jointure. Sans Eeri, c'était mon thorax qu'il transperçait. C'est une vrai furie quand elle se bat celle-là. Je l'avais déjà vu faire dans les Nouvelles Terres. Mais jamais avec autant de rage et de détermination. On aurait dit une déesse de la guerre. Lopyrèch m'avait prévenu, cette homine est dangereuse. Heureusement que je suis son ami. Enfin, je crois.

Bref, aujourd'hui, j'ai tué un homin. Je veux dire, définitivement. Ce n'est pas du tout la même chose. Je ne l'avais pas encore remarqué jusque là, mais quand on tue quelqu'un d'habitude, on sait toujours au fond de nous que ce n'est pas, ou rarement, une véritable mise à mort. Là, quand j'ai planté ma hache dans le crâne de mon ennemi, j'ai su qu'il ne s'en relèverait pas. C'est comme si j'avais aspiré son âme. Je me suis senti sale. Cela m'a rappelé la mort d'une crise cardiaque du celiakos Lyan Cexius après qu'il se soit énervé contre moi. Sur le coup, j'ai ressenti une certaine culpabilité. Sauf que cette fois, je ne peux pas me rassurer en me disant que l'homin était très âgé et que son heure était venue. Je suis responsable du coup de hache qui l'a terrassé. J'ai pensé alors à nos ancêtres qui, au combat, devait vivre ça de nombreuses fois.

Tout s'embrouille dans ma tête, j'ai plein de pensées contradictoires. C'est vraiment un autre rapport à la vie.
Comme nous sommes devenus faibles à cause de la protection des puissances! Comme nous avons perdu tout cet aspect, je dirais, philosophique! Tous les guerriers, et moi le premier, nous nous trompons depuis le début. Tuer n'est pas une chose anodine. C'est un véritable pouvoir qui peut rendre fou. Celui-ci nous a été ôté par la résurrection des puissances. C'est désormais elles qui ont ce pouvoir. Et je ne suis pas sûr que ce soit forcément un bien.


Journal de bord d'Azazor

Décidément, c'est la loi des séries. Aujourd'hui, alors qu'on avançait tranquillement vers le sud, je suis tombé dans une crevasse. Une belle chute d'une dizaine de mètres. C'était pourtant pas marqué qu'il y a des crevasses dans le coin. C'est censé être plus loin, vers l'est. Bref, on a bien passé une heure pour qu'Eeri parvienne à me remonter à l'aide d'une corde et du mektoub. Soit disant j'étais trop lourd. Ce doit être le sac, il est chargé de cuir de varinx, ça pèse son poids. On va devoir redoubler de prudence. Autant on a aucun mal à se soigner ici, contrairement à la Mer de Bois, mais on n'est pas immunisé à la blessure mortelle. S'il y a des crevasses de dix mètres de profondeurs, on peut imaginer qu'il y en a de bien plus profondes. J'ai beau être résistant, je ne suis pas incassable.

Edité 3 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#36 Multilingue 

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Eeri s’arrêta de tirer sur la corde et fit signe au mektoub de s’arrêter. Puis elle s’assit, ignorant les gémissements qui résonnaient sur les parois, pendant un moment.

— Arrête de gesticuler, cria-t-elle finalement !!
— Mais alors qu'est-ce que tu fais? Remonte moi !
— La corde est coincée, ne bouge pas. Je gère.

Eeri resta sur place, sans bouger, un oeil sur la hache qu’elle avait posée à terre plus tôt, alors qu’elle sortait une corde en catastrophe pour secourir le fyros.


Il suffirait d’un coup sec, murmura-t-elle. Comme pour les frippos.

Le laisser là? Azazor avait bien failli les faire tuer.

L’hésitation. En combat, on hésite jamais. On frappe, là où l’on sait que l’ennemi aura mal. Mais non. Lui, une hachette à la main, il se contente de parer les coups, sans contre attaquer.

Contre une pique, c’est quitte ou double. Armé d'une hachette, on peut profiter de la longueur de l’arme adverse et du moment d’inertie après l’attaque pour lancer un coup où ça fait mal. En l’occurrence, au niveau de la ceinture, ou au niveau du cou. Deux fois il a eu l’occasion de frapper. Il s’est contenté d’attendre, laissant à ses adversaires les secondes nécessaires pour comprendre ses mouvements. Enfer de fyrak de ramèch, je n’aime pas frapper les homins de dos. Mais là, c’était ça ou laisser Azazor se faire transpercer une fois de plus.

Les deux restants, sans doute plus jeunes, se sont contentés de partir en courant lorsqu’ils ont vu le second homin s’écrouler. Ce n’est pas bon signe, ça veut dire que s’ils ont pu aller alerter leur tribu, on va se retrouver avec d’autres homins sur le dos. Si Azazor avait pu s’en sortir seul contre son adversaire, j’aurais pu me faire les deux autres. Un coup de hache bien placé, et on poursuit l'autre et le termine à la dague. Mais non, j’ai du faire volte face pour sauver Azazor. Quel gâchis.

Et quand j’ai dit qu’on devait s'attendre à ce qu'ils rameutent leur tribu... Il n'a rien dit, mais il doit sans doute paniquer, et maintenant il ne regarde plus où il pose ses pieds. S’il me refait le coup, là où on va, je vais me faire tuer, c’est sûr. Alors pourquoi pas le laisser là? Mais non, quand même, je vais devenir folle, si je continue seule. On est arrivés ici à deux, on doit continuer à deux. Et puis si la corde doit péter… Remarque, un coup sec… Non, quand même. Mais…


— Qu’est-ce que tu fous ???

La beuglante du fyros sortit Eeri de ses pensées. Elle se leva en soupirant, donna une grande tape sur le cul de Run-dun, et se remit à tirer sur la corde.

— Ça vient, ça vient. Tu pèses ton poids, tu sais…

Edité 2 fois | Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
"Quand on a le nez trop près de la bouteille, on ne voit plus le bar"

#37 Multilingue 

Multilingue | English | [Français]
Quelques jours plus tard, les deux homins marchaient toujours à quelques mètres du précipice, afin de garder une bonne vue sur ce bout de désert, en contrebas. Le paysage changeait peu à peu, devenant plus vallonné, comme si des racines sous le sol poussaient et sculptaient la sciure. Au loin apparaissait dans la brume ce qu'O'teelo avait appelé "Umawaka" : une chaîne de montagnes infranchissable, un enchevêtrement de gigantesques racines qui délimitait ce désert au sud, et qui, si l'on en croyait la carte de la cheffe de Clan, s'étendait jusqu'à la Citadelle . À chaque pas qui les en rapprochaient, cette cordillère leur paraissait de plus en plus gigantesque, semblant sortir des entrailles d'Atys. Par endroits, des pics d'écorce nus et acérés se dressaient vers le ciel. En d'autres, ils étaient couverts de végétations, à tel point qu'il se demandèrent s'il ne s'agissait pas des départs d'une canopée en devenir.

Le point de rendez-vous ne devait plus être bien loin, comme elle l'avait décrit à proximité de cette montagne, en contrebas. Ils s’arrêtèrent un moment afin de scruter l’horizon et le désert, dans l'espoir de déceler un village ou n'importe quelle trace de vie homine. Eeri s'approcha dangereusement du bord, afin d'observer la paroi de la falaise qu'ils surplombaient.

— Azazor?
— Hmmm?
— Tu réfléchis trop. Si tout ça doit se reproduire, dis-toi qu’il s’agit d’eux ou de nous.
— Je n’étais pas préparé à me battre. Pas de cette façon.
— La prochaine fois, frappe. Pare, et frappe. Là où ça fait mal, là où tu n’aimerais pas recevoir un coup.
— Ça va, ça va, je sais.
— La surprise, la rapidité. Eux, s’ils se battent, ils savent que c’est définitif. Ils n’hésiteront pas.
— Mais la contre-attaque suppose une prise de risque. C'était pas dérangeant chez nous, mais ici... Comment as-tu fait pour rester aussi froide?
— Pendant des années, je me suis appliquée à apprendre à me battre de façon à ne plus faire appel aux puissances. Dans l’idée qu’un jour peut-être les trytonistes arriveraient à libérer l’hominité. Garder l’esprit froid et analytique est la première des choses.
— Tu y crois toujours? La liberté?

La fyrette se redressa et fit quelque pas pour s'éloigner du bord.

— Non. Je n'ai plus d'espoir pour les nations. Maintenant, je crois qu’il suffit de partir. Ou devenir ranger… Ou maraudeur. Ça revient peut-être au même. Mais la liberté, non. Ça n’existe pas, même ici.

Azazor hésita un moment :

— Mais alors, tu ne crois plus en rien…?
— Je crois en la survie. Je crois que si tu mets de nouveau ce voyage en péril, je te laisserai en plan et continuerai seule.
— Tu quoi???
— Mais je t’aime bien quand même. Je n’aurais pas pu aller aussi loin toute seule.
— Hrmf… Mouais. akep.
— Et le problème de la solitude, c’est qu’on a plus personne à blâmer pour les conneries qu’on fait.

Après ces mots, Eeri s’assit en souriant.

— Allez détends-toi. J’ai un truc à te proposer, concernant la livraison.

Azazor ne bougea pas, continuant à scruter l'horizon.

— Je t’écoute.
— Vu la falaise, s’il n’y a pas de chemin, on ne peut pas risquer nos mektoubs.
— Tu veux donc descendre seule. Je savais que tu allais proposer ça.
— C’est moins de risques.
— Et si tu reviens pas?
— Ou tu descends, et je garde les mektoubs. Ça me va aussi.

Azazor grogna quelque chose d'inintelligible, les yeux toujours rivés au loin. Eeri en rajouta une couche, grinçante :

— Mais j'ai vu ton talent pour escalader...
— On en reparlera quand on verra où il faut descendre, répondit Azazor en remettant son sac sur le dos.
— T'as raison. Ne traînons pas.

Les deux fyros reprirent la route vers le sud, sans même jeter un oeil derrière eux pour savoir s'ils étaient suivis ou non. Le vent du soir commençait à souffler, mais ils purent encore marcher pendant quelques heures.

Dernière édition par Eeri (il y a 2 ans). | Raison: Traduction en Anglais par Nilstilar / English Translation by Nilstilar

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Eeri
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#38 Multilingue 

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Devant le désert qui s’offre à lui, Azazor ne peut s’empêcher d’avoir une bouffée de nostalgie pour son désert, celui qu’il a quitté voilà de ça des années. La sciure parait moins fine ici, où est-ce ses souvenirs qui s’embrouillent? Le vent, venu de l’est, semble s’engouffrer vers le bas de la falaise, faisant s’agiter les deux mektoubs attachés un peu plus loin. Leurs meuglements semblent répondre au sifflement du vent dans une sorte de complainte lugubre. Jamais il n’a ressenti la mélancolie dans son désert. Mais ici, tout est différent. À la fois si loin de ses proches, et si près de ses ancêtres.

Cela fait trois jours qu’Eeri est partie. Trois jours qu’il l’a vu descendre en rappel la falaise, accrochée à une corde dont elle a pris soin de vérifier l’attache à la racine sortant de la sciure avant de s’y harnacher. Comme si elle avait fait ça toute sa vie. Reviendra-t-elle ? Les maraudeurs de ce clan sont-ils aussi amicaux que ceux de l’Avant-Poste Diplomatique ? D’ailleurs, amicaux, c’est un bien grand mot. Disons plutôt civilisés. Avec un certain sens de l’honneur. Il n’y a a priori pas de raison qu’Eeri soit mal reçue. Elle leur apporte des « babioles » pour faire fonctionner leur zinuaken.

Leur campement s'est installé dans l'épave d'un gros vaisseau de la karavan. Celui-ci fait bien cinquante mètres de long vu d'ici. Comment a-t-il été détruit? Difficile à dire. Les kitins seraient-ils capables de cela? Ou les kamis? D'ailleurs, l'épave, à ce qu'il peut en voir, doit dater du premier essaim. Une partie semble enfoncée dans la sciure, ou disons plutôt recouverte par elle. De loin, la carcasse du vaisseau parait bien sombre. Il est incapable de reconnaitre un des vaisseaux visibles dans les Nouvelles Terres. Peut-être s'agit-il d'un ancien modèle, jadis utilisé dans les Anciennes Terres et aujourd'hui tous à l'état de ruines, pour il ne sait quelle obscure raison. Après l'épave au nord de Fort-le-Phare sur laquelle les rangers ont récupéré de quoi faire le système d'éclairage du phare, c'est la deuxième ruine de vaisseau de la karavan dont il prend connaissance, et la première qu'il voit de ses yeux. Ici, la karavan semble bien fragile, comme en décrépitude. Les kamis aussi d'ailleurs, il n'en a pas entendu parler. A croire que les puissances ont toutes déserté ces lieux. Seul survivent les homins, se réapropriant les ruines du passé, bâtissant de nouvelles cités, ne perdant pas espoir. Il avait décidément mal jugé les maraudeurs. Du moins ceux d'ici.

Eeri doit être là-bas avec eux, sûrement dans une des pièces du vaisseau réaménagée en lieu de vie, à siroter un baba ou à boulotter un morceau de varinx grillé au feu. Peut-être sont-ils en train de rire, de se dire qu’ils ont bien de la chance de l’avoir croisée, qu’elle leur apprendra à cuire la viande, qu’ils ont bien besoin d’une bouchère, qu’elle pourrait rester… Il ne lui en voudrait même pas. Il sait que ça viendra. Il a vu son regard quand elle a parlé de ces homins, de la rudesse de la vie ici. Ça lui plait. Ici, bien qu’elle le nie, elle se sentirait enfin libre. C’est la vie qu’elle a toujours rêvée. Alors pourquoi continuerait-elle de s’encombrer d’un gros balourd de fyros incapable de terrasser un simple bandit ? Il ne la mérite pas.

Azazor observe les dunes derrières lui. Des dunes déjà bien sombres, se détachant comme des silhouettes du ciel couleur pourpre. C’est de là qu’ils viennent. Si on les a suivis, c’est de là que viendra l’attaque. Trois jours qu’il redoute qu’ils lui tombent dessus. Si ça devait arriver, il ne combattrait pas et laisserait les mektoubs pour descendre par la corde. Autrefois, il serait resté pour combattre, en gueulant du cal i selak à plein poumon, cognant sa hachette contre son bouclier, sûr d’être un guerrier d’exception, certain de pouvoir tuer fyrak lui-même, car la peur de la mort ne faisant pas encore partie de ses concepts. Mais plus maintenant. Depuis l’épisode de Titus, et surtout, depuis son combat avec ces bandits, il sait ce que mourir veut dire. Et ça le hante. On pense être courageux, mais on ne sait pas ce que c’est tant qu’on n’est pas réellement passé près de la mort. Ce qu’il espère, c’est qu’un jour il sera lui aussi capable d’affronter la mort, de la défier en frappant sur son bouclier. Comme Eeri… Eeri qui ne reviendra pas. Car il n’a plus rien pour lui. Pas même le respect de la Vérité. Et elle le sait maintenant, depuis qu’il lui a dit son secret, son mensonge, qu’il traîne comme un fardeau depuis des dizaines d’années…

Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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#39 Multilingue 

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5 jours plus tôt, alors qu’Eeri et Azazor se sont arrêtés à l’ombre d’une dune pour manger leur ration du midi et faire une pause...

— Eeri, faut que je t’avoue un truc.

La fyrette lève ses yeux de sa patte de yubo grillée, l’air rieur.

— Quoi ? Tes parents étaient matis ?
— Je parle sérieusement.
— Oh… Allez je t’écoute.

Le fyros prend une grande respiration, comme s’il s’apprêtait à révéler quelque sombres secrets. 

— J’ai menti... une fois.
— Hahaha, juste une fois ? Ben ça va alors, s’exclame la fyrette, soulagée.
— Non, mais j’ai menti une grosse fois.
— C’est-à-dire ?
— J’ai fait croire à quelqu’un que j’étais son père.

Eeri reste muette, les yeux écarquillés.

— Y’a eu cette petite trykette, trouvée par des rangers à Silan. Galdor, un ami de mes parents et qui m’a élevé à la mort de mon père, l’a recueilli et élevé comme sa fille. Quand j’ai appris son existence, alors qu’elle avait une dizaine d’années, j’ai eu une idée.

La fyrette fait un moulinet de la main, comme pour dire au fyros de continuer.

— Je me suis dit qu’à cet âge, c’était aisément manipulable. Alors avec Galdor, on a commencé à raconter une toute autre histoire. Lui à son contact et moi par lettres. Comme quoi j’étais son vrai père, mais que je pouvais pas l’élever car j’avais trop de travail. Et que sa mère avait été tuée par des matis. Que l’Empire c’était ce qu’il y a de plus beau, de plus grand. 
— Un bel endoctrinement quoi…
— C’est ça. 
— Et elle est devenue quoi cette trykette ?
— Je lui ai confié une mission à ses seize ans. Celle de s’infiltrer dans le royaume et de me transmettre des renseignements.

Eeri lève les sourcils, surprise.

— Une espionne en quelque sorte ?
— Oui. Je pensais pas qu’elle y arriverait aussi bien. Avant qu’on parte, elle avait réussi à devenir sujet du royaume et envisageait de devenir servante auprès d’une maison noble.
— Tu veux dire qu’elle espionne encore ?
— Ouep, du moins quand je suis parti c’était le cas. Je lui avais dit de transmettre ses futurs rapports à Naveruss.
— Grosses cuisses est au courant ? Et ben...
— Le pire, c’est qu’elle pense toujours que je suis son père. J'ai trahi un pilier fondamental de l'Empire en lui mentant.
— Si la vérité était vraiment la valeur de l'empire fyros, il se serait déjà écroulé. L'important, parfois, c'est juste de croire en quelque chose. La vérité, j'ai abandonné depuis longtemps.

Sur ces mots, Eeri prend un air pensif et ne dit plus rien, se contentant de tourner entre ses doigts la cuisse de yubo à moitié rongée. Elle aussi aurait des choses à avouer. Le fyros le remarque et la regarde avec insistance.

— Tu as des choses à me dire? Je te sens soucieuse.
— dey, je pensais juste à notre ancien chez nous, ment la fyrette. 
— Ah...

Azazor touille la sciure au sol avec son pied. Lui aussi pense beaucoup à son ancien chez lui. 

— Du coup, t'as jamais eu envie de lui dire la vérité, à ton espionne? reprend Eeri. 
— Si, plusieurs fois je me suis dit que je devrais lui dire. Mais à chaque fois, elle me donnait de bons renseignements. Je me disais que si je révélais la mascarade, elle le prendrait mal et arrêterait son travail. C’est qu’elle est douée en plus.
— Oh tu penses qu’elle va mal le prendre si tu lui dis que le type qu’elle pense être son père depuis des années est en fait un imposteur qui la manipule ? Je vois pas pourquoi tu dis ça…
— C'est bon, arrête avec l’ironie. J’ai assez mauvaise conscience comme ça. Le pire, c’est si je lui dis et qu’elle se mette à parler...
— T’as peur de quoi ? Que les matis t’en veulent ? Je te rassure, c’est déjà le cas. T’as quand même insulté la mère du roi devant son fils le jour de ses funérailles. Alors qu’ils apprennent que t’as cherché à les espionner…
— Mouef… 

Azazor reste pensif quelques instants, gardant les yeux baissés vers la sciure. La honte le ronge, le mensonge étant pour lui comme une souillure. Finalement, après un temps silencieux, il relève la tête et regarde Eeri droit dans les yeux.

— Si je meurs, tu lui diras ?
— Que t’es pas son père ? 
— ney. Elle s’appelle Be’Lauren. 
— ney, compte sur moi. Mais tu lui diras toi-même, car tu vas pas mourir.
— Si tu le dis…

Oui, il lui dira tout. Quoi qu'en dise Eeri, la Vérité est sacrée. Sans ça, le peuple fyros n'a plus qu'à se laisser mourir.

Edité 3 fois | Dernière édition par Azazor (il y a 2 ans).

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