ROLEPLAY


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#1 Multilingue 

Multilingue | [Français] | English
L’obscurité empêchait les gardes dynastiques de bien discerner ce qui se passaient à l'extérieur de la cité. Malgré les lumières, ils ne voyaient pas plus loin que le bout de leur masque l'extérieur de l'enceinte de Min Cho. Un vacarme anormal se faisait entendre. Gia’suki courait vers l’entrée sud avec un groupe de kinchers à ses trousses. Elle était disposée à tenter le tout pour le tout. Elle chargea Gei Be-Pian, le garde qui se trouvait au milieu de l'entrée en rugissant comme un vorax. Les gardes se mirent en formation pour lui bloquer le passage puis découvrirent avec horreur qu'elle avait apporté dans son sillon une compagnie des plus désagréables. Elle leva son énorme massue et la lança en direction de son opposant qui pivota pour l'esquiver. Une fois le passage ouvert, elle se cacha derrière les bâtiments, à l'abri des renforts qui accouraient aider leurs semblables.  L'antekami se recroquevilla au dernier endroit où les gardes la chercheraient: derrière un tran directement à côté de l'autel kami. Elle resta tapis dans l'ombre, abritée par les herbes hautes durant plusieurs heures, le temps que la situation se calme un peu. Elle entreprit de se déplacer jusqu'aux geôles mais s'arrêta lorsque deux kwais se matérialisèrent devant ses yeux. Décidément, le vent tournait en sa faveur pour une fois. Elle attrapa le mâle et lui mit une dague sous la gorge, l'homine qui l'accompagnait la reconnut instantanément. 

-Gia'suki, qu'est-ce que tu fais ?!
-Chuuuttt ba'kwai, si tu fais du bruit, je saigne ton petit copain comme un bodoc. Tu sais que je le ferai.
-Je ne suis pas un bodoc! Je suis un timari! Et à quoi vous jouez?! Demanda l'homin.
-C'est ça mon izam, c'est un jeu et le meilleur car tout le monde peut gagner.
-Gia'suki, laisse partir Hiro, kai'bini.
-Mais bien sûr Lai'suki, tant que tu laisses partir les Antekamis qui sont en taule. Ça me semble honnête non ?
-C'est hors de question !
-T'en es sûre ?

Sur ces mots, la volumineuse zoraï fit légèrement glisser sa lame le long de la gorge de l'homin qui, pétrifié, n'osait même pas se débattre, et ne pouvait, de toute façon, qu'à peine bouger sous l'imposante étreinte de sa ravisseuse.Une entaille, peu profonde pour le moment, se dessina sur la peau bleu d'Hiro. La sève commençait déjà à ruisseler sur son torse nu, abondamment.

-Arrête, kai'bini…
-Et toi arrête de chouiner ! Tu sais ce que tu as à faire !
-Comment veux-tu que je fasse une telle chose?!
-Tu es initiée des débilos théocrates, baka. Si tu demandes à entrer dans les geôles, pour, je sais pas moi, accompagner un prisonnier sur le chemin de la béatitude éternelle Ma'Dukienne, ils vont sans doute te laisser passer. Raconte-leur ce que tu veux. Fais-en sortir au moins un, pour prendre l'air. Si les gardes s'énervent, je les découpe en cubes à ragoût.

-Soit… je t'aiderai, mais laisse moi faire sinon ça va attirer l'attention et nous nous ferons tous prendre. On doit neutraliser silencieusement les deux gardes à l'entrée des geôles. 

Lai'suki sortit de l'ombre et lança un sort de sommeil au premier gardien. Lorsque le deuxième se retourna pour voir ce qui se passait, elle lui donna un coup dans le ventre avec le pommeau de sa hache. Le souffle coupé, il se plia en deux et elle le ligota avec des cordes de dorao puis le bâillonna avec un morceau de fibre de buo. Elle répéta l'opération avec le deuxième garde avant qu'il sorte des vapeurs et déplaça les corps dans l'ombre. Elle fouilla les deux zorais et prit leurs clés. 

-Oh...Lai' a boké les gardes, c'est pas sage ça… Murmura Hiro, stupéfait.
-N'est-ce pas ? Tiens j'ai quelque chose pour toi mon izam. Gia'suki esquissa un sourire malsain sur son masque. 

Après plusieurs longues minutes de silence, Lai'suki sortit avec un homin, maigre, qui peinait à se tenir debout et marcher. Elle le supportait et l'entraîna près de l'autel Kami. Gia'suki s'emballa et lâcha son prisonnier. 

-Dounlor, qu'est-ce qu'ils t'on fait ?! Ah les salauds, ils t'ont laissé crever de faim, ces fumiers !  

L'homin ne répondit pas, il était trop faible et confus pour réaliser ce qui lui arrivait. Gia'suki le prit dans ses bras, il ne pesait presque rien. Lai'suki prit Hiro par la main et décida qu'il était temps de s'éclipser. 

-Un instant. Tu ne penses pas me fausser compagnie alors que j'ai besoin de toi plus que jamais, Initiée.
-J'ai fait ce que tu m'as demandé, débrouille-toi pour sortir toute seule et je te déconseille d'essayer de porter la main sur Hiro une deuxième fois.
-Yui, je me doutais bien que tu réagirais comme ça...c'est pourquoi j'ai empoisonné ton drôle d'izam ! Sourit l'Antekami.
-Tu as fait...quoi?! Grogna Lai'suki, furieuse.
-Mais yui, pauvre poko. Je vais te dire comment le soigner lorsque nous serons tiré d'affaire mais on a pas beaucoup de temps. Je te jure, regarde-le. Oh la la, il n'est pas beau à voir! Railla l'énorme homine.
-Alors on fait quoi ! On ne va quand même pas passer par la porte d'entrée devant tout le monde !
-Passer par la porte d'entrée...yui, c'est exactement ce qu'on va faire. On va laisser l'izam là, on en a pas besoin pour le moment. Je vais créer une diversion à la porte sud et toi tu vas sortir par la porte nord. Pars à dos de mektoub et si les gardes t'interpellent, tu n'auras qu'à prendre la fuite et semer ces abrutis.
-Je peux aussi m'en remettre aux soigneurs dynastiques pour la santé d'Hiro.
-Ce serait sans doute vrai mais le temps qu'ils étudient son cas, il aura eu le temps de mourir trois fois, vas-tu prendre ce risque ? Le temps file, Lai'suki. 

L'homine regarda Hiro puis se résigna à aller chercher une monture. Elle aida l'Antekami à percher Dounlor sur le mektoub et avancèrent tranquillement. Lorsque les gardes les interceptèrent, elle chargea directement et entendit les gardes crier derrière elle et se lancer à sa poursuite. Malheureusement pour eux, elle avançait trop rapidement et ils finirent par perdre sa trace. Lai'Suki chevaucha jusqu'au Bosquet de l'Ombre et y trouva Gia'suki. L'homine était dans un sale état, le sang coulait sur son masque, suivant les crevasses laissées par les mutilations qu'elle s'était infligée sur ce dernier. Elle attrapa Dounlor et le fit tomber du mektoub comme une poupée de chiffon. L'homin grogna pour protester. 

-Doun, on a réussit, tu m'entends ? Tu es libre !
-Gia'suki, on a un accord, dis-moi avec quoi je peux soigner Hiro.
-Avec de l'eau et du repos. Assure-toi qu'il soit toujours couché sur le côté, au cas où il se mette à dégueuler. Lai'suki afficha un masque incrédule. 
-Ah yui, je t'ai menti en fait, je n'ai pas empoisonné l'izam, je lui ai juste donné une belle quantité de rhizome de fu-shia à grignoter. À l'heure qu'il est, il doit être complètement défoncé et en proie à de sévères hallucinations. T'inquiète pas, il ne va pas mourir, les kamis utilisent ce machin sur nous durant la cérémonie d'adoption. Ce qui veut dire que c'est sa deuxième fois, il va survivre. Bon après, il vaut mieux qu'il se fasse superviser, il pourrait essayer de faire des trucs biza... Lai'suki décocha un coup de poing directement sur le masque de la zorai à goo. Elle prit la bride de sa monture et partit en silence. Gia'suki se mit à rire et tonna:    

-Dafanshi ! Amène-toi ! Dounlor est de retour, on fait la fête ce soir ! Et amène de la bouffe, il est maigre comme un brin d'herbe, c'est un scandale. 

Gia'suki regarda Dounlor qui l'observait sans dire un mot depuis son arrivée. 

-Ça ira, on va te remettre sur pied, je te le promets. Puis on brûlera tout, pour repartir à zéro.

[HRP]

Tran: Totem
Ba'kwai: Contraction des mots baka (idiot) et kwai (zorai kamiste). C'est une insulte utilisée par les Antekamis contre la Théocratie.
Kai'bini: S'il-te-plait
Yui: Oui
Poko: Enfant

Edité 7 fois | Dernière édition par Giasuki (il y a 3 ans).

#2 [fr] 

Haokan se téléporta au Vide. Puis il s’approcha de la goo, sortit le petit paquet de son sac, et le lança aussi loin qu’il put, avec un grand cri de rage. Pas vraiment satisfait, il sortit de son sac quelques autres objets, qu’il balança avec autant de force et de rage. Ces trucs allaient lui manquer par la suite, mais là, pour le moment, il devait surtout se retenir de ne pas tenter d’y lancer un gubani, ou sa hache Vedice, ou tout autre chose vraiment irremplaçable.

Enfin, ayant épuisé sa rage, il s’écroula et éclata en sanglots.



***


— Né, fii. Je ne vais pas fuir.
— Okajia ? Tu n’es pas assez forte pour lui résister si elle débarque !
— Je suis lasse de fuir.
— Miiiiiii !
— Jia ? Tu ne vas pas me forcer à partir. Et certainement pas pour aller habiter chez un matis !
— C’est juste le temps que je les mette tous en prison, Mi.
— Tu n’y arriveras pas. Tu n’es pas le premier à essayer.
— Au moins celle-là !
— Elle a échappé à la justice jusque-là, tu penses faire mieux que les patrouilles zoraïes ? C’était une futée, dans leur bande. Les homines antekamies sont souvent plus futées ; ça ne place pas le niveau très haut, mais il ne faut pas sous-estimer leur capacité à embobiner les gens.
— Mais Mi…
— Haokan, cela suffit. Tu m’as prévenu, le reste me regarde. Si je dois fuir, je sais comment m’y prendre. Tu surestimes l’importance que je peux avoir aux yeux des Antekamis. Ceux qui auraient pu s’acharner à me poursuivre sont morts définitivement, nous en avons eu toutes les preuves. Quant à toi, je t’interdis de pourchasser cette homine !
— Jia ? Elle est moins forte que moi. Elle est effrayante, mais j’ai réussi à la battre, même sans être vraiment préparé au combat. Je vais la neutraliser.
— Né. Je ne veux pas que tu approches un des ennemis des Kamis avec ce Vide dans ton cœur. Tant que tu n’es pas allé voir les guérisseurs et qu’ils ne t’ont pas déclaré soigné, le seul moment où il me semble acceptable que tu les croises, c’est sur le champ de bataille, entouré de tes amis.
— Je ne suis plus un enfant, Mi ! Je ne me suis pas entrainé autant pour rester à prier au Temple ! Je suis plus fort que toi, plus fort que cette Antekamie, plus fort que les membres de la Kuilde aussi ! J’ai donné toutes les preuves que je savais me battre.
— Avec de la magie et au corps à corps, peut-être. Mais il y a d’autres combats que tu perds, et ce sont les plus importants.

Haokan regarda sa mère, ulcéré. Comment osait-elle ? Après tout ce qu’il avait fait ? Il vit la peur dans son regard, alors qu’elle se tenait dressée face à lui, et cela l’exaspéra encore plus. Le masque déformé par la rage, la voix sourde, il déclara :
— Ce ne sera jamais assez à tes yeux.

Il n’y avait rien à ajouter, à part lutter contre sa colère. Il quitta l’appartement, claquant la porte avec fureur.

***


La journée avait pourtant bien commencé. Il était allé saluer l’aube du haut du Grand Tunnel Roccailleux. Perdu dans des souvenirs bienheureux, il était dans un de ces rares moments de paix.

Il avait été sorti de ce calme par les cris d’une homine. Pas des cris de détresse : juste quelqu’un qui s’amusait à gueuler depuis le promontoire d’en dessous. Il avait observé la zoraïe discrètement, espérant qu’elle parte rapidement et le laisse à sa tranquillité, se préparant cependant à se téléporter dans un endroit plus serein. Elle avait un casque, une armure moyenne qui enserrait péniblement ses formes débordantes, et une masse quasiment plus grosse qu’elle, ce qui était un sacré exploit.

Puis l’homine avait crié un truc qui avait changé radicalement ses plans :
— FAKUANG SI T’ES A QUELQUE PAR JE T’EMMERDE ! SALE TRONCHE DE CAKE À GOO !

Voilà un nom qui aurait dû rester enterré. Haokan avait attrapé ses armes, s’approchant avec prudence. Pas assez cependant : l’homine s’était sentie agressée par sa seule présence (ce qui, avec le recul, pouvait se comprendre). Elle avait commencé à lui mettre des claques pour lui faire avouer « qui l’envoyait pour la surveiller » ; vite échaudé, Haokan avait attrapé son casque, essayant de ramener l’homine au calme tout en évitant de se faire malmener.

Il avait fini par arriver à se présenter. Elle-même enleva son casque, montrant un masque horriblement mutilé :
— Je suis Gia'suki, j’ai plus de nom de famille. Leader des Antekamis Kaze.

Haokan avait été alors saisi d’horreur. C’était une chose que d’aller voir les Antekamis Kaze qui étaient emprisonnés à Min Cho (et cela avait déjà été une sacrée épreuve), mais se retrouver, ici, loin de tout, face à une des leurs… Et qui se disait Cheffe en plus !

Pendant un long moment, il avait oublié ses heures d’entrainements, les défis qu’il avait déjà relevés et réussis. Il s’était retrouvé comme quelques années auparavant, dans cet état de sidération face à l’ampleur du Mal à combattre, quand il était faible et seul.

Mais il n’était plus faible. Il s’était repris tandis qu’ils se chamaillaient verbalement. Et il savait ce qu’il devait faire.

Il serra son poing sur sa hachette. Il avait déjà tué de nombreux homins, et cela ne l’effrayait plus d’infliger de douloureuses blessures à autrui. C’était ce qu’il fallait faire ; ce que les Kamis commandaient. Détruire la goo, et détruire ceux qui la propageaient. Pourtant, une étrange réticence retenait sa main. Cette homine était un lien vers son passé, une occasion de comprendre des choses que personne d’autre ne connaissait…

Et puis (il ne savait plus comment), sa mère avait été évoquée. Cela avait rendu le zoraï fou. Il avait porté le premier coup de hache. Gia'suki s’était bien défendu et lui avait rendu les coups avec hargne, mais l’entrainement auquel il s’astreignait depuis des mois portait ses fruits. Il l’avait mis à terre. Facilement, même.

Contemplant l’homine qui agonisait à ses pieds, il s’était soudain senti vide. C’était ça, qui lui avait fait si peur ? Juste une grande gueule pas si solide ? C’était pour ça qu’il sacrifiait tout ? Pour un combat déloyal avec une zoraïe tout juste rencontrée, dont il ne savait quasiment rien ?

Les larmes avaient glissé le long de son masque. Il avait saisi ses amplificateurs et relevé son ennemie.
— Va-t’en. Je ne veux plus te revoir. La prochaine fois, tu iras rejoindre les autres à Min Cho.
— Non, la prochaine fois, tu ne me verras pas. T’es fort en tout cas, je te donne au moins ça.

Elle avait sorti un cookie emballé dans un linge, qu’elle avait posé devant lui :
— Tiens c’est pour toi, si un jour t’en as marre du grand mensonge.

Il avait contemplé le cadeau avec fascination et dégoût.
— J’ai déjà assez de Vide en moi sans avoir besoin de ta drogue.
— Tu m’en diras tant. Au revoir beau masque immaculé.

Elle était partie. Il l’avait laissé partir. Puis il avait ramassé le paquet, contemplant le cookie, témoin de sa stupidité.
— Malédiction !

Et il s’était ensuite téléporté au Vide pour se débarrasser du dangereux biscuit.

Dernière édition par Haokan (il y a 3 ans).

#3 [fr] 

Après une bonne douche sous les Chutes Mystique, l’Antekami se rhabilla et prit ses affaires. Elle se dirigea dans le Bosquet de l’Ombre en évitant les cités Kwai. Un troupeau de bodocs se fit entendre de loin, un détour s’imposait avant de rentrer. Elle se tapie dans l’herbe et avança doucement vers le troupeau. Lequel allait-elle prendre? Lequel allait mourir? Gia’Suki repéra le plus gros. C’était lui, il était pour elle. Elle se prit un élan et bondit en assenant un coup de massue sur la tête de l’animal pour le déstabiliser. Prit par la panique, le reste des herbivores prit la fuite, cherchant un endroit plus sécuritaire où brouter de la verdure. Le bodoc complètement étourdi tenta de s’enfuir mais son sens de l’orientation était en déroute et il peinait à se repérer. Fou de rage, il se débattait et contrattaquait maladroitement son adversaire. La Zorai au masque mutilé prit sa massue et frappa de toute ses forces jusqu’à ce que sa cible ne bouge plus, ce qui fini par se produire. Elle l’attacha par les pattes avec une liane et le traina lentement jusqu’au campement Antekami.

La voyant arriver de loin, les enfants se mirent à courir dans sa direction et lui sautèrent joyeusement dessus pour l’accueillir. Elle les attrapa les uns après les autres et les coinça dans ses bras, faisant mine de les manger, provoquant leur plus grande hystérie. Les plus vieux des Antekami prirent en charge de dépecer la viande rapporté par la chef de shizu. Ils montraient aux jeunes comment le faire pour qu’un jour ils puissent se débrouiller à leur tour.

Elle entra dans sa tente, déposa ses armes puis ordonna la présence de son shaman. Dounlor apparut, couvert de sciure, de branches et d’écorce, on ne voyait même plus de bleu tant il s’était métamorphosé.

-Je savais bien que tu écoutais.
-Est-ce que tu as vu où j’étais caché?
-Né j’ai juste eu l’impression que tu étais là.

Le zorai affichait un air fier et satisfait. Depuis sa sortie de prison, il avait cette lubie de toujours vouloir se cacher dans son environnement et il le faisait à merveille, cela en était presque troublant. Gia’Suki se disait que c’était sans doute une manière de communiquer qu’il ne se ferait plus jamais attraper. Beaucoup de choses était différentes depuis son retour, les années de taule l’avait rendu plus résistant et plus spirituel. Il semblait entretenir un lien particulier avec la Pourpre. Les tortures de la Théocratie n’avaient fait qu’accroitre la force mystique qui l’animait.

-Quelles sont tes intentions en ce qui concerne le jeune kamiste?
-Je n’en ai pas pour le moment, j’attends de voir de quel bois il est fait. Tu as bien vu qu’il est tout sauf stable, rien à voir avec ceux qu’on a l’habitude de croiser.
-Il n’est pas prêt à affronter la réalité.
-Je suis d’accord avec toi.
-Peut-être que la meilleur solution serait de lui faire embrasser la Pourpre de force et voir ce qui se passera? C’est bien ce que nous avons toujours fait.
-Le faire de force ne garantie aucun résultat, je préfère prendre mon temps et voir s’il va succomber de lui même. Il transpire tellement le doute que ce serait bête de ne pas essayer.
-N’es-tu pas celle qui préfère forger les Antekami de toute pièce au lieu de les obtenir à partir de matériaux de seconde main?

Dounlor faisait référence au fait que depuis qu’elle avait la division Kazé en charge, Gia’suki n’espérait plus convertir les homins à leur philosophie. Elle préférait que le clan grossisse naturellement avec le plus de naissance possible. C’est une stratégie qu’elle avait emprunté à ses ennemis de toujours. Les Kamis endoctrinaient les zorais dès leur plus jeune âge et il faut avouer que ça fonctionnait sacrément bien. Elle en ferait de même. Plus il y avait de mômes et mieux c’était. Elle leur enseignait rapidement que le masque était une vieille malédiction lancé par les démons pour les marquer au fer et les posséder. Pour les Antekami, déchirer le masque était une manière sans équivoque de dire: non. La pousse du masque était pour le moment sans parade et il fallait être fort et l’endurer. Après venait le temps de le nier. Les Antekami Kaze avaient mis au point un rituel d’affranchissement où les zorais renonçaient à leur chaines en présence de toute la shizu. C’était l’ultime épreuve de force et de volonté pour intégrer la famille.

-Je n’attends rien de lui mais ça n’empêche pas d’essayer Dounlor, c’est toujours pratique d’avoir de la nouvelle sève au sein du clan.

Le zorai se tût un moment.

-Tu dors avec qui ce soir?
-Avec personne, j’ai pas envie de compagnie.
-Tu pleures toujours Faku…

Gia’suki décocha un coup de poing sur le masque de Dounlor qui esquissa un sourire malsain.

-T’en veux encore ou ça ira?
-Ça ira, je te laisse à tes pensées.

#4 [fr] 

Vers le Fallenor 21, 3e CA 2615 ou à peine plus tard

Haokan regardait l’eau de la fontaine de Pyr couler. Cela l’hypnotisait, faisant doucement redescendre le maelström d’émotions qui l’avait submergé. Il prenait vaguement conscience d’avoir été idiot à plus d’un titre. Bah, c’était de famille.

Et c’était bien tout le problème. Peu importe ce qu’il pouvait faire, cette sève maudite le façonnait. Lutter contre ou l’accepter : cela ne changeait rien. Sa colère s’écoulait dans l’eau de la fontaine, et seule restait la terreur absolue qu’il ressentait face à sa totale impuissance.

Il aurait tellement aimé que les kamis apportent une réponse. Une réponse définitive. Cela aurait été juste. Il était tout prêt à payer ce prix. C’était une façon simple de ramener un peu d’équilibre. Mais cela n’était pas possible.

Tout ce qu’il faisait… ça n’avait aucun sens. Peu importait ses intentions affichées ou inconscientes. Cela faisait un moment qu’il n’avait pas eu le courage d’affronter sa mère, depuis qu’elle avait refusé de fuir la menace antekamie. Si elle voyait son masque à présent, c’était lui qui allait finir en prison. Enfin, peut-être pas, mais il ne voulait pas prendre le risque. Tous les autres, les nékwais, ils ne pouvaient pas voir ni comprendre, et puis cela n’avait aucune importance pour eux. Qui se souciait du sort d’un idiot de kamiste dans son genre ?

Bien sûr, il y avait quelques trykers qui tentaient de le faire parler. Mais à ce stade, Haokan doutait fortement de leurs véritables intentions. Ils étaient tous moqueurs et avinés et la seule chose qui devait les intéresser, c’était d’avoir quelqu’un dont ils pouvaient rire. Avait-il un seul ami vers qui se tourner ? Un véritable ami ? Non, personne ne pouvait l’aider, ni les kamis, ni les homins. Rien ni personne ne pouvait changer son destin. Cette solitude terrible ajoutait à ses souffrances, mais chacune de ses tentatives pour la briser avait été une catastrophe. Il n’était pas certain de la façon dont tout cela allait se finir, mais il était sûr d’une chose : ce serait à l’image de ce monde affreux, plein de désillusions, de vide et de souffrances.

Complètement abattu, mais enfin calmé, Haokan délaissa la fontaine de Pyr et le verre de shooki qui devait encore l’attendre au fond du bar, et se téléporta à Min Cho pour rejoindre son appartement.

Il fallait qu’il arrête de se focaliser sur cette grosse antekamie, elle ne pourrait rien faire de plus que les autres. Il n’avait pas besoin de hâter les choses. Qu’il agisse ou non, le destin finirait par s’accomplir.

#5 [fr] 

En plein milieu de la nuit, les Antekamis Kazé procédaient au Rituel de la Mémoire. Le shaman préparait Gia'Suki à son voyage spirituel pendant que les autres membres de la shizu frappaient sur des tambours à l'unisson. Les Kazé étaient connu pour être désordonnés et chaotiques mais lorsqu'il s'agissaient de musique, ils savaient se synchroniser parfaitement ; sous l'influence de leurs cocktails, ils pouvaient le faire durant des heures. Dounlor libéra sa cheffe de son armure et l'aida à enfiler une longue tunique blanche. Aidé par Les Jumelles, il versa sur sa tête de la peinture violette et sur ses épaules le sang d'un bodoc sacrifié. Deux étrangers avaient été convié pour l'occasion, des intéressés qui se plaisaient à faire la fête de temps en temps avec leurs voisins. Recouverte des liquides poisseux, la cheffe de shizu prit place sur l'autel sacrificiel et avala le breuvage hallucinogène préparé par son shaman. Le reste de l'assemblée en firent autant.

Dounlor commença ses incantations en taki. Son regard se voila au fur et à mesure qu'il entrait en transe, guidé par le son envoûtant des tambours. Au loin, les gardes de Min-Cho pouvaient entendre leur raffut. Les Antekamis étaient agités et par expérience, cela n'augurait rien de bon.

Gia'suki sentait que ses forces l'abandonnaient, son corps était engourdit. Il ne restait que sa pensé et la voix de Dounlor.

-Son masque, concentre-toi sur son masque. Comment était-il?
-Blanc mais...avec des larmes.
-Tu le connais, comme tu connais sa voix. Comment était sa voix?
-Fragile, faible...fatigante, elle me donnait envie de la frapper.
-Gia'suki, tu connais cette créature disciple des démons Kamis mais son nom, tu ne le reconnais pas. La Pourpre me dit que comme toi, elle possède plusieurs noms. Quel est son nom?
-Ylang...
-Né pas celui-là, celui que tu connais. Que je connais et qui est connu de la shizu.
-Je ne sais pas, je ne sais plus.
-Bien sur que tu sais.
-Je...c'est trop loin, il me semble que cela remonte au temps où j'ai déchiré mon masque pour la première fois.
-Raconte-moi encore cette journée.
-C'était après ma cérémonie du masque, je rentrais à Min-Cho. J'étais encore sonné et dans les vapeurs. Il y avait Aku, Krokwai et quelques autres. Je me souviens...de mon premier gookie. Je me souviens de...l'avoir mangé. J'avais trop faim.
-Tu as toujours trop faim.
-Hé hé, c'est vrai.
-Tu ne les connaissais pas encore mais leur masques mutilés ne pouvait mentir. Tu savais qu'ils étaient considérés comme des criminels.
-Yui.
-Et tu savais ce que tu étais en train de faire.
-Je le savais, Dounlor. J'étais jeune mais je savais très bien ce qui était en train de se passer. Je n'ai jamais voulu des Kamis, ni de cette chose sur mon visage. Intégrer la shizu était mon seul recours pour échapper à ces tarés d'initiés et à leurs maitres.
-Tu as choisi la Pourpre et la Pourpre t'a choisi. Te souviens-tu du moment où tu as brisé tes chaines?
-Yui, ils étaient tous là, à...à me regarder en se demandant...si j'allais le faire, si j'allais en être capable. Je me souviens de Fakuang, il me regardait avec ce masque avide et affamé. J'ai pris ma dague...et j'ai déchiré mon masque, une entaille énorme qui court de ma joue gauche à la droite. La douleur était insoutenable... Le sol se dérobait sous mes pieds et ma vision se troublait. Et elle...elle était là...je me suis évanouie.
-Qui était là? Qu'est-ce que tu as vu avant de sombrer?
-Dounlor, je suis fatiguée, je ne me souviens plus...

Dounlor posa sa main sur le masque meurtri de Gia'suki et le serra pour réveiller la douleur et forcer sa mémoire. Elle rugit et essaya d'attraper le shaman pour lui mettre une claque mais Les Jumelles s'interposèrent, tenant chacune un bras de leur mère, l'empêchant de bouger d'avantage.

-Elle était là! L'effroi tordait son masque. Figée. C'était...

Gia'suki se figea un moment et devint hystérique.

Dernière édition par Giasuki (il y a 3 ans).

#6 [fr] 

-Un prophète du Vide?
-C’est cela, qu’en pensez-vous.
-C’est une idée intéressante Mère, mais il est à des années lumières d’une telle chose.
-Tu penses que c’est irréalisable?
-Nous pensons que les probabilités de succès sont très mince. Nous ne pensons pas qu’il est sage de placer trop d’attente en cet homin.
-Et toi Shaman?
-La Pourpre murmure souvent son nom, il est appelé mais j’ignore si lui-même, entends l’appel. Il ne risque pas de devenir quoi que ce soit si tu t’acharne à vouloir le détruire, Mère des Antekami Kaze.
-Tu comptes m’empêcher de jouer avec ma proie?
-Oui et d’ailleurs j’ai une nouvelle qui va sans doute plaire à cette assemblée. Tu portes encore une fois la vie en ton sein.

Les Jumelles haussèrent le masque de surprise et contempla le masque de la cheffe de shizu, qui lui, ne révélait aucun doute.

-Tu le savais?
-Je m’en suis rendue compte récemment. Je pense que j’en suis à environ 7 cycles.
-Mère!
-Oh! Baissez le ton, je dirige encore cette shizu!
-Tu ne peux pas poursuivre Haokan alors que tu portes la vie, nous nous y opposons.

Gia’suki fusilla ses deux filles du regard. Dounlor était impassible.

-Qu’est….ce que vous me faites là. C'est une crise d’adolescence?
-C’est une mutinerie.

La matriarche poussa un rire effroyable et sorti sa massue.

-Et laquelle d’entre vous prétend pouvoir me prendre ma place…

La plus vieille fit un pas, arrêté si tôt par la plus jeune qui lui murmura quelque chose à l’oreille. La première opina et laissa sa jeune soeur défier leur mère. Elle enleva son armure et ne garda que ses habits de mage et ses gants.

-Je ne te ferai pas de cadeau, ne vient pas pleurer après.
-Je te mettrai en échec sans même te toucher, ne m’en veut pas.

Gia’Suki empoigna son énorme massue et la balança en direction de son insolente fille, qui esquiva le coup. Emportée par son élan, elle ne fut pas capable d’empêcher l'enchanteresse de s’approcher d’elle. La jeune homine lui enleva son casque et posa ses doigts délicats sur le masque de sa mère. Un charme suave et envoûtant résonna dans tout le campement. « Dors…. » Avait-elle prononcé. Gia’suki tomba à genoux et fut rattrapé par sa fille ainée avant de s'écrouler. La cadette sorti une dague etposa son tranchant sous la gorge de la matriarche. L’enchantement prit fin et l'Antekami vaincue s’éveilla.

-Une seule d’entre vous peut prendre la tête de cette shizu, que vas-tu faire?

La cadette resta immobile un moment et se saisi de l’épingle de chef. Elle avança vers sa soeur ainé et posa solennellement un genou sur le sol. Elle leva les mains vers le ciel et lui présenta l’insigne.

Cette dernière prit l'insigne des mains de sa sœur pour le lui épingler immédiatement sur le torse.
- Nous te le rendrons, mère, lorsque tu auras enfanté.
-Nous interdisons toute action militaire contre Haokan et ce jusqu’à nouvel ordre. Considérez-le comme intouchable. Ensuite Mère, nous t’imposons une période de repos, le temps que notre frère ou notre soeur vienne au monde. Pas de combat, pas de complot, pas d’activité trop épuisante, rien du tout.


-Ça implique aussi le sport sans vêtements?
-Que…quoi? Mère qu'insinus-tu!
-Mais rien!

Dounlor se mit à se marrer dans son coin.

-Roh allez on peut rire, non?
-Hmmpff. Bref, reste tranquille. Nous viendrons à toi si nous avons besoin de tes conseils. En attendant, nous poursuivons notre projet en cours.

#7 [fr] 

Gia’suki caressait doucement son ventre et murmurait à son petit qui y sommeillait. Yumzi’gami s’était montrée particulièrement obstinée et la Mère des Antekamis se rendit à l’évidence, elle ne le faisait pas par hasard. L’Esprit Pourpre avait laissé sous-entendre que cette naissance annoncerait le retour d’un de leurs disparus mais était-ce réellement possible? La plupart des Antekamis n’envisageaient pas la réincarnation après la destruction d’une graine de vie. Sauf que…la graine de vie de Fakuang n’avait jamais été détruite, elle avait sommeillé dans les champs de pourpre avant d’être rendu à la tribu…dévorée par Gigi elle-même.

Ou peut-être que Yumzi’Gami tissait tout au fur et à mesure et rien n’était vrai, mais elle n’avait rien d’une homine ordinaire.

Plus le temps passait et plus l’énorme Kwai pourpre s'inquiétait de cet esprit qui rodait dans la Jungle. Elle avait eu un avant goût de son pouvoir et ne tenait pas à trop la contrarier. Seulement, elle devenait agressive lorsque que ses enfants étaient concernés, tous n’avaient pas l’âge et la puissance de ses deux filles adorées. Elle en avait encore en bas âge, dont le visage était pur et libre des entraves des Dévoreurs. Elle savourait chaque jour pour eux, car ils ne réalisaient pas encore ce vers quoi ils se dirigeaient.

Elle prit un morceau de parchemin et envoya un izam à son charmant voisin.

« Maze’yum, je t’écris pour que tu sache que Gami est sur ton cas, elle dit que si tu ne te ressaisis pas, elle te réserve un sort pire que ce que tu as vécu par le passé, peut-importe ce que cela veut dire. Je la trouve très en forme ces temps-ci, méfie-toi.

Moaïs
Gia’suki

PS: Tu as intérêt à te tenir correctement avec mes filles si tu ne veux pas que moi aussi je m’occupe de toi. Tu sais très bien de quoi je parle. C’est une promesse. »

#8 [fr] 

Mazé'Yum avait repris son tour des tribus. En passant chez les Antekamis, il s'enquit de Gia'Suki. La naissance du petit devait être une affaire de jour. Peut-être devait-il rester dans le coin pour agir si les choses tournaient mal ?

Mais les Antekamis refusaient de parler de Gia'Suki. Ils détournaient la conversation, comme le fait tout Antekami qui a un problème : avec force insultes et déclarations sans aucun rapport avec le sujet. Mazé'yum supporta cela environ une demi-heure, avant d'en choisir un à sa taille et de lui appliquer le contre-interrogatoire antekami typique.

Il détestait ce genre de bagarre stupide. C'était comme ça que ça fonctionnait, ici, mais il allait encore en sortir avec de la couture à faire. Quelques instants plus tard, une partie du camp était en train de se rouler dans la poussière, de se mordre, de se rouer de coups. Mazé'yum avait réussi à se concentrer sur un adversaire ; sa façon de se battre était plus méthodique que celle des autres, ce qui lui donnait un avantage.

Quand les choses se furent un peu calmées, la pression retombant, l'antekami malingre avait enfin rapidement expliqué ce qui se passait.

Gia'suki avait été emprisonnée par la Théocratie.

À mesure que les implications de cette perte s'imposaient à l'esprit de Mazé'yum, il sentait la panique le gagner. Gia'suki et l'enfant qu'elle portait étaient importants, extrêmement importants. Leur disparition était terrible. Pour les antekamis, qui perdraient une de leur meilleur leader et leur mère la plus solide ; pour les tribus pourpres, qui verraient l'affaiblissement d'une tribu dont le rôle était essentiel ; pour la Pourpre qui verrait ses plans mis à mal ; et enfin, problème bien plus grave, pour Mazé'yum lui-même sur qui tout allait retomber à un moment ou un autre.

Il fallait la faire sortir de là. Rapidement, avant qu'elle accouche.

L'Esprit était-il au courant ? Probablement. Elle avait peut-être des consignes. La priorité était de la trouver ; mais s'il ne tombait pas sur elle d'ici la fin du jour, alors il devrait envisager d'autres solutions.
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